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Interview du groupe de hardcore Forest in Blood qui fait son grand retour 20 ans après ses débuts

Le 7 décembre au Black Dog (Paris), Nech et Barth, respectivement batteur et guitariste du groupe de hardcore Forest in Blood, sont venus présenter Pirates, leur dernier opus.

Vous faites partie du line-up d’origine du groupe ? Si non, à quel moment avez-vous rejoint le groupe ?
Barth : je fais partie du line-up d’origine.
Nech : moi je vais sur mes huit ans.
Barth : mais il était là déjà au début !
Nech : je suis le roadie depuis des années qui a grimpé les échelons (rires). En fait on était tous potes depuis tellement d’années que ça s’est fait naturellement.

Une petite bio rapide du groupe ?
Barth : Le groupe est né en 1998, a sorti un album, beaucoup tourné, puis fin du groupe en 2005 suite à un changement de line-up assez fort, changement de nom et signature sur un gros label hollandais. C’était la fin de Forest mais on est repartis sur une nouvelle histoire avec Apocalypse Now, un autre groupe, on a fait deux albums avec ce label, on avait signé pour trois mais on a arrêté au bout de deux parce que ça nous saoulait. Il restait le noyau dur, Elie le chanteur, moi et Hervé (guitare). Au bout d’un moment on s’est essoufflés.

Qu’est-ce qui a motivé le retour de Forest in Blood ?
Barth : La crise de la quarantaine ! (rires) Le groupe n’était pas arrêté mais en sommeil. On a privilégié notre vie personnelle pendant un temps et puis un ami, Yvan, du groupe Hard Mind, qui organise le Superbowl de Rennes, un festival de hardcore, nous dit « les mecs pour vos vingt ans moi ça me ferait trop kiffer je vous mets sur la date ». On a remonté le truc, on s’est fait trois, quatre répètes avec les vieilles chansons, un mélange de Forest in Blood et Apocalypse Now et on a joué beaucoup de chansons de la première démo du cinq titres pour vraiment marquer les vingt ans. Et quand on arrive au Superbowl, ultra bonne ambiance, les gens connaissaient encore les paroles, il y a quelque chose qui se passe. Au retour, dans le camion, on s’est dit qu’on s’amusait toujours autant et qu’on allait sortir une petite démo pour les vingt ans, un quatre titres, c’était en avril de cette année, et le quatre titres est devenu un album parce qu’on avait tous de l’énergie à revendre qui nous démangeait depuis pas mal de temps.

Comment avez-vous composé Pirates ?
Barth : On s’y est tous mis mais les paroles à 99 % c’est Elie. On a pris Pierre de The Arrs qui venait d’arrêter depuis quelques mois et qui avait la guitare qui le démangeait. Il est arrivé avec deux morceaux. On avait déjà écrit ce qu’on voulait faire, on s’est dit on revient, on est un peu des pirates, on va spolier tout le monde, on est le contre-pouvoir, les vieux. Et Pierre avait des compos qui rentraient dans le thème. Moi j’en avais écrit deux, Hervé deux aussi. Et Pierre a dit hors de question de sortir un quatre ou six titres, faut un album. Il nous a fait bosser !
Nech : On a fini le dernier morceau le 10 août, je partais le 13 en vacances, trois semaines au Brésil, je suis revenu pour enregistrer le lendemain. Ils m’avaient envoyé toutes les chansons et à la guerre comme à la guerre, quand t’es aux toilettes t’es assis (rires)
Barth : ça fait au moins 20 minutes par jour !
Nech : et y avait maman qui disait « qu’est ce que tu fais ? » (rires) Ils avaient été briefés, je leur avais dit aucun problème j’enregistre le 4 septembre mais il me faut tout au clic, que tout soit prêt quand j’arrive le jour J.
Barth : on a tout fait en pré-prod pour que ce soit propre
Nech : et je pense que c’est le truc le plus propre qu’on ait tous fait pour l’instant
Barth : oui on était un peu plus rock’n’roll avant !

Vous êtes restés combien de temps en studio ?
Nech : deux semaines, c’est long et court à la fois.
Barth : Beaucoup d’arrangements ont été faits pendant ces deux semaines. Francis Caste est un arrangeur aussi et il apporte toujours beaucoup, c’est pour ça qu’on va chez lui.

Revenons à l’album, alors que vos textes sont en anglais, quelques titres sont en français, pourquoi ?
Barth : le nom de l’album c’est Pirates et les pirates étaient français. Tous ceux qui font du metal, du hardcore c’est des pirates. C’est de la contre-culture, du contre-pouvoir. Les pirates s’habillaient avec exubérance juste pour faire peur à l’ennemi et les gens déposaient les armes. C’est clairement ce qu’on fait depuis vingt ans et ce que tous les gens qui écoutent cette musique là font depuis vingt ans. D’ailleurs c’est un très grand imaginaire, même quand on va au Hellfest y a des drapeaux pirate partout. On s’est dit c’est nous en fait. Bizarrement on n’en a jamais parlé, on parlait de trucs de société mais on s’est dit que fondamentalement on était des pirates, on est contre l’establishment etc. ça a découlé sur une création artistique assez intéressante, la mer, la solitude, la manière de composer, c’est pour ça qu’il y a beaucoup de ternaires, des dissonances, on a essayé de créer cette atmosphère là sur tous les morceaux pour donner cette impression de partir en mer et partir à l’aventure, partir face à soi même. Et ça a créé cet album et je pense que l’avoir fait très rapidement a été encore plus marquant parce que si on avait fait ça sur un an et demi on aurait peut-être perdu l’essentiel.
Nech : je pense que c’est ça aussi qui a fait qu’on a pu le faire rapidement et surtout on a tous mis notre petit orgueil de côté, parce que quand t’es musicien tu te dis toujours j’ai envie absolument de ce truc mais non, chacun s’est mis à l’écoute de l’autre et c’est aussi pour ça que les choses ont été très efficaces quasiment instantanément. Forcément tu as toujours un moment où tu modifies quelques parties mais ça c’est logique. En tout cas moi, de tous les albums que j’ai fait, je pense que c’est le meilleur projet pour l’instant. Ça fait presque orgueilleux de le dire mais je suis très très fier de ce qu’on a réussi à sortir.

Pourquoi ce choix de « Legacy » comme premier single ?
Barth : Hervé te dirait que c’est un peu la représentation de l’album, moi je l’aime, je trouve qu’il sonne super bien, les paroles sont intéressantes, on est sur la mythologie pas sur des choses concrètes et puis ce titre a quelque chose. D’ailleurs ce morceau a été écrit en grande partie par Pierre et c’est aussi un moyen de lui montrer qu’on est supers contents qu’il soit chez nous, il écrit bien ce petit bâtard ! (rires)

La pause musicale 1518, ça correspond à quoi ?
Barth : c’est la mort de Barberousse
Nech : ou, tu peux choisir, la date de naissance d’Hervé, au choix ! (rires)

Les petites pauses ont un rapport avec l’histoire ? C’est un concept album ?
Nech : oui, ça fait un peu le lien entre tous les morceaux
Barth : Avec les nouvelles méthodes d’écoute, en général on prend ce qu’on aime etc mais moi j’écoute certains albums de Mastodon ou autres et je me laisse transporter, je suis peut-être de la vieille école mais j’écoute un album en entier parce que ça apporte un truc. Avant on faisait des albums où on mettait toutes nos chansons préférées dans un ordre qui collait bien et là on s’est dit qu’on allait transporter la personne. Ça commence avec du black metal, puis ça part sur du trash, après ça descend, ça se calme, ensuite on met des acoustiques et enfin on termine fort avec « Path on the Death ». On aime beaucoup le prog, avec Hervé on écoute Mastodon, Baroness ou même nos potes de Hangman’s Chair, c’est quelque chose qui nous touche. On a toujours les morceaux imposés mais je pense qu’on va aller de plus en plus dans ces choses là, même vers des choses comme « James », c’est-à-dire apporter une couleur un peu différente.

Pourquoi ? c’est une évolution du groupe ?
Barth : parce qu’on aime
Nech : et puis on est cinq dans le groupe et personne n’écoute les mêmes choses.
Barth : quand tu mets cinq gars qui ont le même avis, en fait tu t’emmerdes.
Nech : par exemple, même si je suis à fond metal et hardcore, mes influences pop/folk ont fait que peut-être sur certaines chansons, tu as un truc qui s’ouvre vraiment plus pour accrocher l’oreille des gens et à l’époque on n’avait pas forcément le recul pour faire ça. Barth a des idées sur les ambiances un peu décalées ternaires, ce ne sont pas forcément des choses que j’écoute mais ça influence pour progresser. Si c’est pour stagner dans ce que tu sais faire franchement tu t’emmerdes à terme et d’ailleurs je pense que c’est un peu ça qui avait calmé le groupe. Et puis on n’a plus rien à prouver. Maintenant tu as des groupes qui arrivent, les gamins ont quinze ans et ils jouent comme des dieux, font des solos tu comprends rien, d’où ils sortent ça ? les doigts tu les vois même pas passer ! Toi tu sais que t’as pas forcément le niveau pour le faire mais c’est surtout que tu te dis « est-ce que j’en ai quelque chose à foutre ? ».
Barth : moi je veux apporter autre chose.
Nech : voilà, moi j’ai juste envie que la personne en face remue la tête et passe un bon moment. Je vais faire un solo c’est cool mais est ce que tu as passé un bon moment ? tu as juste regardé mon solo.
Barth : je pense que c’est un peu l’évolution normale, au bout d’un moment tu vas chercher ailleurs d’autres sentiments. J’écoute tout le temps de la musique et j’ai envie d’avoir un album qui me transporte.

« James » c’est un titre que vous pourriez intégrer dans la set-list d’un concert ?
Nech : non. Par contre je ne serais pas contre un jour faire un petit live, six ou sept titres en acoustique.
Barth : pour « James » on s’est dit qu’on ne pouvait pas faire un album pirates sans un titre acoustique, les pirates ne mettaient pas leur ampli orange à donf et puis c’est une histoire sur une idée originale de Nech, le pirate raconte une histoire, ça se joue à l’acoustique, c’est que du ternaire, des dissonances, ça sonne faux c’est pas grave ça fait partie de l’histoire.
Nech : c’est pour ça qu’on chante à trois dessus.

Ça raconte quoi « James » ?
Nech : le gars raconte sa solitude mais dans une imagerie détournée. Il raconte une histoire disant qu’il passe des supers moments quand il est sur la mer et que son meilleur ami c’est sa bouteille de rhum, le Saint-James. J’ai eu toutes ces idées autour de l’imagerie et Barth a réussi à faire un super texte là-dessus et c’était vraiment ça le délire : t’es tout seul mais t’as ton super pote qui te tient compagnie.
Barth : c’est une chanson assez triste parce qu’il se rend compte qu’il ne peut pas s’en passer parce qu’il est seul, qu’il y a le manque, que c’est difficile.
Nech : sa vie virtuelle et sa vie réelle tournent autour de ça.
Barth : ce qui est marrant c’est que tout le monde a chanté dessus sauf moi et Hervé, parce qu’on ne sait vraiment pas chanter et du coup tout le monde se l’est appropriée et ça donne un truc. Et il y a de la cornemuse derrière hein, tout au fond c’est de la cornemuse.
Nech : et j’ai fait quelques roulements de caisse claire. Pour James on n’était pas forcément tous d’accord sur une note qui est un peu trop dissonante
Barth : ouais mais je l’ai gardée, ma mère non plus n’était pas d’accord (rires)
Nech : on comprenait pas trop le pourquoi du comment.

Qu’est ce qu’elle avait cette note ?
Nech : c’est un sol faux
Barth : c’est un sol dièse et pour moi c’est l’essence du morceau, c’est justement parce qu’il y a ces notes là que ça marche
Nech : la chanson se tient donc il n’a pas eu beaucoup de mal à nous convaincre

Votre album est en libre écoute sur internet. Pourquoi cette démarche ?
Barth : on ne fait pas ça pour gagner de la thune, c’est pas notre objectif, on a tous du boulot, on s’en sort plus ou moins bien. On n’a sorti que 200 albums à la vente qui sont packagés, faits par Denis Dreux un artiste. C’est tout un concept, on voulait un beau produit, un bel enregistrement, marquer le coup. Pour nous c’est sortir un beau truc et c’est un peu la madeleine de Proust pour tous ceux qui nous ont suivis et supportés pendant ces dix années il y a vingt ans. On s’est dit de toutes façons les Cd ça se vend pas nous ce qu’on veut c’est que la musique ait des écoutes, que les gars kiffent, par contre on a fait un beau produit, pris des graphistes qu’on a payés même si ils nous ont fait un super prix parce qu’on est copains mais ils se sont investis, ont réfléchi au concept, on a une graphiste qui a tout remis en œuvre, on a fait bosser tous nos potes, nos parents et Francis Caste, Andrew et Julien et on s’est dit qu’on allait faire juste un truc cool pour nos vingt ans et ceux qui voudront l’acheter l’achèteront. Je crois qu’on en a déjà vendu la moitié et il n’ y en aura pas d’autres et même s’il devait y avoir un autre tirage en cas de grosse demande ce ne serait pas ces 200 là. Ils sont uniques. C’est un petit bout de nous tout simplement. On va sortir l’album en vinyle en 2019, en petite quantité également.

Et la suite ? Vous vous êtes fait plaisir pour les vingt ans. L’aventure s’arrête là ou vous continuez ?
Barth : nous on fait des quinquennats
Nech : on est repartis pour cinq ans va falloir nous subir (rires)
Barth : à 45 on arrête, on refera une pause de dix ans !
Nech : Hervé a raconté une bonne blague tout à l’heure mais en fait c’est un peu ça. Tant qu’on n’aura pas fait tous les festivals de France et d’Europe, faudra nous subir.
Barth : donc si on veut se débarrasser de nous rapidement c’est facile, faut nous faire jouer toute l’année et on vous fout la paix. Non mais là on veut essayer de marquer le coup, on a pris un énorme plaisir à faire cet album et c’est hors de question de s’arrêter là-dessus, on a déjà des idées pour la suite.

Le mot de la fin ?
Barth : punk is not dead et hardcore still live (rires)

Un très grand merci à Barth, Nech et Roger de Replica !

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