Etrangement, les formations hardcores mélodique les plus reconnues à l'heure actuelle ne sont pourtant pas les plus représentatives des qualités que l'on peut trouver en creusant un peu dans la foultitude de groupes émanant du mouvement depuis quelques années. Activistes sonores depuis 2002 et originaires de l'état du Wisconsin, Misery Signals se situe sous la couche populaire et ne concèdera de nouveau à aucun compromis pour en sortir, malgré une signature sur l'un des labels référence du hardcore.
Si ce second opus, qui vient faire suite à Of Malice ainsi qu'à un EP qui n'aura jamais été distribué en dehors des frontières américaines, aura bénéficié de moyens nettement plus conséquents que les productions antérieures, Misery Signals ne change en rien sa ligne de conduite. Totalement détaché de la scène metalcore américaine en partie estampillée Roadrunner, le quintet en intègre néanmoins quelques éléments aux encornures, mais fait par ailleurs preuve dans sa musique d'une dose de hardcore massive et nettement plus corsée que ses adversaires, quitte à laisser quelques auditeurs ainsi que médias et autres réseaux radiophoniques sur le carreau. Alternant les rythmiques relevées grâce à l'apport d'une batterie énervée comme il se doit, la musique se veut toujours aussi virulente et violement matraquée que par le passé, notamment par des choix visant à préférer les attaques de riffs incisives plutôt que les effets de distorsions ou autres solos à rallonge ("Face Yourself », qui vient ouvrir Mirrors sans mise en bouche pompeuse). Le travail opéré au niveau des jeux de guitare du doublé gagnant Ryan Morgan / Stuart Ross reste d'ailleurs plus qu'impressionnant, chacun des deux musiciens n'hésitant pas à se détacher de son collègue de travail. Radicalement opposé à l'attitude de certaines formations (en particulier dans le milieu neo) ou la présence de deux musiciens derrière le même instrument se révèle particulièrement inutile, Misery Signals ponctue ses instrumentations de deux lignes bien distinctes, l'un des deux compères martelant une série de riffs doublés par la section rythmique pendant que le second livre une véritable démonstration technique, saisissant au vol des séries de notes perchées dans les aigues (« Anchor », « Something Was Always Missing, But It Was Never You ») qui amèneront une dimension mélodique qui facilitera l'accès à l'ensemble. Sans se perdre dans des ossatures à rallonges complètement déstructurées, les musiciens bâtissent des fondations suffisamment originales et variées pour convaincre, notamment grâce à leur capacité à varier les ambiances.
Car si ces onze nouveaux morceaux présentent avant tout un goût prononcé pour les atmosphères saturées de hargne, ceux-ci savent également inclure entre deux attaques frontales une court pont plus aérien qui laisse retomber la pression le temps d'une courte respiration de quelques instants (« An Offering To The Insatiable Sons Of God », « Reverence Lost » ou encore l'intervention surprenante de Patrick Stump de Fall Out Boy sur « One Day I'll Stay Home »). Le son concocté par Ben Schigel, notamment reconnu pour son travail sur les derniers opus de Chimaira ou Walls Of Jericho, vient apporter la puissance nécessaire à un ensemble sans faille baigné dans l'acier trempé. Musicalement hautement efficace et sans réelles révolutions depuis Of Malice, le départ du vocaliste Jesse Zaraska vers d'autres horizons avait de quoi inquiéter. Karl Schubach vient apporter la réponse aux questions en une petite poignée de secondes. Les hurlements arrachés et issus du fond des tripes (« The Failsafe », « Mirrors », qui vient s’étendre sur près de huit minutes) ne laissent qu'une place insignifiante aux mélodies, même si celui-ci use par moment de quelques tirades parlées (« Migrate », l'un des premier morceaux de spoken words hardcore). Relativement rare dans le registre de son prédécesseur, le chant clair devient avec Schubach une véritable denrée rare, son absence ne nuisant néanmoins aucunement à la très grande qualité de ses interventions.
Indiscutablement, Misery Signals intègre la sphère très privée des groupes qui tirent la scène Américaine vers le haut. Dommage que l'attention du grand public ne soit que trop rarement accaparée par des formations aussi talentueuses.
.: Tracklist :.
01. Face Yourself
02. The Failsafe
03. Post Collapse
04. Migrate
05. One Day I'll Stay Home
06. Something Was Always Missing, But It Was Never You
07. Reverence Lost
08. Sword Of Eyes
09. An Offering To The Insatiable Sons Of God (Butcher)
10. Anchor
11. Mirrors