Mercredi 21 mars 2007, veille du concert d'IAM à la salle de l'Olympic, le rendez vous est donné à l'hôtel Grand Mercure de Nantes vers 18h30. On entre dans le luxueux hall de l'hôtel. Dès notre arrivée on aperçoit les membres d'IAM tranquillement posés dans le salon. L'attaché de presse du groupe vient nous accueillir et nous présente aux rappeurs marseillais. Tous viennent amicalement nous serrer la main. A la base, l'interview était programmée de 18h45 à 19h15 en compagnie de Freeman. On s'installe dans les fauteuils du salon où règne un climat détendu. La pression ne se faisait pas ressentir autour de cette promotion de Saison 5, le nouvel album du mythique groupe de rap français IAM, dont la sortie est prévue le 2 avril 2007 dans les bacs. C'est à notre grande surprise qu'Akhenaton suivi de Kheops s'installent pour débuter l'interview. Cette interview sera divisée en deux parties. La première sera donc avec Akhenaton et Kheops, la seconde en compagnie de Freeman.
Les photos ont été prises lors du concert d'IAM le 22 mars 2007 à l'Olympic de Nantes. Un concert où la prestation des marseillais a été remarquable mettant une nouvelle fois en avant, qu'IAM est l'un des plus grand groupe de rap français. L'interview peut commencer…
Hervé: Le 2 avril 2007 sortira l'album Saison 5. Pourquoi avoir choisi ce nom pour ce nouvel album ?
Akhenaton: En fait on est des gros fans de séries à la base, mais depuis bien avant que TF1 en diffuse (rires!) On est à fond dans les séries depuis pas mal d'années et vu que cet album était le cinquième pour nous c'est vraiment une sorte de longue histoire qui s'étale sur 17 ans …18 ans maintenant que l'on sort des disques. Théoriquement on aurait du l'appeler saison 6 parce qu'il y avait un album auto produit en 1989 qui s'appelle Concept, donc normalement c'est le sixième. On a pas joué la carte des aficionados. En plus cinq c'est un bon chiffre.
Hervé: La tournée a commencée début mars avant la sortie de l'album. Etait-ce voulu par le groupe ou un pur hasard ?
Akhenaton: C'est parfaitement voulu par le groupe. Je te dis d'habitude ce qui se passe sur un album normal. Deux, trois semaines avant la sortie de l'album on va à Paris et on fait tous les gros groupes de presse, toutes les radios et les grosses télé. Là, on a fait un choix qui est propre au groupe. On a dit, on va aller sur le terrain, on va jouer notre musique et on va faire notre promo locale. Le pays est déjà suffisamment centralisé comme ça, on participe à la décentralisation culturelle de notre album (rires !) Faut pas mentir, on prend plaisir à jouer sur scène c'est du kif pour le groupe aussi. C'est vrai que l'on prend plus de plaisir à être sur scène un soir sur deux que d'être tout le temps dans les radios et les télé. Notre métier ce n'est pas de parler à la radio ou à la presse, c'est faire des titres, faire du son et performer un live. Pour nous ça nous fait vraiment du bien. Ça nous permet en plus dans le type de salle que l'on fait de voir les gens, de voir les têtes des gens car ça fait quelques années que l'on ne voit plus les têtes. Tant mieux pour nous car cela veut dire que l'on a du succès mais ça fait plusieurs années que l'on joue dans de très grandes salles. Là, on est en prise direct. L'olympic ça fait depuis 1994 ou 1993. Pour nous, c'est terrible de revenir dans ces salles là.{multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Hervé: Comment est apprécié le nouvel album sur scène? Avez vous eu de bons échos ?
Akhenaton: En fait on joue beaucoup de morceaux classiques, on joue seulement 4 titres du nouvel album. Mais ce que je peux te dire des réactions, c'est que des titres comme « ça vient de la rue » ou comme « official » marchent vraiment très bien. En plus c'est vrai que des titres comme « ça vient de la rue » sur scène nous permettent vraiment d'ôter la confusion par rapport au titre. On parlait justement de cela tout à l'heure, des fois les gens confondent le propos pourquoi l'on fait ce genre de titre là. Et à une période où les gens revendiquent la rue ci, la rue ça, nous ce morceau va en opposition par rapport à tout ce qui se passe. Parce que dans le morceau ne sont évoqués que des exemples positifs et tous ce qui a été emprunté à la culture urbaine et pour lesquels la culture urbaine n'est pas créditée. C'est cela qui nous dérange réellement. Dans des titres comme « ça vient de la rue », c'est que quand tu regardes des émissions comme la star académie où tu vois des gamins et des gamines habillés hip-hop à mort et qui chantent des chansons de variétés des années 70. Bordel voilà le rap ce qu'il apporte ? il apporte une tenue vestimentaire descente, ça leur permet de ne pas avoir trop l'air ringard à la télé. Mais notre musique, elle passe toujours au dernier plan, elle n'en tire jamais les avantages de la surexposition. On se fait absorber, on se fait récupérer, mais notre musique n'en sort jamais gagnante. Elle n'existe que par ces clichés….et c'est pénible.
Hervé: Y a t'il un peu de pression d'ailleurs par rapport à cette sortie d'album?
Kheops: Est ce que tu as l'impression que l'on a de la pression ? (rires!) On rigole, on s'emmerde, on se chambre toute la journée, on est tranquille…..
Akhenaton: Il n'y a que des philosophes maintenant dans le groupe. Non je te jure ! Sur les sorties de disques, au bout de vingt ans le groupe a pris un recul sur le métier et c'est phénoménal. C'est à dire que l'on aime la musique, c'est toute notre vie. Maintenant, si l'on ne vend pas de disques…ça ne nous empêchera pas de faire de la musique. Tu vois les gens ils nous disent, « Quand est ce que vous pensez arrêter? » Mais je leur dis, je ne suis pas footballeur. J'ai un problème? Ma voix s'arrête à 40 ans? Il y a un soucis? C'est le jeunisme du rap particulièrement qui est externe et interne qui est stupide. Maintenant si je suis en cohérence avec mon age et que je fais des textes qui correspondent à mon age je ne vois pas où est le problème. Maintenant si je vends des disques et que je fais de la musique pour moi, je ne vois pas non plus où est le problème. Tu vois des fois le rap à des réactions qui sont l'inverse de ce qu'il prône. Ça devient des réactions de vrais fachos… ça fait peur….
Kheops: En parlant de séries télé, ça recolle bien. Je ne sais pas si tu connais « Age de cristal »? C'est des gens qui au bout de trente ans ils doivent mourir, ils vont au carrousel. Et bien j'ai l'impression que le rap c'est l'age de cristal pour beaucoup de monde. A 25 ans c'est fini tu as plus le droit. Tu n'écoutes plus de rap, tu arrêtes, tu n'as plus le droit d'écouter du rap. C'est ton anniversaire on te prend tous tes disques de rap, tout à la poubelle et c'est fini. Tu vas écouter du rock, ce que tu veux mais le rap tu n'y as plus le droit. Ces personnes qui pensent cela, ce qu'ils oublient c'est que le temps irrémédiablement avance aussi pour eux. Le jour où ils vont arriver à 20 ans ou 25 ans, est ce qu'ils vont comprendre les conneries qu'ils ont dit depuis 10 ans ? Eux aussi ils auront un jour 25 ans….
Hervé: Quand a commencé ce projet de Saison 5?
Akhenaton: Il a réellement commencé en septembre avec l'enregistrement, et on a terminé fin novembre. C'est un album qui a été fait en trois mois d'une manière éclair va t'on dire.
Hervé : Six ans ont été nécessaire entre la sortie du mythique Ecole du micro d'argent qui est sorti en 1997 et Revoir un printemps en 2003. Là, il vous a fallu seulement trois ans entre la sortie des deux albums. Comment expliquez vous cette différence ?
Akhenaton: Tout simplement parce que la tournée de Revoir un printemps a été très bénéfique pour tout le groupe. Je pense qu'elle a soudé le groupe, elle nous a replacé dans des convictions et dans le fait de dire que l'on aime vraiment faire de la musique. C'était vraiment une super tournée, paradoxalement au travail de l'album qui a été très compliqué à gérer avec la maison de disque où l'on a géré que du conflictuel. Sur scène par contre c'était sûrement la meilleure tournée du groupe. Donc pour nous, ça nous a donné envie de refaire quelque chose derrière. On a trouvé un nouveau label et on a enchaîné de suite….
Kheops: On avait hâte de refaire un album sans penser a tous les problèmes qu'il y a autour.
Hervé: Vous avez changé de label, vous étiez chez EMI avant?
Kheops: Je ne sais pas…tous les six mois ça changeait. Capitol, Virgin, EMI…même nous on ne savait plus à la fin.
Akhenaton: C'est pareil. Ce n'est pas que E.M.I mais ces tous ces labels de grandes tailles c'est très dur. Ça se jauge sur une échelle humaine. Il n'y a pas de meilleur label, de moins bon label; de super label. C'est ou il y a les bonnes personnes aux bons postes ou ils ne le sont pas, c'est tout.
Hervé: Comment vous sentez vous pour demain soir ? Est-ce que cela va être un retour sur une scène peut être un peu plus proche du public ou cela ne va rien changer à d'habitude ?
Kheops: Non, ce sera la sixième dates je crois , et on a eu un très bon retour du public. Surtout, le sourire et un bon karaoké pour nous.
Akhenaton: Ah ouai non, c'est affolant. Il y a des soirs où carrément les gens chantaient les morceaux de A à Z. On rigolait, on se disait ce n'est plus un concert d'IAM, on a ouvert un karaoké. Ça fait plaisir lorsque tu as mille personnes qui reprennent les textes en chœur, en rythme et sans se tromper de rythme, c'est impressionnant
Hervé: Je vous laisse le mot de la fin pour les internautes de Vacarm.
Akhenaton: Restez relax. On parle juste de musique et ça n'apporte que des bonnes choses. Il n'y a rien de méchant ou de dramatique comparé à ce qu'il se passe dans le monde et puis à ceux qui font du rap continuez à ce que se soit que du plaisir, un hobby. Le hip-hop et le rap ce n'est pas l'antenne Assedic du coin.
La première partie fut écourtée par l'attaché de presse. Je commençais à enlever tout le matériel lorsqu'Akhenaton vit une question que je n'avais pas eu le temps de poser. Il me dit en rigolant que je ne devais pas poser de question de football pendant l'interview. Croyant que j'étais nantais, il voulait me faire comprendre que j'étais un peu mal placé pour parler de football. Mais en lui apprenant qu'en réalité j'étais rennais, l'ambiance ne fut plus pareil étant donné que lors de la dernière journée le Stade Rennais avait gagné face au Paris Saint Germain. On parla pendant quelques minutes de football et une fois cette intermède sportive terminée on se dirigea vers Freeman pour continuer notre interview.
Hervé: Est ce que tu pourrais nous parler de Saison 5 par rapport à ton point de vue ? Comment s'est passé le concept de Saison 5 ?
Freeman: Il y a deux questions (rires !) Je vais reprendre la première. Ça s'est passé dans un bon état d'esprit. Le seul petit problème c'est que lorsque l'on a commencé Saison 5, j'étais déjà sur MC Arabica. C'est un groupe que j'ai formé avec Monsieur K-rhyme le roi, d'ailleurs l'album est sorti il y a une semaine mais seulement en numérique, c'est la première fois. Donc j'étais déjà sur ce projet et puis petit à petit je suis arrivé et je me suis greffé à ce que Chill et Shurik'N avait déjà fait. Ça s'est passé dans une ambiance très studieuse. Premier mois à Marseille, deuxième mois on est parti au Maroc donc c'était très sympa puis il y a eu un mois de mixage. C'est la première fois aussi qu'IAM travaille aussi rapidement, c'était un vrai challenge vu qu'il y avait des délais de temps. Dans l'ensemble on est assez satisfait de la manière dont a été fait l'album. On n'a pas eu le luxe du temps par rapport à un Revoir un printemps où le travail c'était étalé sur deux ans mais je pense que c'est bien de se retrouver dans une espèce de pression positive où il fallait sortir les morceaux les uns après les autres. Le travail c'était un peu un chaos organisé dans le sens où chacun écrivait et que l'on ne bloquait pas tous les jours sur les mêmes morceaux instrumentalement parlant. On ne bloquait pas sur les mêmes instruments. Tu arrivais au studio, tu en avais un qui commençait un couplet parce qu'il avait une idée sur le morceau et ainsi de suite. L'axe principal c'était d'avoir le thème, de faire son premier couplet et que les autres écoutaient et que s'ils voulaient se greffer ils pouvaient…donc on a avancer comme cela. C'était assez sympa , on a aimé cette manière de travailler parce que premièrement on va beaucoup plus vite et puis ça permet aussi de rejeter les déchets beaucoup plus rapidement, donc c'était important. Après, comment je l'ai vécu? Très très bien vu qu'en fait j'avais pris une vraie place au sein du groupe à partir de revoir un printemps, où j'étais présent sur tous les morceaux. Là, on est revenu à ce que l'on appelait la base du groupe c'est à dire Shurik'N et Akhenaton qui sont beaucoup plus mis en avant. Ça fait partie de l'histoire du groupe, il y a toujours un membre du groupe sur chaque album où on le voit un peu plus retiré que les autres. C'est vrai que je me suis beaucoup concentré sur MC Arabica, ça m'a pris beaucoup de temps vu que c'est de l'auto production et que j'ai tout géré de A à Z. C'était assez difficile, nouveau métier pour moi à apprendre. Je sortais du domaine de MC Arabica. Je devais prendre une autre casquette et ce n'était pas évident pour moi. Mais je suis assez content du résultat.
Hervé: Est-ce qu' il y a des featurings sur Saison 5 ?
Freeman: Oui il y en a deux. Il y a Said, le chanteur qui fait pratiquement partie de la famille maintenant car ça fait pas mal d'années que l'on se connaît. On s'est même connu avant les années 90 où à la base c'était aussi un très bon danseur et il l'est encore. C'est une longue histoire et c'est un ami avant d'être un artiste et au sein de tout le groupe. Puis il y a un autre featuring Jehro, c'est un chanteur de reggae de Marseille que Kephren et Akhenaton ont découvert sur un plateau. On cherchait un chanteur bien précis pour la chanson « To the world », c'est vrai que l'on n'a pas trouvé ce que l'on voulait. Finalement ça c'est fait au gré du hasard. Et finalement il n'y a que deux featurings. On ne s'est pas imposé de quotas en se disant puisque l'on a travaillé avec Beyonce, Method Man, Redman etc… qu'il fallait absolument beaucoup de featurings. Je pense que ça se fait au feeling, sur le moment et s'il y a un vrai truc qui se passe je pense que c'est bien de le faire. Maintenant faire des featurings juste pour j'allais dire la prestance ou pour autre chose, ça ne nous a jamais intéressé et ça ne nous intéressera pas. Pour nous, c'est vraiment le partage et c'est très important au sein du hip-hop. D'ailleurs ça se perd de plus en plus. A la base, quand même le hip-hop reste quand même presque un état d'esprit méditerranéen où l'on partage la galette avec les invités. Ce n'était pas quelque chose de précis, on s'est dit voilà on ne va pas prendre beaucoup de featurings. C'est vrai que d'habitude il y a beaucoup de gens qui passent au studio lorsque l'on reste à Marseille ou à Paris. Là, c'était un peu plus difficile vu que l'on s'est retrouvé au Maroc donc les passages il n'y en avait pas beaucoup tu vois (Rires!) on était vraiment seul. Je pense que l'on avait besoin aussi de se retrouver et de repartir. Pour nous, c'était un challenge vu que l'on se retrouve dans une nouvelle maison de disque, cinquième album…ça fait longtemps que l'on est là, on nous appelle les papy maintenant donc il y avait tout ce contexte qui fait que c'est devenu une bonne chose.
Hervé: Pour ce cinquième album il y a un apport individuel de chaque membre du groupe. Chacun de vous possède une carrière solo. Freeman peux tu nous parler de ton actualité ?
Freeman: En solo, comme je le disais tout à l'heure, je viens de finir l'album MC Arabica L'égalité dans la différence. Je dirais que c'est un peu la suite logique d' L' palais de justice où à la base il y avait Freeman featuring K-rhyme le roi mais l'album aurait déjà pu s'appeler MC Arabica à l'époque étant donné que K-rhyme était pratiquement sur tous les morceaux. J'ai même donné de la place pour un solo à lui. Le groupe existait déjà sauf que contractuellement parlant je ne pouvais pas faire ça. Aujourd'hui on continue avec K-rhyme, on a pris le temps après la fin de la tournée Revoir un printemps, je me suis posé avec K-rhyme et j'avais vraiment envie de repartir sur le groupe MC Arabica. Mais j'ai aussi mes solo, et je pense que là ça va être mon premier vrai solo. Je suis déjà très bien avancé, on va dire que je suis pratiquement à 60 % du travail réalisé. Normalement, au mois d'août j'enregistre cet album. J'espère que pour la tournée IAM, il y aura des morceaux solo pour mettre un peu de fraîcheur comme on a pu le faire sur l’Ecole du micro d'argent où chacun amenait des morceaux solos
Hervé: Vous commencez une nouvelle tournée…
Freeman: Pardon (Rires!) Il y a Tonton (alias Imhotep) qui s'est rebellé parce qu'il vient de sortir Chronique de Mars, il va le sortir. Il a préparé Chronique de Mars 2…Je voulais le préciser puisqu'il m'a tapé sur la tête (Rires !)
Hervé: IAM part en tournée qui est une pré-tournée. Après vous allez enchaîner sur une tournée en décembre. Mais est ce que l'on pourra vous voir sur des festivals cet été ?
Freeman: Oui, nous allons en faire quelques uns au mois de Juillet. Je pense que l'on va faire tout ce qui est Suisse, les Vieilles Charrues…On va faire cela sur un mois. On va tourner aussi au Canada, les grands festivals on va un peu tous les passer au crible.
Hervé: Est ce que vous prévoyez de sortir des Cd Live ou DVD Live par rapport à cette tournée ?
Freeman: Tu parles de cette pré-tournée? Ou de la vraie tournée? J'espère que sur la tournée de décembre on sortira un live. Là sur cette pré-tournée, ce n'est pas une vraie tournée. C'est vraiment…
Hervé: Un tour de chauffe?
Freeman: Oui, c'est un tour de chauffe. C'est pour se faire plaisir et faire plaisir aux gens qui nous suivent depuis à peu près vingt ans. Cette pré-tournée on l'a appelé classique, ce n'est pas pour rien. On a voulu revenir à tout ce que font les groupes, que se soit de rock, de pop etc…où ils jouent les morceaux les plus connus. Nous, on a jamais voulu cela vu que dans le hip-hop ça va très vite. On s'est toujours refusé à faire cela parce que pour nous on voulait mettre la nouveauté en avant. On est très productif, on est six donc il y a beaucoup de choses à dire et à montrer. C'est vrai que le fait de se retrouver en temps que… même pour nous en temps que fans, tu vois lorsque je vais à un concert de Bhusta ou de Naas, s'il ne joue pas les morceaux classiques, je vais être dégoûté. On a pris du recul par rapport à cela, on a voulu se faire plaisir et faire plaisir aux gens. Au lieu de faire une promo entre parenthèses « Normale » où il fallait que l'on monte sur Paris et viennent ceux qui veulent. On a décidé de faire une tournée promo avec des petits shows, revenir à quelque chose de plus physique, avec du contact. Notre musique à la base est une musique de proximité, IAM est un groupe de scène. C'est bien de faire les Zéniths, les grandes salles mais c'est vrai que l'on ne retrouvera jamais la chaleur d'une petite salle où tu as quand même les gens qui sont très près de toi. Avoir la réponse directe du public et partager ta passion c'est quelque chose d'extraordinaire. On va dire que c'est une tournée karaoké où les gens chantent avec nous.
Hervé: Pourra t'on voir un jour IAM en feat avec un groupe de rock?
On entend au loin de la salle un « Non »
Freeman: (Rires !)De là bas il a dit non !(Rires!)
Imhotep : Qui a dit non ?
Freeman: Kheops a dit non, mais je pense qu'il n'a pas entendu la question.(Rires!). Oui, pourquoi pas. Tu sais, on n'est pas un groupe fermé, ça marche par la passion et la qualité, on est ouvert à tout. En ce moment, je suis en train de préparer quelque chose d'assez important que l'on a jamais vu dans le hip-hop. Normalement je devrais avoir un chanteur d'opéra qui est très connu. Je ne préfère pas dire son nom pour l'instant, j'attends mais c'est quelqu'un de très connu. Je ne suis fermé à rien. Tant que ça reste du chant. Ma passion c'est la musique, ma musique de base c'est le hip-hop, la musique black ça c'est sûr et certains. Après toutes les musiques découlent de là donc automatiquement je suis toujours dans le même puit. Je ne suis fermé à rien du tout. Tonton a beaucoup travaillé avec des mecs comme Zebda… Pour nous, c'est l'humain d'abord. Quand on connaît les personnes on le fait de bon cœur. Après c'est vrai que je ne vais pas me dire, “tiens il me faudrait un feat avec un rockeur, je vais voir qui je vais prendre”. Tu sais, notre musique je le répète souvent, c'est peut être prétentieux mais en même temps c'est peut être la seule vraie musique qu'il reste dans le sens où le hip-hop est la seule musique où tu pars d'un bruit de cuillères pour faire un rythme pour te retrouver dans du classique, une musique chinoise ou des tam-tam africains et faire un morceau. Notre musique c'est le monde elle n'a pas un style. Le seul style réel dans la culture hip-hop c'est le rythmique. A la rigueur on peut dire que la rythmique c'est le hip-hop. Après on est peut être la musique qui se sert de tout. Après ça se transforme ou non. La musique est quelque chose que l'on ne peut pas confiner et qu'on peut mettre dans un coin et dire que ce n'est pas de la musique. Pour moi, la musique est un tout. On prend la part que l'on aime pour faire ce que l'on a envie de faire.
Hervé: Vous avez fait des feat avec Method Man et Redman. Je voulais savoir qu'est ce que vous pensez du rap américain ?
Freeman: Tu sais, j'ai grandi avec le rap américain. Il n'y avait personne derrière nous pour que l'on est grandi avec du rap français. Pour nous, ça a été d'abord les Etats Unis. La palette est tellement étendue et ce qu'il y a d'intéressant c'est qu'il y a de tout. Pour moi, ça a vraiment été quelque chose d'extraordinaire lorsque j'ai été la première fois aux Etats-Unis et de voir ce que le hip hop pouvait donner là bas. Après je suis très pointu, depuis le début pour ma part ça a été New York et plus précisément Brooklyn. A part Naas, Red, Method, les vrais mecs à l'ancienne, je n'en sors pas. Je découvre d'autres groupes, j'écoute, dans d'autres villes mais je n'ai jamais les tripes qui se serrent comme quand j'écoute un Naas, où je suis un vrai fan. L'évolution là bas, elle est tellement importante mais c'est vrai que l'on a perdu un peu de l'âme du hip-hop. Les premières fois que je partais à New York on sentait vraiment cette âme, c'était présent. Mais la dernière fois que j'ai été, ça s'est perdu. Le hip-hop s'est démocratisé, il est rentré dans les mœurs. C'est devenu quelque chose où tu vas voir Method dans une pub de lessive…C'est très bizarre par rapport à l'évolution du hip-hop en France ou en Europe. On ne pourra jamais renier cela. Entre parenthèse que Dieu me pardonne, c'est un peu la Mecque du hip-hop ça va être bizarre de critiquer les Etats Unis. La seule critique que je pourrais dire, c'est sur le plan des paroles. Ils ne mettent pas en avant les meilleures et ça c'est dommage. A part cela, quand on entend les productions, le niveau des mecs qui font le son c'est monstrueux. On ne peut qu'admirer.
Hervé: Freeman, tu dis que le rap américain c'est la Mecque du rap. Est-ce que tu penses que des Français peuvent s'imposer aux Etats-Unis ?
Freeman: Je pense que se serait dure. La barrière de la langue serait difficile. Tu te rends compte que déjà les mecs de New York n'arrivent même pas les mecs de L.A. à cause de leur accent mais pourtant ils se comprennent. Les anglais je ne t'en parle même pas pour eux c'est des demi américain. Peut être que musicalement parlant certains groupes français pourraient se créer un chemin et travailler là bas. Après sur le plan des lyrics, à mon avis beaucoup de souffrances nous attendent (Rires!) Sauf peut être dans les campus, les universités où il y a beaucoup d'étrangers. Peut être que dans ces endroits on peut nous entendre car il y a des espagnols, italiens, français, suisse, Canada. Quand ces étudiants sont là bas, ils font découvrir des nouveaux groupes entre eux. Après, sortie de là je ne pense pas qu'un groupe puisse s'installer. Se serait très lourd à supporter.
Hervé: Un dernier mot Freeman pour le concert de demain. Le concert à l'Olympic, demain soir tu le sens bien ?
Freeman: Je dirais que demain je vais me faire appeler Free on fire (Rires !) Sinon ça va, je suis un peu fatigué car c'est la première semaine que l'on est parti sur la route. Mais je pense que ce soir on va bien se reposer et on sera prêt pour demain. Pour l'instant tous les concerts que l'on a fait ça a été le fire. D'après mes souvenirs des concerts que l'on a fait à chaque fois sur Nantes, j'espère que ça va être le feu et on a la mèche et l'essence pour ça.
Hervé: Dernière dédicace pour les internautes de Vacarm.net.
Freeman: Et bien, à tous les B-boys et les B-girls restez à l'écoute. Ça va arriver Saison 5 et MC Arabica débarque avec L'égalité dans la différence, restez à l'écoute, ça va être la bomba !
Merci à Akhenaton, Freeman, Kheops, Imhotep pour avoir répondus à mes questions.
Merci à Alexandra (System Buzz) et Choupy l'attaché de presse qui m'ont permis de réaliser cette interview.
Photos: Hervé