La percée internationale du groupe Marillion a commencé avec la sortie de l’album « Misplaced Childhood » en 1985. C’est et ça restera l’album le plus important et le mieux vendu du groupe jusqu’à ce jour. Il inclut les deux singles emblématiques « Kayleigh » et « Lavender ». Avec dix-huit albums dans la besace et surtout le départ du charismatique Fish, le train de Marillion fonce à pleine allure, alimenté par cette indéfectible envie de poursuivre l’aventure. Après trente-cinq années bien tassées, les anglais naviguent désormais sur des eaux tempétueuses, mais totalement maîtrisées, qui lui font ressasser le passé sans se passer du reste. Et regarder devant.
Steve Rothery, le guitariste de Marillion, nous a parlé de « F E A R » (acronyme pour « FUCK EVERYONE AND RUN »), le nouvel album numéro 18, qui est sorti le 23 septembre 2016.
Bonjour Steve. Comment se passe votre visite à Paris ?
Très bien, c’est vraiment une des plus belles villes où nous avons joué. Nous n’avons pas souvent le temps de visiter, comme d’habitude, comme nous sommes en promo en ce moment et que demain nous descendons tout de suite à Madrid.
Vous venez faire la promotion pour votre nouvel album « F E A R », que vous avez en grande partie financé par financement participatif en y impliquant vos fans. Cela vous met-il une pression supplémentaire ?
Pour nous c’est vraiment devenu la manière « normale » de financer nos albums. Nous avons pour ainsi dire utilisé cette méthode pour la plupart de nos albums et cela nous laisse au contraire une très grande liberté. Il n’y a pas de maison de disque qui nous met la pression et qui nous dit ce que nous devons faire. Les fans, qui nous connaissent bien, savent qu’ils ne doivent pas s’attendre à un résultat en particulier. Nous composons toujours pour nous et pas pour les fans.
Comment s’est passé le processus d’écriture et de production ?
Excessivement bien. Nous avons travaillé près de trois ans sur cet album, par intermittences. Nous avons mis plusieurs mois à l’enregistrer en studio car nous avions une idée bien précise de ce que nous voulions. Aussi on avait, comme à chaque album, très peur que ce nouvel album se retrouve piraté sur internet avant sa sortie. Nous avons une relation très particulière avec internet, car nous nous en servons pour le financement et pour garder le contact avec nos fans, mais nous en avons aussi très peur.
On constate différents concepts ou idées sur cet album qui sont définis par les titres « El Dorado », « The Leavers » et « The New Kings ». Peux-tu nous en parler brièvement ?
Oui, toutes les idées ont un point commun : la peur sous toutes ses formes et par tous les moyens, d’où le nom de l’album, que nous avons choisi de définir en acronyme. « El Dorado » parle des personnes obligées de quitter leur maison. Evidemment quand nous avons écrit ses paroles, il n’y avait pas encore vraiment cette crise migratoire telle que nous la connaissons aujourd’hui. C’était très prémonitoire finalement.
« The Leavers » est un sujet plus égoïste, car nous parlons de nous. Nous parlons de nos départs, quand nous allons en tournée et finalement nous parlons de toutes les personnes qui doivent quitter leurs familles à un moment ou l’autre de leur vie. Nous parlons de la nostalgie que nous avons sur la route.
« The New Kings » est probablement la partie la plus colérique de l’album. Nous parlons de l’argent, des médias, du pouvoir en général. C’est un vrai challenge à jouer sur scène car il y a beaucoup de parties avec la guitare. Nous l’avions joué à Barcelona et nous avions eu une « standing ovation » ce soir-là.
Entre ces trois concepts il y a des morceaux qui font le lien. Je pense notamment à « White Paper ». De quoi parle ce morceau ?
Oui, ce morceau fait le lien entre « The Leavers » et « The New Kings ». Nous parlons d’amour dans ce morceau. De comment la peur peut impacter nos relations avec les personnes et notre amour envers quelqu’un. C’est un morceau très personnel qui parle du fait que nous devenons plus vieux et que nous ne sommes plus les centres de l’univers. Les perspectives changent.
Il y a aussi « Living In Fear ». De quoi parle-t-il ?
Lui aussi il fait le lien entre deux parties : « El Dorado » et « The Leavers ». En fait c’est une réflexion très sarcastique sur la richesse, les grandes entreprises, les gouvernements qui pensent régler les problèmes en construisant des barrières ou des murs, qu’ils soient au sens figuré ou non. Nous parlons de l’exploitation des êtres humains.
Un morceau qui représente bien ton humeur du jour, ce serait lequel ?
« The Leavers » je pense, car je suis loin de chez moi en ce moment. De plus, je regarde sans cesse les nouvelles à la télévision concernant le Brexit et ce morceau colle parfaitement à l’actualité. Je me souviens avoir entendu les résultats du référendum sur le Brexit alors que j’étais en Europe à ce moment-là et j’ai tout de suite ressenti une profonde tristesse mais aussi une grande frustration. J’ai pensé au fait que de partir en tournée sera dorénavant beaucoup plus compliqué et toute la bureaucratie que cela allait engendrer.
Enfin ma dernière question rituelle : Beatles ou Rolling Stones et surtout pourquoi ?
Les Beatles sans hésitations. Les Stones ont une super attitude, très rock ‘n’ roll. D’ailleurs le morceau « Brown Sugar » a été un de mes morceaux favoris pendant longtemps. J’aime les Beatles car ils étaient tous de très bons musiciens qui faisaient tout pour mettre la chanson en valeur. Ils ont vraiment changé le cours de l’Histoire et ont eu une influence sur de nombreux artistes.
Ils seront en tournée ici: