Le groupe des deux musiciens de System Of A Down, John Dolmayan et Daron Malakian, sort son premier album le 29 Juillet prochain et c’est lors de son passage à Paris que le batteur de Scars On Broadway a accepté notre invitation. La tournée européenne qui dure jusqu’à fin août reçoit pour l’instant un très bon accueil.C’est donc dans une atmosphère détendue que John Dolmayan a répondu aux questions de Vacarm.net.
L’album de Scars On Broadway sera composé de 15 chansons. Pouvez-vous décrire à nos lecteurs votre album et pouvez-vous nous donner la meilleure expression pour qualifier celui-ci ?
La plupart des gens qui écouteront SOB connaissent déjà System Of A Down. Ils vont donc avoir quelques surprises concernant la trame des chansons. La plus grosse différence est que Scars On Broadway est plus orienté rock. La mélodie est plus présente et les standards sont mieux respectés qu’avec SOAD. Les influences vont des Kinks aux Stones en passant par des sonorités électro. C’est définitivement moins métal que ce qu’on a pu faire avec System.
Comment s’est formé Scars On Broadway ?
Daron a commencé ce projet il y a 3 ans, du moins conceptuellement, avant que l’on prenne ce hiatus avec System. Nous avons travaillé avec de nombreuses personnes pendant cette pause jusqu’à ce que l’on arrive à ce que nous sommes actuellement. J’avais proposé à Serj (Tankian), Shavo (Odadjian) et Daron (Malakian) que s’ils avaient besoin d’un batteur ou même d’un conseil pour l’un de leur projet, je serais prêt à le faire volontiers. Comme vous le savez, j’ai joué sur quelques chansons de l’album de Serj (Elect The Dead) et ensuite Daron m’a appelé. Il aurait pu travailler avec des batteurs exceptionnels mais pour sa musique, ça ne collait pas. Je n’écris pas les morceaux, j’écris les parties de batterie. Pour Daron, je suis comme un gant qui serait à la taille parfaite pour sa main. Mais aussi, lorsque tu as un musicien dans ton groupe et que tu ne le connais pas vraiment, tu ne sais pas comment il va réagir quand le groupe aura du succès. On a déjà eu du succès ensemble avec System donc on ne va pas changer si SOB devient quelque chose de grand ! Musicalement, ça a été facile pour moi de comprendre la musique de Daron parce que j’adore jouer des chansons rock mais mélodiques à la fois. Les Beatles sont l’un de mes groupes préférés par exemple.
Quelle a été l’approche pour cet album ?
L’approche pour cet album a été assez simple en fait. Daron a écrit toutes les paroles et guitares et les a produites. Les chansons étaient donc complètes à environ 95%. Ensuite, il m’a apporté son travail, j’ai commencé à écrire les parties de batterie et je lui donnais quelques conseils ça et là… Mon apport a vraiment été minime.
Que s’est-il passé entre Casey Chaos (Amen), Zach Hill et Daron ?
Cela aurait été difficile d’avoir Zach Hill avec moi dans le groupe. C’est possible mais les morceaux que nous faisons ne nécessitent pas deux batteurs. Parfois des musiciens exceptionnels n’arrivent pas à travailler ensemble parce que ce que quand tu composes, c’est pour la chanson, pas pour celui qui la joue ! Donc, c’est celui qui écrit le titre qui va décider de qui va le jouer. Par exemple, les trois autres musiciens que l’on a avec nous sur la tournée, il ne faut pas seulement qu’ils soient bons mais il faut aussi qu’on devienne pote avec eux.
D’ailleurs, qui sont ces trois musiciens qui vous accompagnent sur la tournée?
Alors, il y a Danny Shamoun (clavier, percussion), Franky Perez (guitare) et Dominic Cifarelli (basse). Ce sont des gars supers sympas et ce qui est bien, c’est qu’aucun d’eux n’a connu de succès aussi important qu’avec System par exemple. Ca leur donne de la hargne et ce sentiment est vraiment important. Je pense qu’on aurait pu réunir un « supergroupe » si on avait voulu… Un peut comme ce qu’a fait Rage Against The Machine avec Audioslave. Mais comme tu peux le voir, parfois ça ne fonctionne pas si bien… Avec les trois gars que l’on a recruté, on a affaire à des personnes qui ont aussi faim que nous et c’est vraiment primordial. {multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Quel est votre chanson favorite de Scars On Broadway ?
Si je devais choisir un seul morceau, ce serait « Babylon ». C’est le premier titre que Daron m’a proposé de travailler et il n’a pas une trame classique comme couplet/refrain/couplet/refrain. Il comporte quatre parties différentes et l’une vient après l’autre du coup ça en fait une chanson originale. De plus, c’est une composition vraiment portée sur l’émotion et la mélodie est superbe.
Justement, la structure des la plupart des chansons est assez classique…
Ouais, c’est plus dans une veine rock que métal et c’est moins « schizophrénique » par rapport à ce que l’on faisait avec SOAD. Il n’y a pas dix styles différents dans un seul morceau mais il y en a assez sur l’album pour que ça soit intéressant.
Est-ce que l’album est plus calibré pour la radio finalement ?
Non, ce n’était pas le but et l’album n’a pas été réalisé en fonction de ça. Je dirais que c’est l’influence de Daron, par rapport à ce qu’il écoute depuis ces trois dernières années qui a fait ce en quoi ressemblent ces chansons. Il a beaucoup réécouté des groupes que tout le monde connait : les Beatles, Devo, Les Kinks, d’autres groupes des années 80 qui étaient plutôt gothique, New Wave et même des groupes atmosphériques. En fait, dès que tu as la mélodie, c’est beaucoup plus facile à digérer et c’est surement pour ça que tu dis que les morceaux sont plutôt calibré radio. Et je suis d’accord avec toi ! Mais l’album n’a pas été fait dans cet objectif, c’est juste une coïncidence.
Daron a déclaré dans la presse : « John joue mieux que jamais ». Qu’est ce que vous en pensez ?
Il se doit de dire ça, je joue dans son groupe ! (rires). C’est un énorme compliment venant de sa part.
Est-ce que vous sentez que vous avez progressé depuis System Of A Down ?
Je pense que tu dois toujours continuer à changer. Il faut se diversifier et se concentrer sur la musique que tu joues pour qu’elle sonne différemment. J’essaie du mieux que je peux d’insérer différent beat dans un morceau pour les rendre intéressant mais sans m’en éloigner. Pour la technique, je n’ai rien essayé de nouveau par rapport à System Of A Down. Pour moi, c’est plutôt écouter différentes musique et être inspiré par elles. Croyez-le ou non, j’essaie d’écouter du classique par exemple. Il y a plusieurs mouvements qui m’ont vraiment influencé pour mon jeu dans ce style. {multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Scars On Broadway et System Of A Down ont un engagement politique très fort. Est-ce que vous prenez part à ces engagements ?
Non, déjà, je ne pense pas être assez intelligent pour dire aux gens quoi penser. Et je ne pense pas qu’être un artiste me donne le droit de dire aux autres comment ils doivent vivre leur vie. Ce que l’on fait avec Scars, c’est plus un « commentaire » sur comment on voit les choses… Et on laisse au public son libre arbitre. Je pense que les personnes qui écoutent un artiste ou un acteur, juste parce qu’il est engagé politiquement dans une cause, vont dans la mauvaise direction. Ces personnes ne sont pas les plus brillantes du monde. Par exemple, des hommes comme Gandhi, ce sont ceux-là que tu devrais écouter et puiser ton inspiration politique. Gandhi était désintéressé ; En tant qu’artiste, nous faisons de l’art. Et l’art est égoïste. Ce qui est bien avec l’art, c’est que tout le monde peut l’apprécier mais au départ tu le fais pour toi-même. Je pense que tu dois réaliser tout ce dont tu crois. Tu vois, même si je te donne mon opinion sur quelque chose… C’est juste mon opinion ! Ce que j’aimerai aussi entendre la tienne et que toi aussi tu demandes à d’autres personnes leur opinion pour avoir une meilleur perspective sur ce que tu penses. Par exemple, si quatre personnes vont voir la tour Eiffel et qu’ils s’assoient à quatre endroits différents, chacun n’aura pas la même vision de la tour, et pourtant c’est le même monument que les quatre personnes regardent ! Et aucun d’eux ne peut être remis en cause par rapport à ce qu’il croit être la tour Eiffel. C’est de toutes ces différences regroupées que tu obtiens la vérité. Le problème avec les politiciens, c’est qu’ils voient soit tout noir soit tout blanc alors qu’il y a beaucoup de nuances de gris dans la vie. La vie n’est jamais noire ou blanche.
Passons à un autre registre : Vous allez jouer à Rock en Seine en août et Serj Tankian aussi. Allez-vous jouer avec lui ?
Ce n’est pas la première fois que nous nous retrouvons sur un festival ; A Coachella, Serj jouait le jour avant nous. Nous sommes allés à son concert et il est venu au notre. Nous n’avons pas envisagé de jouer avec lui à Rock en Seine car c’est important que l’on se concentre sur Scars On Broadway.
Allez-vous quand même le rencontrer ?
Bien sur ! Serj est mon ami ! Le problème avec les festivals en Europe c’est qu’on enchaîne les dates chaque jour donc ce n’est pas possible d’avoir un break entre les concerts pour pouvoir se reposer ou passer du temps avec nos amis. J’espère quand même le voir à cette date.
Est-ce que vous jouez des titres de System Of A Down avec Scars ?
Non, on veut s’assurer que SOB ait son propre univers et le développer. Je ne dis pas qu’on ne va jamais en jouer mais actuellement, on veut vraiment se concentrer sur Scars. Peut-être qu’on fera des reprises d’autres groupes aussi plus tard…
Daron a déclaré qu’il ne reviendrait pas vers System Of A Down avant dix ans.
Non ! Il a dit : « On ne sait jamais, ça peut-être l’année prochaine ou dans dix ans »
Il a quand même précisé que ça serait assez long…
Je pense qu’on va faire encore au moins un album pour Scars On Broadway avant que l’on repense à faire quelque chose avec System. Je crois qu’en disant ça, Daron a voulu que les gens n’anticipent pas le retour de SOAD et que la lumière soit sur Scars pendant cette période. Tant que les membres de System sont vivants, System es vivant. {multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
En concert, quelles réactions de vos fans vous touchent ?
Quand on est sur la scène, on ressent toute l’énergie que dégage le public. Que ce soit 100 personnes ou 4 000, cette énergie vous atteint toujours. Bien sur, on est très chanceux car le public devient dingue quand nous jouons. C’est bien sur impossible de ne pas être touché par eux et du coup, plus les fans donnent d’eux-mêmes, plus nous leur donnons de nous-mêmes. Et je pense vraiment que nous avons une très bonne interaction avec nos admirateurs. Que ce soit avec Scars ou System, chacun de nous passe du temps avec eux à signer des autographes, leur parler etc. Pour être honnête avec vous, après 11 ans à être sur la route, je n’ai jamais connu une seule mauvaise expérience avec les fans. Ils ont toujours été aussi respectueux que j’ai pu l’être.
Vous avez toujours été comme cela avec vos fans ?
Je vais t’expliquer quelle est ma vision des choses. Quand tu as des fans, pour eux c’est une expérience incroyable que de me rencontrer parce qu’ils adorent nos albums, c’est un mystère pour eux que de rencontrer les artistes qui jouent cette musique. Ils ne te regardent pas comme une personne normale. Ils savent que tu es humain mais c’est beaucoup plus que ça, c’est carrément quelque chose de spécial. Je vois peut-être 100 fans par semaine mais eux, c’est surement la seule fois dans leur vie qu’ils pourront me rencontrer ! Donc tu dois les respecter et les considérer comme unique de ton côté. J’ai une anecdote à ce sujet d’ailleurs. Quand j’étais gamin (9-10 ans), il y avait une série américaine appelée three’s company. Un fois, je suis allé à l’aéroport avec ma famille et l’une des stars de la sitcom était là. Je me disais « Oh mon dieu, c’est incroyable !! », j’étais super excité de le voir en vrai ! Alors je suis allé lui demander un autographe et il ma regardé en me disant : « Pas maintenant gamin ». Je me suis dit : « Quel enfoiré ! ». Et depuis ce jour, je pense que c’est un enfoiré ! Aujourd’hui je me souviens toujours de cette histoire et je ne voudrais jamais qu’un fan soit aussi déçu que ça. Si je ne les avais pas, je n’aurais pas pu m’acheter une maison, me nourrir etc. Et grâce à eux, toutes ces choses sont possibles pour moi. Donc, prendre une ou deux minutes avec un admirateur pour lui serrer la main, partager quelques mots et ensuite partir… Ca ne demande pas autant d’efforts que ça.
Quelle est la réaction des fans de SOAD par rapport aux compositions de Scars On Broadway ?
C’est génial, les gens sont très respectueux, ils n’ont pas demandé de chansons de System mais même si ils le feront, ça ne me dérange pas ; je suis toujours un membre de SOAD ! Pour anecdote, à Berlin et Cologne, la foule connaissait déjà toutes les paroles des morceaux de Scars alors que l’album n’est pas encore sorti ! Ils ont du trouver ça sur Youtube avec les shows qu’on a fait à L.A … Nos fans sont super cool quoi.
Qu’est-ce que vous attendez du concert de demain ? (La Maroquinerie)
J’espère de la folie ! Que l’on passe un bon moment avec le public et qu’il prenne autant son pied que nous le prendrons.
Est-ce vrai que vous avez la plus grosse collection de BD du monde ?
Je pense que oui ! J’en ai près de 15 millions !
Vous les avez toutes lues ?
Bien sur que non ! (rires) Mais ce n’est pas 15 millions de livres différents, c’est par exemple 10 000 exemplaires d’un ouvrage !
Quand a débuté votre passion pour les BD ?
Je collectionne des comics depuis l’âge de 11 ans et même avant System je vendais déjà des BD. Et j’adore aller aux conventions sur la bande dessinée. Je sais qu’il y a un Festival très important en France, vous savez où et quand cela se passe ?
Oui, c’est le festival d’Angoulême qui se déroule début février je crois…
Je pense que je vais aller y faire un tour si j’ai le temps, ça a l’air cool…
Votre site de vente en ligne www.torpedocomis.com fonctionne-t-il bien ?
C’est encore le début donc je pense que ça va mettre un peu de temps à se développer…
Quelle est votre BD préférée et pourquoi?
Les quatre fantastiques, je les adore depuis que je suis enfant, j’aime le fait que ce soit une équipe (un peu comme un groupe de musique finalement !) et que en tant qu’héros, ils n’aident pas les gens pour l’argent mais parce que c’est leur destinée.
Et lequel des 4 fantastiques êtes-vous ?
Aucun, je suis le cinquième ! (rires)
Finissons sur une note un peu plus légère : Pensez-vous que Daron devrait enlever ses lunettes parfois et se couper sa barbe ?
Non, j’adore sa grosse barbe ! C’est cool ! Tout ce qu’il fait est cool de toute façon. Tu vois, quand j’avais les cheveux longs, les gens se plaignaient de mon style et depuis que je les ai rasés, ils se plaignent de mes cheveux courts ! Tu dois faire ce que tu veux et ne pas prêter attention aux remarques des autres.
Merci à John Dolmayan pour cette interview et Merci à Roadrunner pour l’avoir organisée.
Entretien réalisé par Cap’tain Planet et SiN.
Crédit photos : Cap’tain Planet et Robert Gil.