Mark Lanegan – Blues Funeral

Au pays du rock, Mark Lanegan est le gardien des vibrations profondes. Sombre et exaltant, voici Blues Funeral, une réapparition du maître après une longue période d’ascétisme. Depuis 2004, et son album Bubblegum, Mark Lanegan n’avait que peu produit en son nom, se concentrant sur ses collaborations avec Queens of The Stone Age ou Isobel Campbell, pour lesquelles on ne le blâmera pas ! A l’orée de l’année 2011, Mark Lanegan nous avait fait signe en composant la B.O de RAGE, « Burning Jacob’s Ladder », titre précurseur d’un retour au rock qui tâche avant d’annoncer l’arrivée imminente d’un nouvel album.

Blues Funeral sonne comme une résurrection, imaginez le troupeau de fans autour de l’Etre renaissant à l’auréole. Ténébreux et sulfureux, Mark Lanegan le malicieux nous livre sa version toute personnelle de la mélancolie, en dressant le portrait d’un bouquet de fleurs posé sur la tombe de son amour. « The Gravedigger’s song » qui entame ce septième album est probablement la pièce maitresse de cet opus, débutant sur un roulement de batterie magnifique, une basse ronflante et un chanteur caverneux, buriné au cocktail whisky & cigarettes. Et si Mark Lanegan s’essaye au français sur ce titre, on n’y comprend rien, mais on admire l’effort !

« Tout est noir mon amour, tout est blanc, je t’aime mon amour, comme j’aime la nuit ». Un album de Mark Lanegan est toujours fait de contrastes, de cette étonnante renaissance de l’homme face à la fatalité d’une situation, comme en témoigne « Bleeding muddy water » et son univers crasseux qui met au premier plan la tristesse du piège. Cherchant dans les sons électro, nous rappelant sa collaboration de rêve au sein du projet Soulsavers (Ian Glover, Rich Machin, Mike Patton, … ), « Gray goes black » joue aussi sur les couleurs sonores clairement identifiées comme krautrock, pour mieux introduire une tension avec les titres suivants. Le spleen aidant, « St Louis Elegy » nous rappelle ces balades profondes, à la batterie synthétique et monotone, écrites avec Isobel Campbell, où la voix de la demoiselle venait porter le Monsieur vers plus de sensibilité.

Cependant, on appréciera surtout Blues Funeral pour son étonnant retour au rock qui tâche, au blues rehaussé d’une pédale de fuzz bien sentie, et à la simplicité d’une guitare criarde comme l’illustre l’enflammé « Riot in my house ». On ressent alors la patte de son ami Alain Johannes, maitre des multiples cordes, et génie de l’ombre avec Them Crooked Vultures et QOTSA, qui fait s’envoler les mélodies à un rythme effréné. On retrouve plus tard un second souffle rock dans « Quiver Syndrome », avec cet appel de la route emmené par une rythmique tendue, qui nous fait imaginer facilement l’horizon comme la promesse d’un avenir meilleur. Même sur ces titres authentiques, on ressent la composition numérique de Mark Lanegan, qui déclare n’avoir utilisé que peu d’instruments pour l’écriture de cet album, au travers de quelques arrangements synthétiques qui vieilliront peut-être mal. Pourtant, sans aucun conteste, Blues Funeral est un album sublime qui révèle ses perles dans le mélange des genres, « Ode to sad disco », « Tiny Grain of Truth » ou « Harbor View Hospital » pour leurs audaces électroniques, « Leviathan » et « Deep black vanishing train » pour leur tendre noirceur.

Vous en conviendrez, cet album nous a passionné, et pas simplement parce que la biographie de l’artiste est passionnante. Derrière la forte carrure de l’homme, se cache la sensibilité de l’artiste et cette étincelle de talent qui enflamme nos esprits. Le rock a encore de beaux jours devant lui…

.: Tracklist :.
01. The Gravedigger’s Song
02. Bleeding Muddy Water
03. Gray Goes Black
04. St Louis Elegy
05. Riot In My House
06. Ode To Sad Disco
07. Phantasmagoria Blues
08. Quiver Syndrome
09. Harborview Hospital
10. Leviathan
11. Deep Black Vanishing Train
12. Tiny Grain Of Truth