La Suisse. C'est marrant ce qui nous vient à l'esprit, à nous, habitants de l'hexagone, quand on évoque ce pays aux contours escarpés. Nos voisins ne seraient-ils connus dans nos contrées uniquement que pour leur production de gruyère, de chocolat, de montres et de couteaux multifonctions lime à ongles – boussole – pince à épiler ? Vous, rockeurs avisés, savez que les Helvètes sont capables aussi bien que quiconque, voire mieux que personne, de nous trouer les tympans, et les exemples que sont Nostromo, Knut et Mumakil le prouvent avec brio. Direction Neuchâtel, ville charmante s'il en est, et qui peut se targuer d'être le berceau des non moins charmants Coït, dont l'album Between the Lines vient de sortir chez Escudero Records. Formé en 2002, le groupe, composé de Arno, Schnidre et Masson, compte bien faire comprendre qu'avec ce deuxième album, il rentre dans la cour des grands en cassant la porte. Et il le réussit plutôt bien…
Allez, on respire, c'est parti pour une petite demi-heure, le tout divisé en seize morceaux. Si vous êtes doués en maths, ça nous fait moins de deux minutes par piste en moyenne, la couleur est annoncée. Après une intro (« Between The Lies »), pas fondamentalement importante, on met les deux pieds dans le plat (disons qu'on se le prend dans la gueule) avec l'évocateur « Be Deaf », qui attaque dès les premières secondes. Et on a affaire à du sérieux, c'est à dire à un mélange bien extrême de hardcore charpenté, de grind pur et simple, avec une petite touche « and Roll » qui ne dénote pas du tout dans l'ensemble. Et tout ce qu'on peut dire, c'est que c'est diablement cohérent et efficace. « Punishement », avec ses 0:59, et « Scapegoat » avec ses 3:30 (le plus long morceau de l'album) maintiennent la pression comme il faut, les suisses ont des choses à dire et ils font en sorte d'être entendus. On peut également relever le niveau de jeu, qui pousse au respect pour une formation encore verte comme celle-ci. Les parties de batterie sont puissantes, les breaks sont techniques à souhait, le tempo est soutenu, c'est le moins que l'on puisse dire, même si Coït sait également ralentir la machine pour certaines compos (pas trop quand même, hein). La guitare et la basse forment un tout cohérent, technique et rapide, rien à dire.
On remarque également que le groupe a choisi de découper un morceau pour en faire une pièce en trois parties, qui répond au doux nom de « Pain In The Ass », lesdites parties étant incorporées séparément dans l'album. A la réécoute, on a beau dire : mis à part la reprise du thème du refrain, on a l'impression d'avoir affaire à trois morceaux différents, qui n'ont de lien que le nom. Effet de style un peu manqué donc, mais les trois pistes répondant à la même logique d'efficacité que le reste de l'album, ça passe sans trop de problèmes. Autre hic : les interludes. Au même titre que l'intro, on se pose la question de leur réelle pertinence artistique (on a affaire à des ambiances créées à partir de bruits, qui ne prennent pas le temps de se développer), elles tombent un peu à l'eau, même si elles remplissent efficacement leur rôle de « pause » entre deux déflagrations sonores. Mais ce n'est qu'un détail, d'autant plus qu'elles ne coupent pas le souffle de l'album par leur nombre. Pour le reste, Le groupe fait son boulot, et le fait bien. Les morceaux courts comme « Duff » ou « The Great Escape » vous ruinent le cerveau sans vous laisser le temps d'avaler une bouffée d'air, tandis que « Agoraphobic » ou « Ambition and Comformity » font place à des ponts oppressants et crasseux, c'est tout ce qu'on aime. On pense en vrac à Converge, aux voisins Mumakil, aux groupes Hardcore East-coast ou à Napalm Death, le tout mixé à la tronçonneuse.
Coït a un bel avenir devant lui, et le prouve avec Between The Lines. Album cohérent, puissant, bien exécuté, percutant, dont les morceaux prendront, nous en sommes convaincus, toute leur puissance en live. Les quelques lacunes ou essais manqués ne sont que broutille et sont pardonnables, le léger manque d'originalité qu'on peut imputer au style développé aussi. Le temps fera évoluer tout ça, et nul doute que Coït arrivera à sa faire une place dans le paysage extrême helvète, français ou européen.
.: Tracklist :.
1. Between The Lies
2. Be Deaf
3. Punishment
4. Scapegoat
5. +110 525 807 33-87
6. Pain In The Ass (Part I)
7. Ambition And Conformity
8. Duff
9. Pain In The Ass (Part II)
10. The Great Escape
11. Can You Just Take Ten…
12. Fire Fest
13. Agoraphobic
14. Between The Lines
15. Comfort
16. Pain In The Ass (Final Part)