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Report Cadillac à l’Elysée Montmartre le 7 novembre 2019

Il y a des concerts difficiles à décrire. Le dernier live de Cadillac à l’Elysée Montmartre fait partie de ceux là. Soyons clair tout de suite : cette difficulté ne tient pas à la qualité du show ! Celui de Cadillac est unique, incroyable, réjouissant, fantastique… Bref : je n’aurais pas assez de qualificatifs pour dire à quel point j’ai aimé cette soirée. C’est un concert différent, qui permet de retrouver ce sentiment « merde il se passe un truc là », que nous avons finalement trop peu pendant les lives… Et merde : ça ne ressemble à rien de connu. Rien que pour cela : ça vaut le détour. Non, le véritable problème c’est comment décrire ce concert ? Comment faire passer à l’écrit un truc pareil ? Ou tout simplement expliquer qu’un concert où tout le public crie d’un coup JE SUIS DEBILE est un des meilleurs moments de live que j’ai vécu.

D’ailleurs, rien à voir, mais vous apprendrez que crier « JE SUIS DEBILE » est nettement moins gênant quand toute une salle le fait en même temps que vous : bon à savoir. Et voilà je suis déjà perdu dans ma chronique. Heureusement qu’on est tous exceptionul.

Du coup pour résoudre ce problème je voyais deux solutions (pour ceux qui suivent : décrire l’indescriptible, ce qui, cela dit, est toujours un problème en musique : mettre du son sur du papier sans portée ça peut porter à confusion). La première, c’était de pondre le live report classique : les infos, un petit verdict, une vanne pour conclure et basta.. La seconde, c’était de partir en délire sur papier pour vous faire piger ce truc stupéfiant, tenter de le rendre sensible. Comme je suis pas un radin et que j’ai aimé le show je me suis dit que j’allais vous pondre – cot cot – les deux versions. C’est kiki qui est gentil ?

C’était de toute façon déjà le problème avec Stupeflip : chaque texte était sujet à une vraie intellectualisation, à une vraie recherche, entre le cadavre exquis et le palimpseste. Et en même temps dire ça des morceaux du CROU est une manière de s’éloigner de leur son. Faut pas trop intellectualiser mais il y a moyen de le faire. Stupeflip, on comprend trop ou pas du tout. C’est dans cet espace réduit que se trouve le mystère au chocolat : un enfant qui tourne en rond est peut-être en train de jouer. A moins que ce soit vous qui tourniez. Ca veut tout-rien-dire et surtout ça le fait pas-et-en-même-temps. Vous suivez ?

Alors allons-y pour le live report classique. Je le disais : c’est très bien. Quasiment une performance. Pour un peu ça serait approuvé par Télérama et les beaux arts. Ce qui ne manque pas de drôle d’ailleurs : croiser Cadillac dans la rue, avec son problème oculaire artificiel, serait normalement l’occasion d’un rebrousse chemin voire d’un petit sursaut de peur. Mais sur scène c’est une putain de performance. Notez que l’artiste s’affirme (mais qui je suis pour dire ça moi ?) : contrairement à son premier concert parisien, qui était encore très marqué par Stupeflip, celui de l’Elysée Montmartre était 100% Cadillac. Personne n’a crié CROU CROU CROU et King Ju n’était pas sur scène.  Vous aimez votre famille, vous ne dînez pas avec eux tous les soirs ? Eh bien là c’est pareil.

Il n’empêche que le merch’ du stup’ermarché était bien là, ainsi que MC Salo etc. Mais on était bien à un concert de Cadillac. Et très franchement vu la qualité de son dernier album : tant mieux ! C’est même l’un des rares points problématiques du concert : il n’y qu’un album, donc pas assez de morceaux. On en reprendrait bien encore une heure. C’est moins cher qu’une séance chez le psy et c’est encore plus efficace. Envoyez le rab de frites. Le tout sonne assez Punk, très énervé, Cadillac est possédé… L’artiste passe le concert à genoux, se met à taquiner l’agent de la sécu – bravo à lui pour son sourire -, court sur les rotules d’un bout à l’autre de la scène. Un clodo qui fait le marathon. Ni plus ni moins. Et généreux avec ça – C’EST LES PLUS PAUVRES QUI DONNENT LE PLUS – : MC Salo, Mona Soyoc de KasProduct, un petit hommage à Michel Delpech… Voilà : y’a du Dali là dedans, de quoi faire avaler à Freud tous les utérus qu’il a pu détester, du Freak à l’ancienne.  Le tout sans jamais tomber dans la référence pour la référence ou un côté ampoulé. Le plus incroyable reste le numéro d’équilibriste social fait par Cadillac : ça n’a pas le bourgeois d’un Philippe Katerine, mais ce n’est pas non plus l’humour beauf d’un Ultra Vomit. Loin de moi l’idée de critiquer ces artistes que j’aime beaucoup, mais force est d’admettre que Cadillac est plus fin dans l’humour et plus espiègle dans l’absurde. Il est moins prout-prout. Alors même que c’est une activité qu’il affectionne particulièrement, prout. De quoi vous mettre sur le cul. Que dire d’autre ? Voilà : maintenant je sais pourquoi Carlos était le fils de Françoise Dolto.

Et je me rends compte que la partie classique de mon live report ne l’est pas tant que ça. Alors autant passer directement à la suite :  
AHHHHHHHHHHHHHHHHHHBWAHAHAHAHAHBROHHHHHHHHHHHH
C’est le caca dit yak,
Comme le taureau à poil,
Et faut pas être cardiaque,
Pour – prout – cette belle étoile,
Parce qu’il crie un peu,
Mais bien avec amour,
Humour de noeudnoeud,
Et cœur de pompadour !
Allez voir cadillac,
Vous mourrez pas moins con,
Mais vous l’aurez vu quoi,
Et c’est toujours ça de bon.  
Car Cadillac c’est vous,
Moi, nous, et parfois toi…..
Et une putain de marque de voiture.

Et avant de finir quelques mots rapides sur les premières parties :
Avec d’abord le duo de rappeurs Sein. Ils viennent de sortir leur EP et se rodent sur scène. Superbe énergie : là-dessus rien à dire. Et il faut s’accrocher parce qu’il n’y avait pas grand monde dans la salle à 19h donc chapeau à eux. Pour le reste quelques supers idées, je pense notamment aux chansons : Ultra et dis moi tout. Le mélange électro et rap fonctionne très bien. Il y a quelque chose de Orelsan qui aurait fait un fifa avec Kavinsky avant de pondre un album. Bien joué les gars. Pour les autres morceaux je trouve, pour ma part, qu’on retombe dans les travers du côté EP : expérimentation, voix qui tente des harmoniques allongées étranges, quelques textes plus faibles que d’autres. Cela dit : mettez ça vers 4 heures du matin en fin de soirée, avec un bon pet’, et là oui je signe grave. Dans tous les cas : on reparlera d’eux. Ils sont soutenus par Wagram, gagnent des prix, se font des feats de prestiges… Ils ne sortent pas de nulle part. ça s’entend. ça vaut le coup.

Vient ensuite le dernier membre du CROU pour la seconde première partie. Phrase débile s’il en est, disons donc seconde partie ? Deuxième acte ? Bref. Voilà l’étrange et lunaire MC Salo. Si Cadillac est perché alors MC Salo a déjà quitté le système solaire. Salo c’est un astéroïde qui viendrait s’écraser à fond la caisse dans l’habitude et la normalité. Imaginez : comme si un fan de l’AC Milan voulait reconquérir les territoires sioux et faire payer au capital une de ses injustices, mais le tout sans bouger du divan de son psy. Tout un programme. Difficile de parler de MC Salo… Est-ce lui la goutte de trop de Cadillac ? Cette goutte de quoi est-elle faite ? Absinthe ? Sueur ? Amitié. Il fait parti du CROU et avec les deux autres il crée ce Lore, le stupéflip musical universe, dont il est la pièce la plus étrange. Autant dire essentielle.

Photos : Catherine Alberola

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