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Entretien avec Emilie, organisatrice du festival Les nuits des Arènes dont la 5e édition se tiendra du 13 au 16 juin aux Arènes de Lutèce à Paris.

Du 13 au 16 juin 2019, les Arènes de Lutèce ouvriront leurs portes pour 4 jours de spectacles, de débats, de partage et de fête !

Vendredi dernier, Vacarm a rencontré Emilie, l’organisatrice de ce festival pas comme les autres, pour une interview à deux semaines de l’événement.

Comment te sens-tu à moins de deux semaines de l’événement ?
On se sent bien. C’est un peu particulier cette année parce qu’on n’avait pas l’habitude du mois de juin. Les précédentes éditions ont eu lieu en septembre et on avait les mois d’été, plus calmes, pour pouvoir travailler. Cette année c’est venu vraiment comme un train à grande vitesse. Traditionnellement on prenait des vacances en amont. On ne les a pas prises. Donc on est un peu plus fatigués que d’habitude, mais on a été sur le coup tout le temps donc d’une certaine manière, on est plus sereins. Avec cette fatigue, tu ne stresses pas, tu fais ce qu’il y a à faire et tu ne te poses pas trop de questions.

Pourquoi ce changement de dates ?
Parce que c’est un festival qu’on construit avec la jeunesse. L’idée c’est de donner la parole à la jeunesse et on se retrouvait début septembre avant la rentrée des classes, avant la rentrée des étudiants, donc avec certes les jeunes du collectif mais aucune possibilité de faire des partenariats avec des écoles, des lycées, des étudiants, aucune possibilité d’avoir ces jeunes-là qui participent activement. Le 2e problème c’est que communiquer fin août, Il n’y a pas grand monde, c’est plus difficile. Et la 3ème raison, c’est aussi qu’on s’est dit qu’il y aurait plus de monde en juin.

Quelle est la jauge maxi du festival ?
Il n’y a pas une jauge imposée. Les Arènes de Lutèce, c’est un lieu très vaste. Jusqu’à présent, on a demandé à être autorisés sur la base d’une jauge de 700 personnes maximum. Il pourrait sans doute y en avoir plus, mais il faudrait mettre en place des contrôles supplémentaires, ce qu’on n’a pas envie de faire à ce stade. Pour les spectacles assis, en général, la jauge est plutôt autour de 400/500 personnes.

Les pré-réservations sont encourageantes ?
Ce n’est pas terrible. Il n’a pas fait beau. Quand c’était en septembre, les gens étaient déjà dans l’été, ils avaient eu la fête de la musique, la chaleur, ils réservaient à partir de la mi-juin. A mon avis, on n’est pas dans les mêmes pratiques qu’en septembre et c’est compliqué à appréhender. On pense que ça va beaucoup dépendre du temps.

Vous seriez prêts à changer de site si le nombre de spectateurs augmentait ?
La question du site se pose parce qu’on a eu des problèmes cette année. On devait faire cinq jours dans les Arènes de Lutèce, mais, comme partout à Paris, les riverains sont sensibles au bruit. A cause de ça, on a eu un gros couac d’organisation. Depuis cinq ans, on a les autorisations sans problème et cette année la mairie du 5e n’a pas voulu que l’on fasse cinq jours dans les Arènes. On peut comprendre. Cette année on a organisé une édition essentiellement musicale. On a une position intermédiaire qui est de comprendre qu’on puisse limiter les nuisances, mais en même temps il faut faire attention parce que c’est un lieu qui doit rester vivant avec des événements qui le valorisent. Pour répondre à ta question, les nuisances sonores pourraient nous conduire à changer de lieu avant même d’avoir à changer de lieu pour des raisons de jauge.

J’avais l’intention de te demander justement pourquoi les arènes n’étaient pas plus exploitées. J’ai la réponse. C’est dommage, je viens du sud et, toute proportions gardées, pour avoir assisté à des concerts aux arènes de Fréjus ou de Nîmes, ce sont des lieux magiques, on ne ressent pas du tout la même chose que dans une salle.
Exactement. Il n’y a aucune grande ville qui n’utilise pas ses Arènes. Donc on se bat pour que les Arènes restent un lieu spectaculaire, ce qui a d’ailleurs été voté par les habitants du 5ème arrondissement dans le cadre du budget participatif en 2018. 

Organiser ce festival, c’est le travail d’une année ? 
Oui on travaille toute l’année dessus. On est obligés pour faire quelque chose d’ambitieux, pour le faire grandir. C’est un peu compliqué parce que la réalité c’est qu’on est soutenus mais sur des montants qui ne nous permettent pas de nous rémunérer, donc ça c’est une autre des raisons pour lesquelles on risque de devoir arrêter. La mise en état de marche, la transformation de ce lieu en lieu de spectacle, ça coûte de l’argent, à peu près 5 000 euros par jour. Si on ajoute les cachets des artistes, et le prix de la communication, … S’il faut payer un ou deux salaires en plus c’est impossible. Pour qu’un festival comme ça existe, il faut une volonté politique importante. Aujourd’hui on est soutenus, notamment par la mairie de Paris et la région Ile-de-France, mais sur des sommes insuffisantes. On ne sait pas ce qui va se passer. Cette 5e édition, c’est la meilleure qu’on ait produite en terme de programmation, car on a réussi à concilier des spectacles populaires avec des spectacles pointus dans de nombreuses disciplines artistiques. Pour moi c’est vraiment l’édition la plus aboutie, mais on n’a pas les moyens de le faire savoir. C’est vrai qu’on a choisi de mettre l’argent dans la programmation et de faire la communication comme on pouvait. C’est un choix très risqué mais notre priorité c’était de produire une édition dont on pourrait être extrêmement fiers.

Comment choisissez-vous les pièces et les artistes qui se produisent au festival ? La pièce Matériaux réfractaires par exemple a-t-elle été écrite spécialement pour le festival ?
Matériaux réfractaires, c’est spécial parce que c’est la présentation du travail de lycéens. Avec le changement de dates, c’est la première année qu’on fait des partenariats avec les jeunes. On est entré en contact avec eux assez tard, fin janvier. Ils avaient déjà leur projet théâtral de l’année. Donc cette année, nous ne sommes pas commanditaires.

Les spectacles abordent tous des questions sociétales. Nous sommes assez nombreux à proposer, nous discutons beaucoup et donc la programmation est un reflet du collectif.

Le festival a pour projet de nouer de véritables compagnonnages avec les artistes qui s’y produisent. Tu peux m’en dire un peu plus ?
Par exemple, l’artiste Aline César. Lors de la première édition, elle chantait en intermède des débats ; Pendant la 2e édition, elle a joué son spectacle, « Dérive », au Petit Bain, et pour cette 5ème édition, elle vient jouer une adaptation jeune public d’un autre spectacle, « Oroonoko, le prince esclave », ça c’est un compagnonnage. Guillaume Meurice ça pourrait être un compagnonnage. Mais il est tellement booké qu’on a du mal à le faire revenir mais on espère que ça arrivera. On essaie de tisser des liens avec des artistes qu’on aime bien.

Vous dites que le festival a été spécialement conçu pour appréhender les enjeux sociétaux de notre temps, en privilégiant l’humour, la réflexion, et l’esthétique, en y insufflant peut-être un peu de révolte ! qu’entends-tu par un peu de révolte ?
Un peu de révolte par rapport aux questions de société. Là on parle de l’environnement, les jeunes du collectif sont quand même un peu révoltés par rapport à ce qui se passe actuellement, les prises de conscience sont sévères.

Le choix du programme des débats exclusivement tourné vers les questions environnementales, c’était une évidence ?  
Cette année, oui. L’année dernière, nous étions sur la liberté de manifester et celle d’avant sur l’accueil des migrants. Nous abordons les sujets qui suscitent collectivement un peu de révolte.

Est-ce qu’un festival comme celui-là, dans le 5e arrondissement, ne touche pas qu’une catégorie de personnes, des CSP+ parisiens ?
Le festival touche, en effet, les CSP+, mais il y a quand même des gens plus modestes qui habitent à proximité, beaucoup de gamins qui fréquentent les Arènes de Lutèce, qui ne sont pas au lycée Henri IV ou Louis Le Grand. Dans le collectif, nous avons des jeunes issus de tous les milieux. Nous avons des partenariats avec des structures jeunesses situés dans les quartiers politique de la ville qui nous permettent de toucher des jeunes en insertion. Nous communiquons via les réseaux sociaux, ce qui permet également de toucher une audience plus large. Bien évidemment, le choix de la programmation a un impact là-dessus.

Avec ce festival vous avez l’ambition de vouloir “Inventer ensemble une nouvelle manière d’envisager les problématiques de société”, comment cette ambition peut-elle être prolongée au-delà du festival ?  
Nous organisons régulièrement des débats de société à l’occasion desquels le public prend la parole au même titre que les intervenants choisis pour leur ouverture et leur capacité à dialoguer.

Quelle est la partie la plus délicate de l’organisation ?
Je pense que c’est la programmation le plus difficile. Réussir à avoir les artistes qu’on veut avec de telles contraintes budgétaires. Ce qui est compliqué aussi c’est de réussir à monter un évènement aussi ambitieux, sans salarié permanent. Les personnes sont en service civique et restent huit mois, donc il faut former des gens tous les huit mois et c’est épuisant. Il faut reconstruire avec quelqu’un de nouveau, qui ne connaît pas l’historique, à qui il faut tout réexpliquer. Nous avons fait quelque chose qui est impossible. Vraiment. Si nous voulons que ça dure, ça ne peut pas rester aussi difficile, il faut réussir à alléger les contraintes.

Un grand merci à Emilie de Nadjastream ainsi qu’à Romane de Shaker pour cet échange !

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