Après plusieurs années d’absence discographique, Sinsémilia, l’un des plus célèbres groupe de reggae français a annoncé son retour avec la sortie d’un sixième opus. Sinsémilia tourne depuis une vingtaine d’années sur les routes de France, le bus de Sinsé avait stoppé son chemin dans l’Ouest de l’hexagone pour En quête de sens. Après avoir assisté aux balances de Sinsémilia, Mike, le chanteur du groupe nous accueille sous les rayons de soleil nantais qui se propagent sur la salle de la Trocardière quelques heures avant de prendre place sur scène.
Hervé : En quête de sens est dans les bacs depuis janvier 2009, nouvel album de Sinsémilia très attendu par le public après plusieurs années d’absence. Quels sont les échos que le groupe a pu recevoir par la presse spécialisée ou par le public sur ce sixième opus de Sinsémilia ?
Mike : Écoute les premiers échos sont plutôt bons. Au bout de tant d’années ce n’est pas très important pour nous les échos de la presse spécialisée. Ce qui nous fait plaisir ce sont les échos du public. Les retours sont plutôt bons, je pense que c’est l’album le plus surprenant que l’on ai fait depuis longtemps donc c’est agréable. Nous avons eu beaucoup de plaisir à réaliser cet album et c’est probablement celui où nous avons pris le plus de plaisir.
Hervé : Nouvel album dit bien évidemment nouvelle tournée surtout que Sinsémilia a battit sa réputation par le biais de la scène. Comment est apprécié ce nouvel opus par l’auditoire?
Mike : Les concerts se passent très bien. Après dans les concerts il y a des morceaux de chaque album, on se promène dans notre répertoire. On ne joue pas que le dernier album, on joue vraiment de tout. On se fait plaisir en jouant de vieux morceaux que l’on n’avait pas joué depuis très longtemps sur scène, on en retravaille d’autres différemment… Pour le moment on en est à une quinzaine de dates et ça se passe très bien.
Hervé : Dernièrement Sinsémilia a joué à l’Olympia comment s’est passé cette date qui est généralement particulière pour les groupes qui se produisent sur cette scène ?
Mike : Il y a trois jours on était à l’Olympia. C’était génial comme à chaque fois sur Paris mais on a passé un très bon moment…
Hervé : Y avait-il des surprises pour cet Olympia ?
Mike : Pas plus car je n’aime pas le concept que c’est l’Olympia on doit en faire plus. Sinsémilia monte sur scène à l’Olympia comme on monte sur scène à Nantes où au fin fond d’un petit village. Il y a des gens qui paient pour nous voir et on se doit d’avoir le même respect, la même envie, la même énergie et le même plaisir quelque soit le lieu où l’on joue. C’était le même spectacle que tous les soirs même s’il est différent tous les soirs. Il n’y a pas de raisons particulières à en faire plus pour l’Olympia, j’aime autant les parisiens que les nantais, les bordelais…
Hervé : En abordant le sujet de la tournée, on pourra sûrement voir Sinsémilia programmé dans plusieurs festivals pour cet été 2009 ?
Mike : C’est en train de se caler, je vois quelques dates qui se rajoutent sur le planning. On ne sera pas sur les grands festivals prestigieux entre guillemets car on aime bien les festivals tranquilles. On devrait avoir un bel été bien agréable.{multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
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Hervé : Pour ceux qui n’ont pas encore écouté En quête de sens. Mike peux tu décrire l’atmosphère que Sinsémilia a voulu donner à cet opus ?
Mike : C’est très difficile de résumer un album. Je pense que c’est celui qui est le plus surprenant depuis Résistances comme je te l’ai dit tout à l’heure. C’est aussi un retour à du vrai reggae sur les ¾ de l’album comme nous n’avions pas fait depuis Première Récolte. C’est vraisemblablement le disque où nous avons eu le plus de plaisir pour le réaliser. Ça ne décrit pas l’album mais c’est très difficile de décrire cet album.
Hervé : On peut dire que c’est en quelque sorte un retour aux sources de Sinsémilia avec En quête de Sens ?
Mike : C’est un plaisir parce que l’on sortait d’un an de break. On est tous arrivé avec pleins d’idées, pleins d’envies et pleins de fraîcheurs. C’est aussi un plaisir car aujourd’hui le plaisir est le seul moteur que l’on veut bien écouter. Ça fait bientôt 20 ans que l’on est là et avec le temps tu apprends à prendre dur recul sur les choses. L’avis que va avoir telle ou telle personne sur l’album, au début je m’en inquiétais mais aujourd’hui je ne m’en intéresse pas. Ce qui est important c’est le regard que nous avons sur ce que l’on fait. On le dit dans un des morceaux de l’album « ma seule ambition pour demain, aux yeux des miens, être quelqu’un de bien ». Aujourd’hui j’ai plus besoin du regard de mes proches. Cette vision permet d’avoir un certain détachement. On a toujours essayer de faire notre musique sans trop se poser de questions pour autant a voir les réactions des autres qui peuvent me toucher. Sincèrement plus aujourd’hui, il y a tellement de choses plus importantes. Avec l’âge tu prends pas mal de recul car tout cela reste des petites chansons. On peut toujours prendre cela avec autant de cœur mais avec plus de détachement.
Hervé : Est ce que le processus d’écriture au sein du groupe a évolué au fil des années ?
Mike : Pas tant que cela. J’écris les textes et on part de cette base pour mettre ces mots en musique. La musique on essaie ensemble, chacun amène des idées…Le processus n’a pas tant que cela évolué par contre on progresse musicalement et individuellement nous permettant d’aller plus loin dans notre relation musicale les uns aux autres. On a pris plus de temps sur cet album pour peaufiner des arrangements, des petits sons… Et là encore c’est avec du plaisir. Lorsque tu prends du plaisir à faire quelque chose, tu as vraiment envie d’aller au bout des choses.
Hervé : Est ce que les individualités, projets personnels en dehors de Sinsémilia ont joué sur l’écriture ou le travail de groupe pour cet album ?
Mike : Je ne pense pas directement. Tu apprends toujours de ce que tu vis donc forcément il doit y avoir des choses qui indirectement rejaillissent dans Sinsémilia. Mais je ne vois pas de grosses influences. Par contre, plus on avance et les êtres humains que nous sommes, murissent, s’enrichissent… Petit à petit, on l’inclut dans notre musique.
Hervé : Sinsémilia est un groupe de scène. Ce que je vais dire n’est pas péjoratif mais c’était un groupe peu connu du grand public avant l’arrivée de Tout le bonheur du monde sauf pour le public qui suit votre parcours depuis vos débuts. C’est vraiment avec « Tout le bonheur du monde », single de Debout les Yeux Ouverts que Sinsémilia a été mis sur le devant de la scène. Est ce que ce bonheur médiatique a pu être aussi un revers sur le plan de la création en apportant une certaine pression pour la création de ce nouvel album ?
Mike : Absolument pas. Tout le monde essaie de savoir comment nous avons géré le succès de Tout le bonheur du monde. On n’avait rien à gérer. On était en tournée et pendant que le morceau était diffusé sur les radios on faisait ce que l’on fait depuis toujours, c’est à dire des concerts. Ce succès n’a rien changé entre nous. Peut être que si ce succès te tombe dessus lorsque tu as 20 ans peut être que c’est négatif. Nous ne sommes pas passés de « On ne vend pas beaucoup de disques à on en vend des tonnes ». On était disque d’or sur presque tous nos albums. Il n’y a pas eu de changements majeurs dans nos vies. On est suffisamment lucide pour savoir que le succès ne dure qu’un temps, on a pas mal de recul pour ne pas à devoir gérer cette pression.
Hervé : Pourquoi avoir choisi « Le retour des Cow-boy » comme single de ce nouvel opus de Sinsémilia ?
Mike : En toute franchise c’est un choix relatif. Si je devais faire un vrai choix, il y a un titre que l’on aurait aimé diffuser à la radio c’est « J’ai honte pour ma France » mais on sait très bien que les radios ne le diffuseront pas. C’est un choix de tout ce qu’il y a de plus relatif. Après c’est le travail d’une maison de disque de se débrouiller avec les radios etc… Toutes les chansons que l’on met dans un album on les aime sinon on ne les mettrait pas. A partir de là, ils peuvent mettre ce qu’ils veulent en radio tant que c’est des titres de l’album. Si l’on avait le choix concret, on aurait choisi « J’ai honte pour ma France » sur le précédent album, « Bienvenu en Chiraquie » et sure Résistances, « La Flamme ». On sait que les radios ne passeront pas ces titres donc nous laissons la maison de disque s’occuper de cette tache.
Hervé : Je voudrais venir sur le choix du titre de cet album En quête de sens. On peut établir un lien réel entre le choix du titre de l’album et sa pochette.
Mike : Il y a un lien. Nous allons dans un ordre précis. On enregistre les morceaux, on fait l’album. En regardant les morceaux on choisit un titre et à partir de ce titre on réalise une pochette…
Hervé : Je trouve vraiment qu’il y a un lien car on peut voir un panneau directionnel où le titre de l’album y figure.
Mike : Il y a plusieurs sens mais si l’on choisit en quête de sens, il y a la notion de sens, de priorité, de réflexion liée aux changements qui est présente sur presque tous les titres de l’album mais d’une façon différente. Tu as une réflexion d’individus, à notre niveau, humainement sur les questions que l’on peut se poser sur nos vies, les priorités que l’on doit se donner, notre rapport au temps. C’est l’individu qui se pose des questions. On a en gros 35, 36, 37 ans, c’est des questions que l’on se pose à l’heure actuelle. Après tu as le regard citoyen sur certains morceaux et là aussi il y a une recherche de sens où un refus de certains sens que l’on comprend. C’est soit personnel, soit citoyen mais la notion de sens est présent sur la totalité de l’album. Après tu peux le voir de la même façon avec la pochette en imaginant que c’est Sinsé qui est dans un bus où il y a la notion de quête de sens sur cette autoroute. Tu peux aussi voir une société et comme tu vois elle roule à contresens sur la pochette.
Hervé : Depuis vos débuts Sinsémilia à la bonne réputation d’être considéré comme un groupe engagé. Est ce vital depuis que vous avez une certaine notoriété de faire passer un message et de faire comprendre à votre public l’importance d’être engagé ?
Mike : On n’est pas un groupe engagé. Définitivement je refuse cette étiquette là. Cette étiquette nous l’avons jamais voulu, c’est les médias qui collent cette étiquette. J’ai trop de respect sur l’engagement, ce n’est pas des petites chansons qui peuvent faire quelque chose. Ce sont les gens sur le terrain , les bénévoles qui s’investissent…je les admire. On a trop de respect pour ces gens là pour mériter une étiquette qui nous met en comparaison avec ce qu’ils font tous les jours. Ce n’est pas pareil pour nous, on fait des chansons et on gagne nos vies avec ces chansons. J’ai trop de respect pour les militants sur le terrain pour accepter une étiquette qui est la leur. On exprime des choses, on est des citoyens, on a un micro et on l’utilise pour exprimer des choses qui nous touchent mais l’engagement c’est bien plus que cela. Je n’ai pas la prétention ni d’apporter la lumière, ni d’expliquer quelque chose à un public… J’exprime des choses qui sont nos opinions, nos valeurs. Les gens s’y retrouvent ou non. Je n’ai pas à convaincre qui que ce soit. J’ai juste à être sincère et exprimer ce qui vient de Sinsémilia.
Hervé : Est ce que le fait d’être sur une major vous a donné des difficultés pour vous sentir libre artistiquement en n’ayant pas les mains liées ?
Mike : Nous sommes entièrement libres car nous sommes en autoproduction qui est en licence chez une major.
Hervé : Sinsémilia est un peu comme Tryo qui est chez Sony mais qui a la main mise sur leur carrière ?
Mike : Oui, ils sont signés dans la même major que nous. On est totalement libre sur nos productions.
Hervé : Est ce que tu peux nous parler des projets parallèles à Sinsémilia ? Mike, tu as monté une boite de production sous le nom d’Echo Prod, peux tu nous présenter ce projet?
Mike : C’est une boite de production que j’ai fondé il y a quatre ans qui s’occupe de Riké quand il est en tourné solo, de Pep’s en ce moment…
Hervé : Pep’s qui cartonne pas mal en ce moment !
Mike : On ne se plaint pas (Rires !) On s’occupe aussi du management de Sinsémilia. C’est notre structure en interne pour gérer les artistes qui tournent autour de Sinsé et les artistes que l’on signe parallèlement sur la boite de prod. La grosse priorité c’est Sinsémilia et dans ce cas l’activité d’Echo Prod c’est de gérer tout ce qui tourne autour de Sinsémilia. Il s’avère qu’en même temps il y a le carton de Pep’s donc nous devons gérer cela. Pendant tout un temps, la priorité c’est que l’on ne doit pas se disperser en projets parallèle. On ne va rien faire de nouveau dans la boite de production car pendant au moins un an Sinsé est en tournée donc aucun projets parallèles pendant ce laps de temps
Hervé : Qu’est ce qui t’a poussé à fonder Echo Prod ?
Mike : C’est la continuité de ce que l’on fait avec Sinsémilia. On s’est toujours autoproduit, autogéré… Je le faisais déjà avec notre ancien manager. On a fondé cette boite pour continuer ce que l’on faisait depuis toujours. On a formalisé cela en montant Echo Prod.
Hervé : Sur En quête de sens on constate la présence du morceau le dernier concert qui est un titre assez poignant. Lors de sa tournée solo, Riké chantait cette chanson lors de ses concerts. Ce titre doit vraiment avoir un sens pour le groupe?
Mike : A la base, elle était écrite pour Sinsémilia. Je l’ai écrite dans un bus, de toute façon ça se voit à chaque ligne que cette chanson a été écrite pour Sinsémilia. Au moment où l’on a fait l’album de Riké, on ne la met pas sur l’album mais c’était classe pour Riké de jouer ce titre sur scène. Ca prenait un autre sens lorsque c’était Riké qui s’adressait à Sinsémilia lorsqu’il jouait en solo. Ca donne un joli parcours à cette chanson.
Hervé : Si tu devais faire un bilan des vingt années passés au sein de la famille Sinsémilia.
Mike : Je suis extrêmement fier, bien plus que des disques d’or… je suis fier d’être au bout de vingt ans de voir que l’on est toujours ensemble avec autant de plaisir. Ceux qui étaient au début sont là. En 20 ans nous avons eu deux changements sur onze personnes…
Hervé : C’est rare que des groupes au bout de 20 ans passés ensemble restent aussi unis.
Mike : Si je devais faire un bilan c’est la chose que je dirais, c’est l’amitié. C’est la chose dont on est le plus fier. J’ai passé plus de temps avec eux qu’avec ma famille (Rires !)