All Hope Is Gone. Le titre se voulait-il annonciateur de la déchéance tant annoncée ? Succès médiatique rarement atteint pour un groupe se fendant d’un néo d’une relative brutalité comparé aux masses de formations mélodieusement mièvres, Slipknot a toujours déchaîné les passions. Avec Vol. 3 : The Subliminal Verses, les neuf masqués de l’Iowa avaient présentés une nouvelle facette, désireux d’orienter leurs constructions sonores vers de nouveaux horizons. Et livrant du même coup ce que les détracteurs attendaient : un disque plus posé, pas foncièrement mauvais mais néanmoins en déca de ses prédécesseurs. Classer ce quatrième opus au même rang que ce dernier serait expéditif : Si All Hope Is Gone n’a rien du strict retour aux sources, il tisse cette fois un lien plus évident entre passé et présent.
Probablement trop expéditif, le virage opéré il y a maintenant quatre années avait laissé bon nombre d’adeptes se questionner quand aux véritables intentions du gang masqué. Avec ce quatrième opus, Slipknot ne s’éloigne pourtant pas radicalement des idées présentées par son Vol. 3 : The Subliminal Verses, mais parvient à combiner avec une plus grande maturité ses envies et influences. All Hope Is Gone se montre donc particulièrement hétéroclite, puisque lorsque certaines de ses composantes s’inscriront directement dans l’optique des premiers travaux de Slipknot, d’autres appelleront d’avantage à se rapprocher des dernières expérimentations en dates alors que quelques compositions présenteront des orientations nouvelles. La dimension mélodique n'est de ce fait pas éradiquée, mais parvient à mieux se greffer à l’énergie ainsi qu’à la violence des débuts, qui opère ici un retour en force. A l’instar de son album éponyme, Slipknot se fend d’ailleurs de quelques pépites expéditives, dopées par une production ultra-carrée et sur lesquels seul le transcendant spectre du riff explosif semble planer (l’excellent « Gematria », « All Hope Is Gone », « This Cold Black »). Des morceaux simples et coups de poing, qui pour le coup rappellent avec bonheur l’aspect primitif et jouissif des débuts de par leurs blasts ainsi qu’une double-pédale utilisée sans ménagement. Mais toute la qualité de ce All Hope Is Gone est avant tout de ne pas céder aux demandes des admirateurs de la première heure, et si ces titres s’assurent d’un impact direct de par leur punch, ils se voient judicieusement disséminés au sein de compositions nettement plus riches et aventureuses.
Allier le mélodique à l’efficace sans sentiment de cassure, l’objectif était partiellement manqué sur Vol. 3 : The Subliminal Verses mais se voit aujourd’hui bien mieux mis en forme. Les solos tiennent la route et ne viennent pas s’intercaler dans l’unique but de faire de la démonstration technique inutile (« Dead Memories »). Concis et bien troussés, ils trouvent sur All Hope Is Gone une véritable légitimité. Slipknot se lance même dans un titre bien plus expérimental que d’ordinaire (le très bon « Gehenna »), allongeant considérablement sa structure afin de développer une ambiance lente et glauque matinée d’électroniques qui prendra son envol sur l’un des meilleurs refrains de l’album. Tout n’est cependant pas réussi (l’horrible « Butcher’s Hook », sur lequel les refrains viennent briser toute la dynamique du morceau), mais l’ensemble s’enchaîne enfin de manière bien plus fluide. Probable que l’absence significative de percussions et de samples, ainsi que le jeu moins véloce et plus groovy de Joey Jordison n’y seront pas totalement étranger (« Psychosocial », merveilleux de simplicité et pourtant tellement réussi), mais la cohérence d’All Hope Is Gone passera avant tout par une meilleure utilisation du désormais large spectre vocal de Corey Taylor. Si ce dernier excelle en chant clair depuis son implication dans Stone Sour, conjuguer ce talent à la sauce Slipknot s’était par le passé parfois montré difficile. Moins désireux d’en tartiner l’intégralité des refrains, le frontman fait cette fois un meilleur usage des mélodies et pose même sur bandes quelques refrains mémorables lorsque des ambiances plus apaisées lui laissent le champ libre (« Gehenna », « Psychosocial »). Mais surtout, Taylor ne néglige aucune son puissant potentiel en chant hurlé, qui semble avoir retrouvé de sa superbe et de sa portée.
En faisant exception de l’étrange et inutile ballade acoustique de fin de disque (« Snuff »), All Hope Is Gone se montre varié et comble toutes les attentes. Un brouillon s’avère parfois nécessaire avant d’arriver au résultat escompté, et ce quatrième opus surpasse en tous point son prédécesseur. Meilleure production, ossatures mieux calibrées et plus aventureuses, technique plus affûtée et surtout, une inébranlable volonté d’avancer sans se retourner. Pour un groupe adulé, Slipknot ne se repose a aucun moment sur ses acquis. Le probable secret d’une véritable longévité dans les années à venir ? Sans aucun doute.
.: Tracklist :.
01. Execute
02. Gematria (The Killing Name)
03. Sulfur
04. Psychosocial
05. Dead Memories
06. Vendetta
07. Butcher's Hook
08. Gehenna
09. The Cold Black
10. Wherein Lies Continue
11. Snuff
12. All Hope is Gone