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Back to the Dark #2 : Orgy

Deuxième dossier de notre série « Back to the Dark », après Adema, nous revenons sur la carrière d’Orgy. Ils ont été un temps sous les projecteurs et sont retournés à l’anonymat quasi-total. Ils sont toujours là, même si tout le monde l’ignore. Retour sur ces groupes laissés pour mort mais qui persistent dans l’espoir de reconquérir partiellement leur succès passé, ou tout simplement par amour de la musique.

1994-1998 : formation et démarrage timide

Orgy doit sa percée à quelques facteurs alignés au bon moment : une signature sur le jeune label Elementree, structure éphémère crée par Korn qui n’accueillera que quelques groupes originaires de Bakersfield, un premier album sorti en plein essor du néo et une reprise efficace du « Blue Monday » de New Order qui connaîtra une rotation lourde sur la toute puissante MTV. Limiter la réussite du quintet à un coup du hasard serait cependant minimiser le savoir-faire des musiciens, dont l’expérience permet l’enregistrement d’un premier disque efficace. L’exubérant Ryan Shuck est à l’époque un homme de l’ombre. Le guitariste a été pendant quelques temps la tête pensante de SexArt, formation dans laquelle on retrouve Jonathan Davis – Korn -, Ty Elam – Vidéodrone –  ainsi que Dave DeRoo – futur Adema – . Davis et Shuck sont cependant de fortes têtes. Un énième clash d’ego pousse Davis à poser un ultimatum à ses compagnons : c’est lui ou Shuck, point. Le groupe virera son guitariste compositeur, mais trop tard. Davis à entre-temps rejoint Korn, qui livre rapidement son premier disque et part en tournée. SexArt ne s’en remettra jamais véritablement, et ses différents membres vaquent à de nouvelles occupations. Cruelle ironie du sort : Korn cartonne avec un premier single écrit en grande partie par Shuck, le désormais cultisme « Blind ». De leur côté, Amir Derakh – guitariste – et Jay Gordon se font la main dans la production en bossant sur le premier disque de Coal Chamber, Gordon jouant parallèlement de la basse chez Deadsy. Les plus discrets Bobby Hewitt – batterie – et Paige Haley complètent le line-up. Bien que formé au cours de l’année 1994, Orgy attendra quatre longues années avant d’enclencher la seconde et balancer à la face du monde son premier album, Candy Ass.

1998- 2000 : premier album, premier carton

De gauche à droite : Haley, Shuck, Gordon, Hewitt, Derakh

Le nom Candy Ass est inspiré d’une drag-queen rencontrée par le groupe au cours de l’enregistrement. Un choix qui témoigne presque à lui seul du décalage affiché par les natifs de Bakersfield par rapport à la scène à laquelle ils seront rattachés. Si le groupe cultive bien une légère affiliation au mouvement néo, il voit cependant plus loin. Orgy n’intègre à sa musique aucun élément hip-hop, ne mise jamais sur les screams à fleur de peau et affiche un look androgyne bien particulier. Auto-proclamé « death-pop », le quintet mixe des éléments indus, rock, metal, glam et bien plus encore. Leur musique s’approche d’ailleurs de celle des californiens de Deadsy, ce qui selon la légende vaudra d’ailleurs à Jay Gordon de s’en faire virer. Qu’importe : pour Orgy, le succès est quasi-immédiat. Candy Ass affiche des résultats plus qu’encourageants du côté des ventes et s’écoulera à 2 millions d’exemplaires. Le parrainage de Korn n’y est évidemment pas étranger. Jonathan Davis, qui s’est rabiboché avec Shuck, file un sévère coup de main sur l’affaire. Le chanteur participe au hit « Revival » et intègre Orgy sur le roster de la première tournée Family Values, qui donnera lieu à la sortie d’un DVD. Après « Blue Monday », le groupe enchaîne dans la foulée un second single / clip avec « Stitches », l’un des morceaux les plus redoutables de la galette. Un moindre succès sur les ondes malheureusement. Le quintet s’est malgré tout composé une petite armée de fidèle, bien que son album ne puisse s’acquérir à l’étranger que via les réseaux d’import. Amazon et Discogs viendront quelques années plus tard solutionner ce problème.

2001- 2003 : Vapor Transmission, délire SF et début d’effritement de popularité

De gauche à droite : Shuck, Hewitt, Gordon, Derakh, Haley

Précédé par le redoutable single « Fictions (Dreams in Digital) », Vapor Transmission débarque à l’automne 2000. Alors que le groupe ne semblait avoir cultivé sa personnalité atypique qu’à demi-mot sur Candy Ass afin de ne pas s’éloigner trop drastiquement de ce que le public néo est en droit d’attendre, ce dernier affiche désormais pleinement ses envies. Vapor Transmission est un album de sci-fi music, bardé de superpositions, d’électronique et de claviers – Derakh et Shuck deviennent férus de bidouilles en tous genres – ainsi que de lignes de chant stratosphériques. L’album est probablement l’un des plus travaillés de l’époque en matière de production. Les musiciens du groupe sont des malades de technologie, et bossent de concert avec Josh Abraham afin de poser sur bandes un son énorme et profond. La guest-list est par ailleurs impressionnante : Troy Van Leeuwen, Anthony Valvic – qui rejoindra par la suite Julien-K, side-project de Shuck et Derakh –, Elijah Blue – Deadsy – et bien d’autres viennent poser des parties instrumentales additionnelles. L’album est une bombe. Orgy parvient également à placer quelques titres sur les prods pour ados de l’époque : « Opticon » intègre la bande-originale de Mortelle Saint-Valentin avec Denise Richards – le fantasme de tout lycéen des années 2000 – , le groupe apparaît dans la série Charmed pour interpréter ce même single en playback et offre un très bon inédit pour Zoolander. Vapor Transmission se vend pourtant moins bien que son prédécesseur. La faute peut-être à une approche moins alléchante pour les adeptes de néo pur et dur. Sur scène, le groupe peine également à retranscrire la somme faramineuse d’éléments qui composent sa musique. Orgy en tirera les leçons pour la suite, en revenant à une compo plus dépouillée. Vapor Transmission restera le disque le plus abouti, riche et passionnant de sa discographie.

2004-2009 : Indépendance, conflits internes et hiatus

De gauche à droite : Shuck, Derakh, Hewitt, Gordon, Haley

A l’issue du succès modéré de Vapor Transmission, qui ne sera jamais distribué en dehors du continent Américain et du Japon, Orgy plaque Elementree / Reprise Records pour monter son propre label indé, D1 Music. La structure est vite vampirisée par Jay Gordon, ce qui ne manquera probablement pas de poser les premiers jalons de la relation conflictuelle naissante entre les musiciens. En studio, le groupe éprouve quelques difficultés à trouver sa ligne directrice. Gordon veut s’orienter vers des sonorités plus rock, alors que Shuck et Derakh souhaitent de leur côté poursuivre les expérimentations électroniques. Le chanteur obtient finalement le dernier mot et Punk Static Paranoïa sort en février 2004. Avec 36 minutes au compteur, le disque semble presque inabouti. Seulement 9 titres, une recherche artistique nettement moins poussée, quelques facilités sur le plan vocal – l’album intègre pour la première fois les screams et le phrasé rap propres au chant néo-metal – : l’album est radicalement éloigné de l’approche expérimentale de son prédécesseur. Reste le talent de composition du groupe, qui permet à ce troisième disque d’aligner un bon paquet de mélodies accrocheuses et de hit-singles potentiels. L’aspect plus commercial de la galette ne changera pourtant rien au déclin de la formation, qui ne parvient pas à intégrer le Billboard #200 et n’écoule que 5000 exemplaires de l’album la première semaine de la sortie. Le clip de « Vague » n’est diffusé sur aucune TV et se limitera à l’époque à une mise à dispo sur les supports internet naissants, dont Myspace. La vidéo multiplie les images de nanas en tenue courte : Shuck semble au moins avoir obtenu le dernier mot sur ce point, lui qui poussera cette obsession du sulfureux avec son futur projet Julien-K. La tournée, limitée aux clubs, ne fait pas grand bruit, et Orgy se met presque logiquement en sommeil à l’issue de celle-ci, non sans avoir livré un premier DVD affreusement cheap – Trans-Global Spectacle, en 2004 –.  Hewitt et Haley disparaissent dans la nature, Gordon se consacre à la production de formations inconnues. Derakh et Shuck poursuivent de leur côté une carrière assez remarquable avec Dead By Sunrise, aux côtés de Chester Bennington de Linkin Park, ainsi que Julien-K. Un excellent projet électro rock assez arty qui prépare aujourd’hui son cinquième album et a pour l’anecdote composé la bande sonore d’un jeu vidéo Transformers. Un éventuel retour d’Orgy est évoqué à quelques occasions, sans que cela ne se concrétise.

2010-2019 : Nouveau line-up, valse des musiciens et errance artistique

Au centre : Gordon. A sa gauche : Bost. Les changements ont été tellement nombreux au cours des dernières années que plus personne ne sait dire qui sont les autres musiciens.

Ryan Shuck et Amir Derakh mettent fin au suspense en octobre 2010 : Orgy est bien sur le retour, mais sans eux. Jay Gordon a pris la décision de réactiver le groupe en se constituant sa petite armée de soldats probablement plus obéissants que ses ex-compères. La nouvelle composition du groupe laisse malgré tout planer de bons espoirs : Gordon a en effet recruté les gratteux des très bons Deadsy, Carlton Bost et Ashburn Miller, délivrés de leurs obligations après le malheureux split du groupe. Il faudra pourtant attendre près de deux ans avant que ce Orgy 2.0 ne délivre du nouveau son avec le stand-alone « Grime of the Century ». Le morceau n’est pas dingue, mais reste agréable. Gordon et ses sbires ne prennent aucun risque en tricotant une compo dans la veine de Punk Static Paranoïa, sur laquelle le chant se taille un beau refrain. Le groupe reprend la route et parviendra sans peine à enchaîner les tournées au cours des 6 années qui vont suivre. Côté écriture et line-up, c’est une autre histoire. Gordon use entre 2012 et 2019 un stock assez impressionnant de musiciens  – 5 batteurs en 8 ans ! – et ne tient à aucun moment ses engagements en ce qui concerne la sortie d’un hypothétique quatrième album. Probablement inspiré par les réussites de Julien-K en matière de financement participatif, Orgy se lance dans l’aventure mais échoue lamentablement à attendre son objectif : seulement 8700 dollars seront collectés sur les 91 000 envisagés. Outch.

Un EP sort malgré tout en 2015 sous le titre de Talk Sick, une nouvelle fois via la structure D1 Music. Le disque est catastrophique. Alors qu’il avait catégoriquement refusé les arrangements électroniques de Shuck et Derakh dix ans auparavant, Gordon s’engouffre dans le genre comme un bourrin. Loin de l’équilibre raffiné d’un Julien-K, la musique d’Orgy multiplie désormais les boom-boom techno immondes, et n’avance même pas des refrains bien troussés pour compenser. Seul le single « Wide Awake and Dead », assez impeccable, est à extraire de cette mélasse qui tente de se la jouer moderne mais s’avère incroyablement has-been. Un second EP est annoncé dans la foulée, puis repensé sous la forme d’un album. Si son titre – Entropy – est connu depuis plusieurs années, le groupe semble à l’arrêt niveau créatif, malgré un nouveau stand-alone single, « Army to your Party », publié au début de l’été 2017. Un titre de bonne facture qui laisse malgré tout espérer un éventuel réveil. Affaire à suivre ?

Discographie :

1998 : Candy Ass
2001 : Vapor Transmission
2004 : Punk Static Paranoïa
2004 : Trans-Global Spectacle (DVD)
2012 : Grime of the Century (stand-alone single)
2015 : Talk Sick (EP)
2017 : Army to your Party (stand-alone single)

Prochain dossier : Cold.

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