Cela fait maintenant deux ans que Klone nous avait giflé avec son Black Days, plaçant le groupe dans les strates supérieures du Métal progressif français, voire européen. Comment faire mieux que cet album réussi de bout en bout qui conciliait atmosphères, mélodies catchy et rock brut avec une telle maestria ? Klone a choisi la voie d’un son encore plus atmosphérique et psychédélique, entrevu avec l’EP The Eye Of The Needle sorti l’année dernière, et qui s’affirme totalement sur ce nouvel opus, The Dreamer’s Hideaway, paroxysme d’un univers musical de plus en plus abouti. Dans l’intérêt de l’auditeur ?
Pour ceux qui ne se sont pas intéressés au Métal prog français ces dernières années, petit rappel : Klone est un groupe de Poitiers, dont le guitariste Guillaume Bernard est à l’origine de la création de la Klonosphère, un collectif très actif réunissant de groupes de toutes les branches du Métal comme Trepalium, Hacride, ou Hypno5e pour un impact promo plus large. Si Klone se fait un nom avec All Seeing Eye en 2008, c’est le génial Black Days qui les fera jouer dans une autre catégorie, réunissant les excellent titres Rock/Métal progressifs « Give Up The Rest », « Immaculate Desire » et la reprise très réussie de Björk, « Army Of Me ». Voilà, le décor est planté : soit Klone fait mieux ou différent avec ce The Dreamer’s Hideaway, soit l’enthousiasme pourrait laisser place aux critiques…
Donc les poitevins ont fait différent ; quand on retenait facilement les refrains de Black Days, on se fait absorber par un univers mélodique englobant et atmosphérique où le chant se fait litanie, voire prière, aux frontières du psychédélisme. C’est toute la différence avec le précédent opus : Klone appuie certains aspects de son univers musical, au demeurant encore plus personnel et identifiable : guitares en arrière-plan, chant restant souvent dans les mêmes gammes de mélodies légèrement saturées, tempos relativement lents, quelques notes de saxo halluciné, et une pointe d’arrangements électroniques… Et on évolue toujours dans un monde très proche de celui de Tool, voire carrément dans le leur («Siren’s Song»), les riffs de guitare qu’on laisse sonner en drop D ainsi que le chant à la Maynard James Keenan étant trop éloquents pour ne pas faire le rapprochement. Ce n’est de toute façon pas un reproche mais un fait incontestable, que Klone assume sans souci et avec brio.
Plus gênantes seraient ces longueurs sur The Dreamer’s Hideaway, ces moments qu’on prolonge sans effet positif sur l’auditeur sauf celui de le lasser un peu trop vite (la fin de «Rocket Smoke» qui traîne en longueur) et de donner la fameuse impression de «Déjà entendu», notamment sur certaines lignes de chant. Ces mêmes lignes de chant qui pourraient parfois s’interrompre pour laisser plus de place à l’instrumental puissant par ailleurs, notamment des lignes de basse immenses et groovy déposées ci et là au travers de l’album.
Klone nous pose des problèmes de riches car le niveau atteint par les poitevins dans le domaine du Métal/Rock progressif est quand même impressionnant, tant au niveau technique qu’émotionnel ; il est révélateur d’un Métal français en effervescence, même dans ses couches moins populaires parmi lesquelles le Progressif. Il y a quelques très bonnes directions artistiques (l’utilisation du saxo, les riffs de guitare atmosphériques, la qualité du chant semi-saturé) et aussi d’excellents titres (« Into The Void », «Siren’s Song», «The Worst Is Over») qui font de The Dreamer’s Hideaway un album haut de gamme, qui n’aurait, à notre humble avis, que gagné encore plus en valeur si les refrains étaient aussi accrocheurs que sur Black Days ; mais là n’était pas l’intention de Klone, et leur choix reste éminemment respectable.
.: Tracklist :.
1. Rocket Smoke
2. The Dreamer’s Hideaway
3. Into The Void
4. Siren’s Song
5. Corridors
6. Rising
7. Stratum
8. Walking On Clouds
9. The Worst Is Over
10. A Finger Snaps
11. At The End Of The Bridge.