Bien qu’original et plutôt inattendu dans sa structuration, le premier album de To-Mera dessinait encore un groupe en pleine recherche artistique. Mais Transcendental s’avérait néanmoins réjouissant de par une volonté plus que marquée de se détacher d’une scène rock à chanteuse lyrique décidément très en vogue ces derniers mois. Un cheminement vers une expérimentation plus poussée que d’ordinaire sans doute inhérente à l’impressionnant background présenté par chaque musicien, recherches sonores qui portent aujourd’hui leurs fruits sur ce second opus.
Si Transcendental souffrait encore de quelques défauts ainsi que d’ambiances parfois redondantes, To-Mera livre près de dix-huit mois plus tard une forme bien plus aboutie et développée de ces envies avec ces huit nouveaux morceaux. A l’image des formations qu’ils affectionnent, Dream Theater et Opeth en tête, les cinq musiciens poussent les mélanges des styles afin d’aboutir à un son totalement personnel, expérimental et varié, mais néanmoins diablement cohérent. Delusions y gagne certes légèrement en difficulté d’accès, mais aussi en intérêt tant ce second essai s’avère passionnant une fois l’univers de To-Mera exploré en profondeur. Le quintet à en effet particulièrement travaillé les ossatures des compositions, les allongeant de façon conséquente (un unique morceau se situera sous la barre des sept minutes) afin de développer ainsi que d’approfondir différentes ambiances bien distinctes au sein du même titre. Le résultat est saisissant, le quintet parvenant à broder des étendues riches en cassures, ponctuées d’échappées en solo bluffantes (le superbe « The Glory Of A New Day ») et de breaks typiques typés New Orleans Jazz. Une technicité sans faille amenée par une section instrumentale qui ose enfin pousser le bouchon de l’expérimentation, ces influences jazzy ne se contentant plus d’anecdotiques incursions mais occupant une place pré-dominantes et appréciables dans les paysages dépeints par le groupe. Les claviers ainsi que les cuivres se voient libérés de leurs carcans, restituant entre deux décharges électriques amenée Tom MacLean un parfum cabaret enfumé d’une soirée rythmée par une formation se livrant à l’exercice d’un free jazz enivrant (« Mitrage », « Fallen From Grace », le break d’« Asylum » mené tambour battant par un saxophone décomplexé).
Les différents contrastes amenés par ces explorations multiples poussent plus légèrement la guitare en retrait, celle-ci usant de riffs avec une plus grande parcimonie, ses interventions n’en étant que plus percutantes lorsque la batterie relance la cavalcade suite à quelques mesures plus posées (le rebondissant « Inside The Hourglass », morceau au refrain diablement efficace). Quelques tirades d’obédiences bien plus classiques viennent par ailleurs se greffer lorsque le tempo se montre plus conciliant, permettant un accompagnement dépouillé et satinée à la voix de Julie Kiss (l’ouverture de « Temptation », sur lequel le piano servira de fil conducteur). Un chant par ailleurs toujours aussi maîtrisé, présentant même un spectre encore plus large que sur le premier essai du groupe. La meneuse de troupe fait preuve d’une virtuosité sans failles, modulant à merveille son organe vocal au besoin des instrumentations (« Asylum »). Aux envolées saturées d’électricités répondent des interventions puissantes flirtant avec les aigus, laissant place à peine quelques secondes plus tard à un timbre apaisé habillant les dérives satinés de pianos, de cuivres ou de notes de guitares posées en apesanteur (l’hypnotisante ouverture de « Fallen From Grace »).
Malgré sa longueur, Delusions est un album transcendant de bout en bout. Une belle réussite pour To-Mera, qui se fend d’un réel bond en avant au niveau de la composition et livre enfin toute l’étendue de son talent. L’un des disques à ne pas manquer en ce début d’année 2008.
.: Tracklist :.
01. The Lie
02. Mirage
03. The Glory of a New Day
04. Inside the Hourglass
05. A Sorrow to Kill
06. Asylum
07. Fallen from Grace
08. Temptation