Les 25 et 26 août 2023, à Bar-le-Duc (Meuse), avait lieu la 12e édition du festival Watts à Bar avec une programmation punk/metal le vendredi et reggae/trance le samedi. Un beau succès puisque 7000 personnes sur les deux journées ont répondu présent à l’appel de l’association Be Real qui avait misé cette année sur des valeurs sûres et plusieurs groupes déjà programmés par le passé.
Ayant pu entrer sur le site avant l’ouverture aux festivaliers, j’ai eu la chance d’assister à la balance des Wampas, un concert presque « privé » qui m’a donné un bel aperçu de la prestation à venir de ce groupe formé en 1983, porté par son infatigable chanteur et créateur Didier Wampas. J’en profite aussi pour visiter tranquillement le site composé de deux scènes, une grande et une petite, des stands de merch, des foodtrucks et un bar ainsi qu’un espace un peu excentré réservé aux soundsystems. Deux campings complètent le site. Un violent orage la nuit précédente a rendu le terrain un peu boueux mais on a échappé au pire même si la pluie s’invitera une ou deux fois pendant les deux jours du festival.
Sauv’qui punk, c’est donc les Wampas qui donnent le coup d’envoi du festival. On ne présente plus ce groupe entré dans la légende du punk/rock français qui va prouver encore une fois qu’il n’a pas dit son dernier mot avec au chant et à la guitare depuis 40 ans Didier Wampas, entouré du bassiste Jean-Michel Lejoux, du batteur Niko Wampas et des guitaristes Tony Truant et Effello Wampas, le petit dernier. Le concert démarre avec … Luis Mariano ! Les enceintes crachent le son un peu grésillant de « L’amour est un bouquet de violettes » puis c’est parti pour une heure et quart de folie et une succession de titres qui font le bonheur du public, notamment « Sauver le monde », « L’aquarium tactile », « C’est l’amour », « C’est politique », « Comme un punk en hiver », « Frontignan blues », « Manu Chao », « Les bottes rouges », « Rimini », « Petite fille » et j’en oublie, le tout dans un joyeux bordel et un Didier Wampas en grande forme dans son tee-shirt Mickey. Il ne tient pas une minute en place et pour le trouver, suivez le fil du micro dont les gars de la sécu tentent de suivre la progression comme ils peuvent. Après avoir, entre autres, été porté sur une chaise tel un empereur sur son trône, s’être perdu dans la fosse, avoir été porté par le public féminin invité sur scène, avoir demandé au public de faire un wall of death digne de ce nom, Didier Wampas termine le concert à la régie son ! Quel put*** de groupe ! Les Wampas sont sans aucun doute la preuve que Dieu existe.
Encore un groupe punk français de 40 ans d’âge ! Ludwig von 88 prend possession de la grande scène et c’est parti pour une joyeuse folie. Décor fleuri, peluches, tenues de scène déjantées, ballons, confettis, une grande fête et un public au taquet pour accompagner ce groupe qui ne se prend pas au sérieux et va interpréter au pas de course ses meilleurs titres, passant des increvables « Houla la ! », « Louison Bobet », « Bilbao », « 30 millions d’amis », HLM, aux plus récents « Jean-Pierre Ramone » ou « Job de merde » sans oublier « Oui oui et la voiture jaune ». C’est drôle, c’est addictif, c’est punk, ça fait un bien fou, bref c’est Ludwig von 88 !
Pour terminer cette première journée sur la grande scène, un peu moins de légèreté et un groupe un poil plus « jeune » mais avec 30 années de carrière au compteur tout de même. Place au metal industriel et aux textes engagés de Mass Hysteria. Grosse grosse claque, je ne les avais pas vus depuis 2016 et la tournée « Matière noire » et c’est peu de dire qu’ils n’ont rien perdu de leur rage et de leur énergie. Ils l’ont répété plusieurs fois, la révolution approche ! Trois ans max. A suivre donc. La sécu est mise à contribution, c’est le bordel dans la fosse et la croix rouge ne va pas chômer non plus. Si tu ne finis pas avec au moins un bleu, tu as raté ton concert de Mass Hysteria ! Enchaînement de titres, « Mass Veritas », « Positif à bloc », « Chiens de la casse », « Notre complot », « Se brûler sûrement », « Arômes complexes », « L’enfer des dieux » en hommage à tous ceux qui sont tombés au Bataclan, « Encore sous pression », « Tout est poison », « Le grand réveil », « Contraddiction », « Furia », « Plus que du metal » … La « famille » s’est déplacée en nombre, les tee-shirts à l’effigie du groupe sont nombreux, portés par des quinquas comme des enfants. Les plus jeunes sont invités par le groupe à monter sur scène, on compte sur eux pour contribuer à rendre ce monde meilleur !
Sur la petite scène se sont succédé Cleaver (hardcore), Burning Heads (skate punk mélodique) et Darcy (punk/rock). Une programmation 100 % française pour cette première journée et pas de la guimauve mais du bon gros rock qui tache preuve que ce n’est pas le domaine réservé des anglo-saxons. John Lennon aurait dit que « le rock français c’est comme le vin anglais ». Nul doute que s’il avait assisté à cette première journée du Watts a Bar il aurait fait son mea culpa !
Après une petite ballade sur les hauteurs de la jolie petite ville de Bar-le-Duc, direction le château de Marbeaumont pour la deuxième journée de cette 12e édition du Watts a Bar qui commence avec le reggae de Tiken Jah Fakoly. A l’entendre parler de l’Afrique (« le continent le plus riche sur lequel vit pourtant la population la plus pauvre »), on mesure ce qu’il doit ressentir chaque jour face à l’actualité et on aimerait tellement que les artistes aient le pouvoir de changer le monde. Chacun de ses textes est pétri de son engagement pour ce continent magnifique, berceau de l’humanité, pourtant fui chaque jour par une population malmenée. On ne va peut-être pas refaire le monde mais écouter Tiken Jah Fakoly c’est déjà une sacrée prise de conscience. Les titres s’enchaînent, « Africain à Paris », « Plus rien ne m’étonne », « Tonton d’America », « Où est ce que tu vas ? », « Religion », « ça va faire mal », « Le peuple a le pouvoir », « Gouvernement 20 ans », « Ouvrez les frontières », « Braquage de pouvoir », « Massa », « Françafrique », repris avec ferveur par le public.
Un nombre impressionnants d’instruments de musique est installé sur la grande scène du festival. C’est même la première fois que je vois un thérémine sur scène. Place à la « transe naturelle » de Hilight Tribe portée par des multi-instrumentistes de génie. C’est tout simplement incroyable. Des instruments issus de culture d’ici et d’ailleurs se combinent à des rythmes électro, créant ainsi des hymnes à la danse libérateurs. Depuis 20 ans, Hilight Tribe se produit sur les scènes du monde entier. La fosse est réellement en transe, naturelle ou pas c’est une autre histoire !
Même si on reste dans la musique trance/tribale, l’intensité monte en puissance avec La p’tite fumée. Je les avais déjà vus au Watts à Bar en 2019 mais, depuis, leur scénographie est montée d’un sacré cran. Là encore, de multiples instruments dont le didgeridoo, une trompette primitive en bois jouée par les Aborigènes du Nord de l’Australie et dont l’usage pourrait remonter à l’âge de pierre, preuve que la musique est essentielle à l’homme depuis la nuit des temps. Un concert de La p’tite fumée ça ne se raconte pas, ça se vit. Quelle ambiance de dingue. C’est jouissif. L’incroyable énergie des membres du groupe semble littéralement vous envahir et qu’importe l’heure tardive, la pluie, le public se sent léger et aérien comme la fumée blanche dont le groupe l' »arrose » régulièrement.
Cette 12e édition du festival a rencontré un beau succès, l’affluence ayant toutefois engendré quelques problèmes de logistique que les organisateurs auront à coeur de corriger l’année prochaine. Pour ma part, j’ai passé deux journées incroyables et le retour à la « vraie vie » a été plus que difficile !
Merci aux bénévoles sans lesquels la plupart des festivals n’existeraient pas, à la sécu qui a été plus que mise à contribution, aux organisateurs de ce festival à taille humaine, engagé, à la très belle programmation, dans un environnement bucolique, le Watts à Bar est l’événement parfait pour terminer la période estivale. Et mille mercis à Léo pour l’accréditation et l’accueil !