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Report Dawn Brothers + Dewolff au Petit Bain (Paris) le 17 février 2020.

« Et aux Pays Bas, les années 70 se réveillèrent…. ». Voilà le « il était une fois » introductif qui aurait pu s’écrire pour ouvrir la soirée de ce lundi 17 Février au Petit Bain, à Paris. Dewolff en tête d’affiche et les Dawn Brothers pour faire la première partie. Deux groupes hollandais, qui ont leur petit succès là-bas, et qui s’acharnent à réveiller les seventies au pays de la Tulipe. Deux groupes un peu anachroniques, nés à la mauvaise époque, mais pour ma part à la bonne : celle où je peux la voir au premier rang dans des petites salles bien cools. Les sales salles. Ou les salles sales. Enfin les seules qui vaillent bien le nom et la musique qu’on y joue.

Pourtant, faut bien être honnête, j’avais un peu du mal avec Dewolff au début. J’avais presque envie d’écrire que c’était une jolie introduction au Stoner : du Stoner pour enfant ou pour playmobil quoi… Un petit revival de psyché et de blues bien électrique qui permettrait aux oreilles innocentes de passer rapidement à des choses plus modernes après s’être marré dans les souvenirs d’époques révolues. Une opinion un peu rapide et crétine : je m’en excuse. Toujours cette espèce de prime à la modernité propre aux puristes et aux mélomanes exigeants : pourquoi écouter la resucée de ce qui a déjà été joué ? Posez la galette de Jefferson Airplane ou d’Hendrix sur la platine et ne vous embêtez pas avec des nostalgiques bulbeux et hollandais. Ah putain le con. C’est que Hendrix est tout ce qu’il y a de plus mort, alors que les Dewolff sont bien vivants, là devant nous. Et beaux avec ça. Putain de Hollandais.

Une manière de rappeler que la musique ne s’arrête jamais. Le Jazz vit encore. Le Blues aussi. Aucun style n’a remplacé le précédent, quand un nouveau son surgit de l’ancien et qu’il occupe brièvement le devant de la scène, en coulisse les maîtres enseignent aux disciples sous les arbres à guitares, et ces dernières continuent à faire vivre la légende. Celle du rock en l’occurrence. La plus belle de toute. La dernière aventure du monde civilisé pour reprendre l’autre. La dernière tentative des crétins à petits culs d’échapper à la vieillesse. Y’a que le rock comme anti âge, pour cause : c’est le seul genre qui n’a jamais pris une ride.

Mais entrons dans le dur, dans le fuzz du son.  Le concert commence avec les Dawn Brothers. Grosse claque. Très franchement je me demande si la première partie n’a pas été meilleure que la seconde. Le chanteur et bassiste, barbu à souhait, sait se mettre en retrait pour laisser le batteur et le guitariste l’accompagner dans les harmonies vocales. Le batteur a une frappe au millimètre. Il y a dans les Dawn Brothers quelque chose des Beatles, version fin de carrière, genre Abbey Road. Plus précisément, la présence forte d’un clavier et les harmoniques font penser à The Band. Ils sont dans l’ambiance The Last Waltz ces frères là : chemise et boots, la barbe bien taillée, le son bien harmonisé. Et bordel ça sonne. Terriblement juste. Juste. Juste : Waow. Comment des hollandais un brin poilus peuvent soudainement nous faire revenir dans la Californie des années 70 ? Ils ont tout des hippies, des vrais : ceux qui ont une tête de gendre idéal et vont à l’université pour petit blanc en foutant le bordel pour les droits des noirs et la guerre au Vietnam. Je me suis pris 50 ans de chronologie dans la tête à coup de manche de guitare. Eux même avait l’air étonnés de la tenue du concert : ils se retrouvaient pour la date après un moment sans jouer, sans album, leurs sourires, leurs échanges, leurs rires… A une époque où les setlists se trouvent d’avance sur le net cela fait tellement du bien. Merci les Dawn. Je ne louperai plus une seule de vos dates, si le voyage dans le temps était un concert je l’ai découvert avec vous.

Et je ne suis pas le seul à y croire. A ma gauche, une apprentie Brigitte Bardot se trémousse : cuissardes blanches en vinyl, tunique à fleurs, maquillage bleu.  Je suis tombé dans le panneau qu’elle indiquait avec son sourire : direction une autre nuit. A ma droite c’était la version swinging London qui regardait le concert façon british : ça ne bouge pas, ça ne dit rien, mais ça approuve très fort. Une petite nana en boots, des yeux gris dans le rouge des spots, passant derrière sa frange. Même ma mère au premier rang vient de rajeunir de 30 ans.

Voilà Dewolff qui monte sur scène. Costard blanc mal taillé, futte en pat’deph, sourire aux lèvres, guitare au cou. 3, 4 et ça démarre. Le petit chanteur de Dewolff à ce je ne sais quoi de la rock star diablotine, petit, alors qu’il a de grands talons sur ses bottes en croco, la dent un peu de travers, les cheveux en bordel : ce mec joue avec lui-même et les autres. Mais il joue surtout très bien de la guitare. Les morceaux sont longs, pour laisser de la place aux excellents musiciens que sont les Dewolff. Franchement : le son défonce. Ça sonne.  Le guitariste prend le temps de changer de guitare à chaque fois, de bouger un potard, un micro… La collectionnite du mec est frappante. Si ça a un manche, il faut qu’il l’ait. Et le son doit suivre. Que des Gibson bien sûr, le son est plus rock. Ce souci du détail – d’ailleurs l’orgue était magique, c’était pas que l’instrument, mais toute l’église qu’il y avait dans les touches de ce Piano – est paradoxal quand on sait que leur dernier album a été enregistré sur un ZOOM dégeulasse à l’arrière d’un camion qui ne l’était pas moins. Dewolff joue de la musique, ils se foutent des refrains, des singles, de jouer leurs tubes. Ils jouent. Ils font tout ça : mais en mieux. Ce Blood Meridian. Le meilleur morceau du dernier album… Bam. 15 minutes de morceau. De bravoure. Tant mieux. Sur l’album les 3 parties du morceau sont séparées : là ils nous ont assommé toutes les notes d’une traite. Brava, Baba, bravissimo : j’en perds mes mots. Et on revient sur le thème de la soirée : l’autre temps sur le meilleur tempo en 4×4. Aujourd’hui il faut du single, des morceaux de 3 minutes maximum, que ça sonne facile… Aujourd’hui Stairway to Heaven ne serait pas un hit. Il n’aurait tout simplement jamais été produit. DeWolff s’en foutent. Le mec monte les deux pieds sur le piano, et il y va sur l’escalier paradisiaque, rien à foutre, il veut faire son solo de 15 minutes : il le fait. Et ça passe ? Mais plus que ça : ça déglingue.

Du coup voilà : le constat est sans appel. Les années 70 sont en Hollande. Le rock de Londres est en Hollande. Je ne sais pas si c’est un coup du hasard, du destin, du Brexit, ou simplement un coup de rein et une nouvelle généalogie musicale : et à vrai dire je m’en fous. Je fais mes valises et je me casse. Ça sonne mieux au pays des tulipes.

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