Si les artistes ne cessent de produire vidéo clips et captations live de leurs prestations, Hollywood et le monde du cinéma participent aussi à enrichir l’histoire du rock’n’roll. Dès 1954, lorsque le King explosait aux côtés de Bill Haley ou Chuck Berry, quelques producteurs en Californie s’intéressèrent à ce phénomène médiatique et participèrent au lancement de singles devenus mythiques grâce aux premières bandes originales où grésillaient les guitares électriques. Voici une brève anthologie des films qui ont marqué l’histoire du rock’n’roll, la liste n’est bien évidemment pas exhaustive…
Les débuts du rock en images
Chuck Berry lançait à peine son Duck Walk, célèbre pas de danse repris par de nombreux musiciens tels Angus Young, que Hollywood s’enflammait pour le rock. En 1955, Richard Brooks réalise le film « Graine de violence » (en anglais Blackboard Jungle), qui met en scène dans un contexte avant-gardiste un professeur dans un quartier pauvre de New York où l’éducation est méprisée. Ce film est le premier long métrage à mettre en avant du rock dans sa bande originable et fera naitre le mythe de la comète Bill Haley. Ce musicien blanc aura mis 2 ans pour enregistrer le single qui apparaitra sur la bande originale du film et donnera une envergure internationale au mouvement rock. « Rock Around The Clock » ouvre la porte à un nouveau venu, le séduisant Elvis Presley.
Un an plus tard, la production de films autour du rock s’intensifie. « The Girl can’t help it » (La blonde et moi) dans lequel un ponte de la mafia recrute un attaché de presse pour faire de sa copine blonde sans talent une star de la chanson, va influencer le monde du rock. En effet, plusieurs artistes majeurs tels que Little Richard, Eddie Cochran ou Gene Vincent vont faire des caméos (apparitions) durant des scènes clés du films. A l’époque, à seulement 16 ans, John Lennon est marqué par le film en voyant ces rockstars à l’écran. Il forme son premier groupe dans la foulée, qui va le pousser à rencontrer Paul McCartney (15 ans), lui aussi inspiré par le long métrage dans lequel a vu son idole Eddie Cochran jouer de la guitare.
Mais si nous n’allons pas faire une anthologie des films d’époque tournant autour du rock’n’roll, voici quelques uns des titres les plus populaires de l’époque : « Don’t knock the rock », où une rockstar (interprétée par Alan Dale) retourne l’été dans la maison familiale pour y découvrir que le rock’n’roll a été banni dans sa ville natale ; le docu-fiction « Rock around the clock » où Bill Haley himself, Alan Freed, The Platters et bien d’autres expliquent comment ils ont découvert les rythmes enflammés du rock’n’roll ; « Jailhouse Rock » dans lequel Elvis Presley interprète son 3e rôle au cinéma le plaçant comme le leader d’un groupe de rock formé de bad boys tout droit sortis de prison. « Jailhouse Rock » sera plus tard repris par les Blues Brothers, film dans lequel apparaitront les futurs étoiles de l’époque : Aretha Franklin, Ray Charles, James Brown, John Lee Hooker…
Œuvre posthume, la dernière apparition de James Dean se fait dans le film « La Fureur de vivre » (en anglais, Rebel without a cause ») où une bande adolescente cherche le goût du risque en s’adonnant à des jeux dangereux. Dennis Hopper, futur symbole de la génération hippie sublimant le road-movie dans Easy Rider, y obtient son premier rôle. Les balbutiements du roadmovie rock’n’roll se feront d’ailleurs avec le film « L’équipée sauvage » (1953) dans lequel des motards se castagnent de ville en ville. John Lennon s’inspirera d’une des répliques du film pour donner un nom à son nouveau groupe (« Tu as manqué aux Beetles ») et Black Rebel Motorcycle Club fera de même en reprenant le nom du gang de motards. Néanmoins, ces films vont sublimer « l’attitude rock » en images et donner les premiers prémices du White Thrash, en opposition avec le premier mouvement rock afro-américain (1946-1954). Ce sont aussi des films très souvent avant-gardistes par rapport au contexte socio-politique ségrégationiste de l’époque…
Elvis passe la main aux hippies
Passés les succès nord-américains, la vague hippie / britpop venue du Cavern Club de Londres va s’abattre aussi sur le cinéma hollywoodien. Les Beatles vont être au cœur de plusieurs productions. En tant qu’acteurs, ils se mettront en scène sur fond de Beatlemania dans « A Hard Day’s Night » (1964), « Help ! » (1965), « Magical Mystery Tour » (1967) et « Let it Be » (1970). Les Beatles produiront aussi leur propre film, « Yellow Submarine » en 1968, avec un caméo dans la scène finale. Entre 1965 et 1969, une série de dessins animés sera aussi diffusée aux Etats-Unis et en Europe avec les Beatles comme personnages principaux.
Les Rolling Stones, autre groupe emblématique de l’époque sera abondamment mis en scène au travers de divers documentaires. Jean-Luc Godard filmera les périgrinations du couple Mick Jagger / Keith Richards en 1968 lors de la composition du single « Sympathy for the devil » qui donnera son nom au long métrage (diffusé en Europe sous le titre alternatif One + One). « Gimme Shelter » reviendra sur les événements d’Altamont, festival lors duquel un jeune noir fut tabassé et poignardé par un Hells Angels durant la prestation des Rolling Stones. Le groupe était alors dépassé par les événements sur scène et s’arrêtait régulièrement de jouer pour tenter d’arrêter les débuts d’émeutes. D’autres documentaires plus ou moins bons furent consacrés au groupe : « Cinq plus un », « Cocksucker Blues », « Live at the Max »… jusqu’au récent « Shine a Light » de Martin Scorcese.
A chaque pointure de l’époque son film : The Doors, The Who (le célèbre « Tommy ») ou encore Bob Dylan. Tous les groupes leaders de cette période prolifique se retrouveront à l’écran au travers du film « Woodstock » de Michael Wadleigh. Entre documentaire et captation live, « Woodstock » revient sur les grands moments du mythique festival qui rassembla plus d’un demi-million de hippies (Cartman en frémit encore !). Jimi Hendrix, Crosby, Stills and Nash, The Who, Canned Heat, Santana, Joe Cocker, Janis Joplin chaque extrait live est un mythe à lui seul. Trois groupes n’apparaitront pas, suite à différents désaccords avec la production : Ravi Shankar, Grateful Dead et Creedence Clearwater Revival. A la même époque, une comédie musicale fait fureur sur Broadway en faisant écho à la nostalgie des 50’s : Grease.
Monte le volume jusqu’à 11
Les punks succèdent aux hippies dans la deuxième moitiée des années 70. Puis c’est au tour du hard rock et du heavy metal de faire péter les têtes d’amplis. De cette période vont naitre la notion de « film culte ». Nombres de longs-métrages vont être produits à cette époque ou tout du moins y faire écho avant d’être cités comme influence par les nouvelles générations de baby-rockers. La liste de films autour de l’univers rock depuis la fin des années 70 est tellement impressionnante par sa volumétrie qu’il est impossible de la partager intégralement avec vous. Voici tout de même quelques titres phares…
"The Rocky Horror Picture Show" représente aux yeux des fans de musique ce qu’est Star Wars aux adeptes de la science fiction. Ce long métrage forme un hommage décalé aux films d’horreur, de science-fiction et au rock par son côté provocateur et son extravagance. De nombreuses références au glam rock sont facilement remarquables et les fans participent toujours activement à faire vivre le mythe autour du film. A Paris, dans le 5e arrondissemen, Le Studio Galande diffuse en permanence le "Rocky Horror Picture Show" chaque vendredi et samedi soir à guichet fermé depuis 1975 !
Toujours dans un registre décalé, aux ambiances sous acides, le film d’animation Métal Hurlant de Gerald Potterton, sorti en 1981, fait écho à la scène hard rock naissante en incluant sur la bande son des morceaux de Trust, Blue Öyster Cult, Cheap Trick, Grand Funk Railroad ou Black Sabbath.
Les années 90 et 2000 vont plutôt privilégier les comédies. La série « Wayne’s World » (1992 & 1994) entame le pas en mettant en scène Aerosmith et Jim Morisson. Les deux films participent au regain d’intérêt pour la culture rock clichée au sein des nouvelles générations.Vient ensuite « Spinal Tap » de Rob Reiner, sorti en 1984 autre exemple typique de la concentration de clichés volontaires au sein d’un faux-documentaire sur le heavy metal. Véritable petit bijou pour tous les geeks passionnés par la musique, Spinal Tap regorge de références liées à des faits réels : se perdre dans les coulisses, mourir dans son vomi, disparitions mystérieuses de membres, concerts pourris, …
Dans une autre approche, bien que toujours aussi loufoque, « Detroit Rock City » est un hommage à tous les fans de musiques amplifiées, et principalement à ceux de Kiss. En plein coeur de l’Amérique puritaine, quatre amis et fans de Kiss achètent leurs billets pour le concert de leur groupe favori et vont affronter toutes les péripéties afin de contempler l’oeuvre de Gene Simmons et compères. Ce film rappellera à nombre d’entre nous ces petits instants de folie avant d’aller en concert ainsi que toute la ferveur que l’on peut exprimer lorsque l’on désire voir un groupe jouer en live. Avec une touche plus romantique, Presque Célèbre (« Almost Famous » – 2000), de Cameron Crowe, revient sur les personnes gravitant autour des rockstars comme les groupies ou les journalistes. On y voit d’ailleurs apparaitre une référence à Lester Bangs, le mythique rédacteur de Rolling Stone.
Jack Black, à la fois comédien et rockeur, va effacer la frontière entre les studios d’enregistrement et ceux de production cinématographique. Il va exprimer son talent que ce soit en rockeur survolté avec Tenacious D ou en acteur disjoncté dans des films où le rock est au cœur de l’histoire : « High Fidelity » (2000), « Rock Academy » (2003), « Be Kind Rewind » (2008), etc. De manière plus anecdotique, Flea, le bassiste hyperactif des Red Hot Chili Peppers a multiplié les seconds rôles dans plus d’une vingtaine de films. En regardant attentivement vos écrans, vous pourrez le découvrir dans Retour vers le futur 2 et 3, Las Vegas Parano, The Big Lebowski ou encore Psycho. Pour les nostalgiques des culottes courtes, il a même donné sa voie à Donnie des Razmokets !
Plus récemment sortis, « Good Morning England », « No Direction Home », « Joy Division », « I’m Not There », « Anvil : The Story of Anvil », « Dig! » (montrant la confrontation entre les Dandy Warhols et Brian Jonestown Massacre) sont eux aussi des films en passe de rentrer dans l’histoire du cinéma et du rock’n’roll.
Et vous, quels sont vos films cultes d’aujourd’hui et de demain ?