Cela fait bientôt 10 ans qu'Enhancer nous a fait la promesse d'un monde meilleur et pourtant rien n'a changé. L'arrivée au pouvoir de Barack Obama n'y changera probablement rien, car avec l'emphase d'un George Abitbol, il n'y a qu'une seule chose à dire : « Monde de mairde ». Passé l'électrochoc et les sauts de buildings en buildings, Enhancer lance la castagne sous le cri du « Rock Game », son single parmi les singles. Désobéir, un quatrième album d'une autre teinte, d'un autre contenu et qui décontenance.
L'union fait la force
Enhancer cultive un parcours exemplaire, malheureusement incompris à plusieurs égards. A la base, c'est l'histoire de jeunes des banlieues pavillonnaires de Cergy qui vont se retrouver pour jouer ensemble. Non pas sous forme d'un groupe, mais véritablement d'un collectif, d'un crew, sous l'adage qui dit « l'union fait la force ». Il ressort de la Team Nowhere un véritable foisonnement artistique, une pépinière qui laisse aux jeunes pousses assez d'espace pour grandir. Pleymo sera le premier arbre à cacher la forêt avant qu'on aperçoive les désormais célèbres AqME, Vegastar, Wünjo et bien évidemment Enhancer. Autour d'eux, des dizaines et des dizaines de groupes seront influencés par leur état d'esprit qui prône l'ouverture, le respect, la déconne en toute simplicité.
En 2000, Enhancer sort … et le monde sera meilleur, probablement l'album le plus marquant de toute cette mouvance fusion entre hip hop et metal, influencé par les grandes pontes d'Outre Atlantique (RATM, Korn, Deftones, etc.). La tournée n'en fini pas et le deuxième album met trois années avant d'être lancé. Entre temps, le groupe nous a promis un revirement brutal vers le hip hop (un album purement hip hop était prévu…). A sa sortie, Street Trash subit un battage médiatique sans précédent pour un groupe de cette envergure. La Team Nowhere est la véritable coqueluche des médias spécialisés français à cette époque, pourtant l'album qui déçoit se savoure 5 ans plus tard avec ses hymnes que son « Street Trash », « E.N.H.A.N.C.E.R » ou « Pas Sommeil ». L'album suivant, Electrochoc, va mettre fin à l'image lissée du groupe. Enhancer, alors présent chez Barclay, se laisse tenter par des frasques marketing qui aboutiront au clip le plus décevant de sa carrière, « Dirty Dancing ». Clip incompris. Le second degré, avec l'apparition du président de Groland et d'un tas de freaks, n'est pas perçu comme il se doit et Enhancer passe pour une sacré troupe de branleurs… S'enchaine une rupture de contrat avec la major, l'implosion du collectif, la création d'un label associatif (Nowhere Prod) et la sortie d'un DVD posthume dédiée à la Team Nowhere en 2008.
L'art de la provocation
C'est dans ce contexte difficile, avec une image ternie, qu'Enhancer nous propose un quatrième album déclaré comme la revanche du rock français sur toutes les aberrations de l'industrie du disque. C'est d'ailleurs le thème de son premier single, « Rock Game »,dans lequel les membres d'Enhancer en fossoyeurs assènent successivement de larges coups de pelles à BB Brunes, Tokio Hotel et Nicolas Sirkis (Indochine). Enhancer c'est aussi 10 ans de savoir faire dans l'art de la provocation. Après les jets privés à leur nom, les poses photo devant les hummers entourés de bimbos, les membres d'Enhancer reviennent avec la prétention de vouloir nettoyer l'industrie du disque de ses yéyés d'un nouveau genre …
Enhancer nous fait une deuxième fois la promesse d'un monde meilleur, en ancrant son discours autour de problématiques très actuelles. Enhancer pointe du doigt des questions fondamentales au cœur de la société de consommation : l'écologie sur « Qu'est-ce qu'on va laisser ? », la marchandisation de la culture sur « A Vendre », l'exploitation des travailleurs sur « Petites Mains », … Enhancer nous fait découvrir le monde avec le regard de jeunes ados qui ont grandi depuis les banlieues pavillonnaires de la région parisienne.
Un album d'une autre teinte
Musicalement, Enhancer représente toujours ce pont entre metal, hip hop, rock et electro. Une fusion désormais maitrisée qui penche plus vers le hip hop américain aux tendances pop que vers un rock burné. Sur Désobéir, on retrouve d'ailleurs de nombreux rappeurs aux côtés d'Enhancer : Soprano, La Fouine ou encore Dadou de KDD. On ressent une véritable évolution musicale dans les compositions du groupe, probablement le fait de ses nombreux changements de line-up ces deux dernières années. C'est d'ailleurs Davy, ex-guitariste de Pleymo, qui a rejoint la formation. On ressent particulièrement son apport (en collaboration avec l'ex-guitariste de Noisy Fate, Pierre Guimard) puisque les instrumentations sont moins binaires et répétitives. Davy se lâche sur quelques modestes soli, du jamais vu ! Il faut noter aussi que les arrangements sont particulièrement présents ; Enhancer a même eu recours a une chorale d'enfants sur « Qu'est-ce qu'on va laisser ? », titre émotionnellement fort.
Même si cet album aura son lot de réfractaires, s'exclamant qu'Enhancer est un groupe prétentieux, faux-cul et cynique, on ne pourra jamais reprocher à ce groupe de nombreuses choses : son pouvoir à lancer la polémique, sa sympathie et sa simplicité, son envie de faire bouger notre monde. Enhancer est un groupe résolument progressiste, ce quatrième album ne ressemble à aucun des autres. Aimez-le ou détestez-les, qu'importe !
.: Tracklisting :.
1. Intro
2. Debout (Feat Mr Toma)
3. Rock Game (feat La Fouine)
4. Petites Mains
5. Désobéissant
6. www.desobeir.net (Feat Xavier Renou)
7. Qu'est ce qu'on va laisser
8. 4444 (Feat Dadoo)
9. A vendre
10. Rêver sa vie (Feat Soprano)
11. 52 eme
12. SUPERficiel (Feat Eva, Léo)
13. Ma planète
14. Nos Regrets
15. Banlieue Pavillonnaire
16. Mr. (Feat Gérard Berliner)