Tout d’abord, quel est ton ressenti après cette première date parisienne de votre tournée?
C’est vrai qu’on avait fait pas mal de dates en banlieue parisienne, mais c’est la première date intra-muros… Elle me laisse de bonnes impressions en fait, car curieusement, à chaque fois que l’on vient à Paris, ça se passe très bien. On dit toujours que le public parisien, c’est de la merde, bah nous on trouve pas, on pense même que le public parisien est assez pointu, donc si le public est pointu et réagit à ce que tu fais, c’est vachement flatteur! Et puis dans une salle comme le Nouveau Casino où on joue très proche des gens, c’est super agréable.
Ça va faire quelques mois que l’album est sorti (10 mois exactement, NLDR), est-ce que tu peux tirer un premier bilan de l’accueil de celui-ci?
Il y a un truc qui est assez révélateur de la portée de l’album, c’est qu’on en vend pas mal après les concerts! Ce que l’on vend en merchandising après les concerts, ça a pris des proportions qu’on ne pensait pas possibles, en fait! Il y a deux sortes de retours sur un album, celui des professionnels et celui du public; pour les professionnels, ça a été monstrueux, on a eu quasiment que des super critiques, on n’a même pas eu de critiques qui disaient «Mouais, pas mal.» Et ça ce sont les critiques qui font le plus mal! Et quant à la réaction du public, bah plus on joue, plus il y a de monde, là on fait des salles beaucoup plus grandes que sur la tournée précédente, les gens connaissent beaucoup plus les paroles, quand les trois premiers rangs connaissent les paroles, tu te dis que t’as dû pas trop mal faire ton taf!
Il y a eu un moment charnière dans l’année, c’est le Sonisphere…
Les Sonispheres, car il y en a eu deux!
Comment est-ce arrivé en fait?
Bah c’est juste une histoire de contacts. Quand on est apparu pour la première fois sur l’affiche du Sonisphere, en fait cela faisait 10 mois qu’on savait qu’on allait y jouer et l’album n’était même pas sorti! Ce qui s’est passé, c’est que le programmateur a écouté le disque avant même que celui-ci ne sorte, et il a flashé dessus… donc il a dit qu’il prenait le risque de nous faire jouer, dans de bonnes conditions, bien payé, à une bonne heure… donc on a dit oui direct! Et là bas on a pris un plaisir énorme, c’était monstrueux de jouer avec des têtes d’affiches qui sont les groupes qu’on a écouté à fond dans les années 90, comme Deftones… et en fait à Madrid, le big boss international du Sonisphere a écouté ce que l’on faisait et nous a dit qu’il nous voulait pour celui de Londres, qui est l’un des plus gros d’Europe! Donc là on est rentré de vacances en catastrophe et on s’est retrouvé à Londres, devant 60 000 personnes, avec Iron Maiden en tête d’affiche, un truc de fou furieux… ca a été un coup de projecteur énorme sur nous, beaucoup d’interviews, c’était juste génial de se retrouver dans les loges avec Iron Maiden, Alice In Chains et Rammstein… quand tu es gamin tu rêves de ça, et là ça arrive! Et grâce à ces deux sonisphères là, on sait qu’il y a des choses qui vont arriver…
Oui, justement, avez-vous des retombées de cette exposition internationale?
Oui, je pense, il y a beaucoup de trucs en cours pour des premières parties, d’autres festivals… pour l’instant il n’y a rien de définitif, mais on sait qu’il y a des choses qui se passe et qu’on parle de nous sur la scène européenne, c’est ça le plus important. Quand on était à l’étranger, les mecs nous disait qu’à part Gojira, il n’y avait pas de Rock en France, qu’on était des grosses pines en Rock’n Roll!
Comment expliquer, alors qu’il y a eu une grande période de vaches maigres pour le métal français et que par exemple, le néo-métal français n’a jamais réussi à s’exporter, que des groupes comme vous, Gojira ou Hacride arriviez aujourd’hui à passer ce cap?
Pour moi il y a une chose à prendre en compte: si tu regardes les groupes qui s’en sont sorti en France pendant les vingt dernières années, ce sont des groupes qui chantent en français: Lofofora, Mass Hysteria, Eths… Gojira et nous, on a fait le pari de chanter en anglais, et ça nous ouvre des portes. Par exemple, pour les anglais, le Rock se chante en anglais, pas en français… Quant aux labels, ils ne nous ont jamais donné de direction artistique, ils aiment ce que l’on fait et nous laissent une grande liberté, que ce soit Customcore avant ou XIII Bis maintenant.
Il y a eu un autre moment important cette année, c’est le clip réalisé pour le titre «Intoxicated», qui cartonne sur le net (et que vous pouvez visionner ici…). Peux-tu m’en dire plus sur son origine et sa réalisation?
En fait on a été contacté par des mecs qui travaillent dans le cinéma, des vrais pros, qui nous ont dit qu’ils adoraient ce que l’on faisait et qui voulaient nous réaliser un clip… donc il sont venus avec un scénario et un budget ridiculement petit par rapport aux moyens engagés. Et quand on a vu les premières images on s’est dit «Wouah, ça tue!». Le résultat était en fait vachement au dessus de ce que l’on en attendait, on a beaucoup accroché avec les gars qui ont réalisé ça, ainsi qu’avec les acteurs… Ça a été une super expérience, et on n’a qu’une seule envie, c’est de remettre le couvert avec eux pour le prochain!
Vous êtes un peu sur un segment hybride entre Rock et Métal, n’est-ce pas un peu compliqué de réunir les deux publics?
Le public qu’on avait sur les deux premiers albums sont des mecs qui ont vieilli avec nous. Donc je pense que c’est une histoire d’âge. Au départ on était jeune, donc on faisait du métal, on était contents car ça faisait du bruit. Puis après on s’est dit que ça serait pas mal de faire une vraie bonne chanson! Et puis maintenant les choses avancent, la moyenne d’âge est de trente piges… à trente ans, tu as plus envie d’écouter Alice In Chains que Slipknot, par exemple! Dans notre public il y a beaucoup de gens qui suivent Headcharger depuis le début. Donc mélanger les deux publics, je ne sais pas… quand on joue avec Acme, ça se passe bien, quand on joue avec des groupes beaucoup plus violents ça se passe bien aussi car on apporte une touche un peu groovy au truc… tant qu’on joue avec des groupes qui ne font pas la même musique que nous ça se passe super bien, car on apporte quelque chose de différent.
Il y a un côté nostalgique dans votre son, l’amour du bon vieux Rock’n Roll, alors que vous n’êtes quand même pas très vieux! D’où vient ce truc là?
Dans les trucs récents, on a tous des goûts très différents: si tu réunissais tous les Cds des membres de Headcharger, il y en aurait très peu en commun; il y aurait Apetite For Destruction des Guns’N Roses, …And Justice For All de Metallica, sans doute un album d’Alice In Chains… mais ca serait globalement tout! Moi j’adore Maiden, les autres détestent, le chanteur est fan de Deftones et Tool, moi ça me saoule… donc on se retrouve sur les vieux trucs qui ont réussi à traverser les années. Il y a plein de trucs modernes qu’on écoute une fois et qu’on trouve mortels, mais au bout de la 3ème ou 4ème fois on fout le truc en l’air et on reprend nos vieux trucs…
Il y a aussi une forte attirance pour la culture américaine… Je trouve que votre album donne envie de prendre le volant d’une Cadillac sur la route 66, tu es d’accord avec ça?
Bah carrément! (rires) Malgré tout le respect qu’on a pour Aqme, Lofofora ou Mass Hysteria, ce ne sont pas des trucs qu’on écoute. On est tous branché sur la culture et la musique américaine, donc forcément l’Amérique ça nous fait rêver… et notre batteur est à moitié américain, donc ça aide!
Peut-on s’attendre à voir de nouvelles collaborations dans l’avenir, sur vos albums ou sur scène? Y a-t-il des gens avec qui vous aimeriez jouer?
Sur les albums, on a toujours fait des featurings avec des gens de chez nous. Pour le prochain album, il n’y a rien de calé mais au delà des styles musicaux, il y a des gens avec qui on s’entend très bien, donc évidemment, on aimeraient faire des choses avec eux. Les gens d’Aqme par exemple… les featurings qu’on fait sont avant tout des aventures humaines.
Vous venez de Normandie, qui n’est pas forcément une grosse scène métal française…
Ca dépend d’où tu viens en Normandie! A Caen, il y a une grosse scène indépendante avec des super trucs… Il y a eu Amanda Woodward qui a vraiment ouvert une brèche, Sugar Town Cabaret qui vient de faire un album qui est une tuerie ultime… Toute cette scène là est très active dans un truc très indé, des morceaux très lents, c’est très spécial, ça ne rentre pas dans les formats Rock traditionnels… à Caen, il y a une super scène indé. Il y a aussi Guns Of Brixton, dans un autre style ou 64 Dollar Question…
On parle d’un Sonisphere en France pour l’année prochaine, vous en serez?
Je peux pas te dire oui, mais j’espère. Normalement oui, mais je ne sais pas. On ne sait pas encore grand chose, sur qui va l’organiser, où, comment… on sait que le boss du Sonisphere nous aime bien, mais c’est tout. On aimerait bien, mais… voilà! Peut-être aussi qu’à ce moment là on sera en studio pour le nouvel album et qu’on ne fera pas de concerts à cette période…
Quels sont vos projets sur le moyen terme?
Là on compose à fond pour le nouvel album. On a encore quelques dates pour quelques mois et après on se consacrera à l’album et aux festivals de l’été… la routine, quoi! (rires)
Un grand merci à Antony d’avoir bien voulu répondre à nos questions juste après le concert…
Merci à Anthony « K-Wouète », ainsi qu’à Charles Provost (H.I.M. Media) qui nous ont permis de réaliser cette interview.
Interview réalisée par Julien Peschaux pour Vacarm.net