Genre autrefois réservé à l’élite musicale, caractérisé par une technique au dessus de la moyenne et ancré au sein du mouvement psychédélique dans les années 60/70, le rock progressif popularisé et magnifié par Pink Floyd ou King Crimson a fait de nombreux émules sur la scène musicale actuelle. The Daedalus Spirit Orchestra, jeune formation d’Ile-de-France en est un exemple, essayant de s’approprier les codes des maîtres du genre pour créer un univers musical complexe et psychédélique. Ampulla Magnifying est la concrétisation de ce projet ambitieux, qui montre de manière équivoque, toute la difficulté de présenter des morceaux attrayants au sein d’un monde musical obscur et déstructuré, au risque de rester dans la confidentialité de ses créateurs…
Formation composée de cinq musiciens venant de familles musicales variées (du classique au Rock en passant par l’electro et le Jazz), The Daedalus Spirit Orchestra est surtout un groupe articulé autour de Eric Lorcey, multi-instrumentiste émérite de formation classique et œuvrant au sein de divers groupes (dont Tornaod, groupe de Rock celtique progressif et Ajna, Rock métal progressif) qui lui permettent d’assouvir une soif intense de création. C’est une des clés essentielles pour comprendre le style très personnel de The Daedalus Spirit Orchestra, dont l’univers est créé à partir des compositions et improvisations progressives de son principal inspirateur.
L’écoute de ce Ampulla Magnifying met tout de suite en évidence les influences prédominantes du combo: ainsi, dès le premier morceau, et ce jusqu’à la fin, on oscille entre The Mars Volta et King Crimson, avec une voix plutôt aigüe et lancinante à la Radiohead. Si le niveau technique des musiciens et des compositions est évident, un constat flagrant et malheureux s’impose dès le début: la production de cet album est catastrophique, quasiment à tous les niveaux. Son de basse très présent mais sans grain ni relief, son de batterie qui met nos oreilles à l’agonie avec une caisse claire au son métallique affreux, chant qui ne se fond pas avec le reste à cause d’un mix brut raté… On se demande comment un groupe, qui possède un bagage technique et créatif indéniable, peut à ce point passer à côté d’un aspect fondamental du Rock Progressif, à savoir le son, vecteur incontournable si on veut emmener l’auditeur dans un univers ambiant ou planant!
Parti de ce constat, on ne peut que constater l’accumulation de mauvais choix au niveau structurel des morceaux, gâchant ainsi quasiment coup sur coup de très bonnes idées et des mélodies qui pourraient être splendides dans un autre contexte: des longueurs souvent évitables, des transitions entre les différents passages tellement dépouillées qu’elles sont quasiment inexistantes, un morceau Bossa-Nova (« Azucerado ») placé maladroitement au début de l’album qui casse le semblant de dynamique, la reprise de riffs à l’identique sur plusieurs morceaux et l’enchainement des pistes qui, au contraire de donner une impression de continuité de l’album, nous porte à croire que l’on a dû activer maladroitement la fonction repeat du lecteur… Comble de l’histoire: The Daedalus Spirit Ochestra donne le bâton pour se faire battre avec le morceau « Parallel Convergent », très bon titre, plus court et donc plus efficace, prouvant que le groupe est capable de tellement mieux que des titres grandiloquents et au final trop ambitieux. De plus, la voix qui pourrait rendre les morceaux plus tranchants et vivants est trop souvent linéaire et timide ne faisant que renforcer le côté fastidieux et apathique de la plupart des titres.
Même si le Rock progressif et/ou psychédélique est régi par des lois spécifiques qui demandent des morceaux souvent longs et techniques, ils ne rime par forcément avec langueur et ennui, ce qui est malheureusement le cas ici. Desservi par une production désastreuse et un mastering sans dynamique, le gros potentiel musical et technique de The Daedalus Spirit Orchestra souffre d’un manque cruel d’humilité et de cohérence dans ses créations, gâchant l’effet ambiant planant escompté, et au détriment d’une créativité débordante mal employée.
.: Tracklist :.
1. Visper Aiyo
2. Shambles Start an End
3. Azucerado
4. Sloganeering
5. Unrelentigly
6. Crosstalk
7. The Clockwork’s Marching Along
8. Parallel Convergent
9. Askance Relief