Malgré un rythme de production plutôt soutenu, Letzte Instanz n’est jamais réellement parvenu à s’imposer sur le territoire Français. Probablement en raison d’un chant entièrement en allemand, choix posant des barrières là ou une musique par ailleurs très easy-listenning aurait pu permettre au septet de toucher une large audience. Les Allemands n’ont de plus jamais proposé un travail particulièrement novateur, constante dont témoigne une nouvelle fois ce Schuldig, qui fait suite à une pause acoustique proposée en 2007 avec Das Weisse Lied.
A l’origine, l’approche de la musique proposée par Letzte Instanz avait de quoi surprendre et insuffler un nouveau souffle au sein d’une scène rock gothique enfermée dans ses propres clichés. En superposant un violoncelle et un violon à la formation rock classique, le groupe parvient depuis ses débuts à développer un fort côté mélancolique et mélodique, les deux instruments se montrant très présents dans la composition. La mise en avant de ces renforts de cordes permet de palier à une construction instrumentale par ailleurs très classique, voire parfois monotone lorsque le septet s’aventure dans la ballade éthérée (« Dein Licht »), et apportent une nouvelle fois à Schuldig un certain relief. Les arrangements sont en effet très soignés, chaque composition laissant transparaitre à ce niveau d'une véritable virtuosité technique. Loin de se limiter à de discrets habillages, les deux musiciens imposent en effet les motifs mélodiques les plus intéressants et virevoltants, et marient de façon très travaillée leurs incartades avec l’ambiance goth-rock mélancolique de l’album (« Die Eine », « Mein Engel », le thème de « Flucht Ins Glück »). Malheureusement, la formule a été usitée jusqu’à l'os sur les précédents essais et ne parvient pas à faire de ce sixième opus un disque foncièrement original ou même indispensable dans la propre discographie du groupe.
Letzte Instanz livre cependant un album convenable et globalement entrainant, les sept musiciens s’étant ré-orientés vers des rythmiques plus soutenues que sur leur précédent essai électrique, Wir Sind Gold. Si le groupe n’opère pas dans la démonstration technique, les guitares ont gagnées en consistance, s’adjoignant un son légèrement plus lourd et dispersant sur Schuldig des riffs efficaces relativement absents de leurs derniers travaux (« Mein Engel », un « Komm ! » surprenant par son énergie, « Der Garten »). Si Letzte Instanz a revu les tempos et la saturation à la hausse, le tout conserve néanmoins sa dimension pop et demeure très aisément accessible. La dimension mélodique prégnante imposée par les cordes est en effet renforcée par le chant de Holly, exclusivement tourné vers les lignes clairs. Soyeux et parfaitement juste, son habillage vocal ne témoigne d’aucune baisse de qualité, bien que l’emploi exclusif de l’allemand ne puisse une nouvelle fois présenter un véritable frein à l’écoute. Le frontman parvient cependant grâce à son timbre délicat à amoindrir la « martialité » propre aux intonations de la langue.
Sans s’avérer débordant de créativité, Schuldig se profile incontestablement comme un bon album de Letzte Instanz. Pas de profonde révolution pour le groupe, qui se permet quand même un petit retour à l’efficacité de ses premiers opus. Agréable et travaillé, ce sixième opus se dessinera surement comme une pièce de choix pour les adeptes de rock gothique.
.: Tracklist :.
01. Mea Culpa
02. Mein Engel
03. Flucht Ins Glück
04. Eisherz
05. Traumios
06. Dein Licht
07. Die Eine
08. Vollmond
09. Feuer
10. Mein Leben
11. Der Garten (feat. Aylin Aslim)
12. Komm !
13. Finsternis
14. Wann