Au même titre que Will Haven, Botch est considéré comme un mythe du mouvement hardcore, et ce malgré un auditoire plus que restreint et une petite poignée d’albums. Bien que fondé au cours de l’année 1993, il aura fallu attendre six ans avant de voir débarquer ce véritable premier opus, suite à quoi le quatuor se montrera plutôt productif avec pas moins de trois albums en trois ans. Hydra Head Records ré-édite donc aujourd’hui la discographie du groupe, commençant logiquement par ce American Nervoso agrémenté de cinq morceaux de fonds de tiroirs.
Bien qu’entré au panthéon des disques étiquetés hardcore, ce premier essai s’avère cependant loin d’être accessible. Botch livre le temps de neuf titre un concentré de hargne compact et presque assourdissant. Les quatre américains dévient brutalement dans toutes les directions en couchant sur bandes des textures instrumentales quasiment incompréhensibles de prime abord. Rapidement estampillé de l’appellation mathcore, Botch livre des structures radicalement éloignées de la norme, le groupe préférant de loin des constructions chaotiques qui ne semblent répondre à aucune logique qui demanderont par ailleurs une concentration poussée chez l’auditeur afin d’espérer les décrypter convenablement. Pas de refrain, pas de couplet, mais plutôt un étalage de violence et de sentiments torturés donnant vie à une tripoté de compositions puissantes et résolument hors normes (« John Woo », « Rejection Spoken Softly »). Dissonances et autres expérimentations sur-saturées sont jetés allégrement dans la tambouille de Botch, chaque titre oscillant constamment entre larsens maîtrisés et incartades écrasantes de lourdeur construites sur des enchaînements de riffs plombés.
Techniquement impressionnant, le groupe balance sa musique avec une vélocité terrifiante, brisant régulièrement ces éructions rageuses d’accalmies pseudos-mélodiques faussement reposantes (« Spitting Black » et son pont aérien rondement mené par une basse fortement marquée, le piano accompagnant le larsen sur la conclusion de « Oma ») n’enlevant en rien la tension continue présentée par ce American Nervoso. Derrière le micro, l’enragé Dave Verellen n’accorde aucun répit à ses pauvres cordes vocales, maltraitées avec insistance sur chaque composition. Aucune mélodie n’ose pointer le bout de son nez tant le bougre semble se complaire dans les hurlements arrachés et corrosifs. Verellen vomis et hoquette ses beuglements avec une rage sans pareille, livrant ses sentiments de manière crue et arrachée, chassant toute volonté de brailler le temps de quelques rares incartades parlées mais pleinement poignantes (« Spitting Black »). Un inédit court explorant les mêmes terrains accidentés (« Stupid Me ») viendra compléter le tableau en ce qui concerne cette ré-édition, une composition oscillant constamment entre le calme et la tempête bien plus intéressante que les quatre autres bonus (trois démos et une version rallongée de « Spitting Black ») qui ne trouveront un véritable intérêt qu’aux yeux des inconditionnels.
American Nervoso est un disque difficilement analysable mais foutrement compact et cohérent. Un coup de point en pleine gueule, une expérience à tenter absolument.
.: Tracklist :.
01. Hutton’s Great Heat Engine
02. John Woo
03. Dali’s Praying Mantis
04. Dead For A Minute
05. Oma
06. Thank God For Worker Bees
07. Rejection Spoken Softly
08. Spitting Black
09. Hives
10. Stupid Me
11. Spitting Black (Extended)
12. Hutton’s Great Heat Engine (Demo)
13. Rejection Spoken Softly (Demo)
14. John Woo (Demo)