On connaissait le penchant plus que prononcé de Ferret Music pour les formations hardcore, mais avec Heavy Heavy Low Low, le label propose son produit de loin le plus barré. Formé au début de l'année 2004, le quintet signe avec Everything's Watched, Everyone's Watching son tout premier essai, un disque d'une très grande complexité qui nécessitera de nombreuses semaines, voire de nombreux mois pour être décrypté dans son intégralité.
Le nom plus qu'étrange dont ce sont affublés les Californiens ainsi que les titres des morceaux à rallonge impossible à mémoriser annonçaient clairement la couleur. Heavy Heavy Low Low ne fait pas dans la simplicité ni dans l'exploitable en radios. Le succès auprès du grand public, ils semblent s'en moquer comme de leur première couche, tant ce premier opus ne met volontairement aucune chance de son coté pour l'atteindre. Car si dans l'idée Everything's Watched, Everyone's Watching pourrait vaguement se rapprocher d'un Dillinger Escape Plan, Starkweather ou même de Ephel Duath, cet opus ne rassemble à rien de véritablement disponible sur le marché à l'heure actuelle. Les structures sont bien souvent totalement incompréhensibles, sans couplet ni refrain, tournant en moyenne autour de la minute trente (« This Is Really Testing The Patience I've Never Had » ne dépassera même pas les quarante secondes), les morceaux étant de plus collés les uns derrière les autres à tel point que l'on ne saisit que difficilement que l'on a sauté à la plage suivante. Seulement vingt deux minutes au compteur, mais pourtant et malgré la courte durée de chaque composition, Heavy Heavy Low Low n'a rien à raccrocher au mouvement grindcore. La batterie bastonne frénétiquement, les tirades de guitares partent un peu dans tous les sens, accélèrent, se taisent histoire de laisser la basse s'exprimer deux secondes chronomètre en main (« Mall-Nutrition »), avant d'avancer un riff lourd et pesant qui n'a presque plus rien à voir avec le début du morceau.
Inutile de penser trouver une accroche plus évidente dans le chant de Robbie Smith. L'habillement vocal se veut tout aussi aliéné. Les hurlements sont assénés avec la même envie de dérouter, ce qui se trouve être parfaitement réussi si tel était l'objectif premier recherché par Heavy Heavy Low Low. Beuglements plaintifs, susurrements ou hoquets de rage incontrôlables, le frontman explose, suivant les pérégrinations de ces collègues avec la même folie furieuse (« Eating The Porridge And Killing The Bears », « I Forgot 2 And A Half Days »). Complètement déjanté, ce Everything's Watched, Everyone's Watching est comme éructé violement de l'esprit de chacun des cinq musiciens et donne l'impression d'avoir été enregistré d'une traite, sans y avoir réfléchi préalablement. Et pourtant, on devine aisément que le résultat n'a pas été obtenu au cours d'un pétage de plombs intégral, tant l'ensemble se laisse écouter sans que l'on puisse clairement l'expliquer. La courte durée n'y est sans doute pas étrangère, ainsi que la multiplicité des ambiances. Le groupe se permet en effet l'incorporation d'éléments jazzy (cela n'étant néanmoins pas aussi omniprésent que chez Ephel Duath) qui ne manquent pas de créer la surprise (« Buddy, You're Makin' No Sense »). La conclusion est quant à elle acoustique, mais parvient néanmoins à conserver parvient l'esprit de l'album, ce grain particulier qui fait de Heavy Heavy Low Low un groupe résolument à part.
Original certes, recommandable, difficile à dire. Mieux vaudrait se faire une idée par soi-même, tant Everything's Watched, Everyone's Watching se montre particulier. Le plus étrange pourrait venir du fait que malgré la présence ineffaçable de l'incompréhension, on garde l'envie de relancer le disque au début…
.: Tracklist :.
01. This Is Really Testing The Patience I’ve Never Had
02. A, S, V, L, N
03. Mall-Nutrition
04. Are You Okay, Kiddo ?
05. I Forgot 2 And A Half Days
06. Texas Chainsaw Mascer-uh
07. Kids, Kids, Kids
08. Buddy, You're Makin' No Sense
09. Theres A Bat
10. Eating The Porridge And Killing The Bears
11. Party Girls