Arman Méliès aura pris le temps de peaufiner son quatrième album. Plus ou moins achevé depuis de nombreux mois, son nouvel effort aura demandé de multiples retouches. La faute à une approche de la musique revue en profondeur, l’artiste ayant clairement exprimé dès le début de l’écriture la volonté d’habiller sa musique d’une esthétique sonore électro-pop aux sonorités vintages. Un temps attaché à la composition des albums d’Hubert Félix Thiéfaine ou de Julien Doré, Méliès livre ici une parfaite antithèse des travaux pour lesquels il intervient en acteur de l’ombre. Déroutant et bien construit, IV redessine l’univers d’Arman Méliès avec une sérieuse audace.
En un titre, la bande-originale du métrage Drive semble avoir érigée les bases d’une nouvelle tendance. Fusionnant allégrement pop aux refrains simples et efficaces et touches électroniques eighties, Arman Méliès s’inscrit directement dans la mouvance du moment. Sans pour autant y perdre une quelconque once de personnalité. S’il renouvelle considérablement la palette sonore érigée par les précédents albums de l’artiste, IV n’en oublie pas les fondements. L’élégance satinée de Méliès s’inscrit ici au service de dix compositions mélancoliques, bardées d’envolées aux sonorités minimalistes, à la fois robotiques et étonnamment troublantes – le spatial « Pompéi » –. Evoquant aussi bien la chanson française littéraire d’un Bashung que l’électro aliénant de Kraftwerk, IV parvient en effet à une juste synthèse. L’ensemble se positionne habillement du côté de Depeche Mode pour son côté new-wave, voire comme un Daho aux accents hipsters pour la clarté du chant, sans jamais laisser un registre vampiriser l’autre. Arman Méliès semble s’y amuser, malgré l’évident travail de composition effectué au cours de l’écriture. Empilant claviers et guitares sans schéma préconçu mais avec une réelle harmonie, le travail du musicien gagne en originalité, mais ne renie à aucun moment l’accessibilité d’antan.
Patiemment composé, traficoté en tous sens, IV se pare d’une dimension quasi-expérimentale en matière de chanson française 2.0. Le tout reste cependant sobre et fluide. L’accompagnement vocal de l’artiste n’y est probablement pas étranger. Arman Méliès est avant tout un pur transfuge de la chanson française, et juxtapose à ses instrumentations un timbre et des intonations classiques. Introspectifs, souvent alambiqués et imagés, les textes de l’artiste témoignent une nouvelle fois d’une certaine science des mots. Méliès cultive comme beaucoup un penchant poète, qui s’illustre ici par un chant feutré certes un brin radiophonique mais contrebalancé par la beauté du propos.
Difficile de classer IV dans une catégorie bien définie. Si Arman Méliès puise ses inspirations premières du côté de la pop, l’artiste livre à travers son nouvel album un maelstrom d’influences. Au croisement des époques et des mouvances musicales, IV invite à un voyage musical inédit, presque intemporel. Le meilleur moyen d’en saisir les subtilités reste probablement de s’y aventurer.
.: Tracklist :.
01. L’art perdu du secret
02. Mon plus bel incendie
03. Pompéi
04. Silvaplana / Röcken / Schwarzwasser / Der Antichrist
05. Rose poussière
06. Des vitrines
07. Fern Insel
08. Dans la cendrée
09. Arlésienne
10. Mes chers amis