L’Ep Pop de Chambre nous laissait présager de belles choses pour le jeune trio Revolver. Plusieurs mois après ces cinq titres prometteurs, la formation acoustique composée d’ Ambroise Willaume (chant), Christophe Musset (Guitare) et Jérémie Arcache (violoncelle) revient faire grand bruit avec leur tout premier opus Music For A While. Désormais, ils ne se cachent plus derrière des têtes de chatons comme nous pouvions le voir sur Pop de Chambre. Là, ils s’affichent pleinement sur l’artwork de leur magnifique Music For A While comme pour passer de l’ombre à la lumière. La lumière des feux de la rampe, ils la connaissent depuis qu’ils ont quitté le chemin du studio pour prendre la route des concerts. Le jeune trio était en ce mois de novembre 2009 de passage à l’Olympic de Nantes en première partie de Patrick Watson. Après leur concert, nous rencontrons Revolver dans les loges de la salle pour discuter de leur tout premier opus disponible depuis Juin 2009.
Hervé: Pouvez vous faire une petite présentation du groupe pour ceux qui ne connaissent pas encore la pop de Revolver ?
Ambroise : La pop de Revolver c’est trois harmonies, trois chanteurs, deux guitares, un violoncelle et l’on peut rajouter une batterie lorsque nous sommes sur scène. C’est beaucoup d’harmonies vocales, des mélodies, des chansons folk mais avec des moments rock.
Hervé : Pouvez vous expliquer la genèse de Revolver ?
Ambroise : Christophe et moi on s’est rencontré au lycée. On a fait de la guitare ensemble pendant cette période puis nous avons commencé à écrire des chansons. Par contre avec Jérémy, on s’est rencontré à l’âge de 6 ans à la Maitrise de Notre Dame de Paris. On faisait de la musique classique quand nous étions petits puis nous nous sommes retrouvés plus tard pour qu’il nous rejoigne dans le groupe au moment où nous allions enregistrer une maquette.{multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Hervé : Est ce que Revolver est votre première expérience musicale ?
Ambroise : Non. Avec Jérémie nous faisions de la musique classique donc c’est notre première expérience musicale et avec Christophe nous n’avions pas vraiment de groupe mais nous faisions de petits concerts dans des bars où l’on s’amusait à faire des reprises.
Christophe : Pour moi, ma première expérience musicale a été Mark Knopfler.
Hervé : En tant que musicien ?
Christophe : Oui, car je me suis amusé à reprendre tous ses morceaux lorsque je commençais la guitare dans ma chambre. On peut donc dire que ça a été ma première expérience musicale.
Hervé : Tu préfères Dire Straits ou Mark Knopfler ?
Christophe : Les deux ! Il y a de bonnes choses et de très mauvaises choses dans les deux.
Hervé : Juin 2009, 1er Juin pour être exact, l’aventure musicale de Revolver débute officiellement avec la sortie de votre premier opus Music For A While. Quelles sont les critiques que vous avez pu recevoir sur ce premier album ?
Ambroise : Globalement, nous avons reçu de bonnes critiques. Mais sur toutes ces critiques, nous avons remarqué une note négative qui a été soulignée dans plusieurs articles. Les gens trouvaient que le son était trop propre et trop parfait. Trop parfait, pour moi c’est un compliment et trop propre…
Christophe : Ce n’est pas non plus un défaut. Je ne vois pas le rapport avec le fétichisme du sale ! (Rires !)
Ambroise : Je pense que c’est un album qui est imparfait. Au contraire, je trouve qu’il n’est pas du tout parfait. Il a été réalisé en deux semaines, dans l’urgence mais dans un état d’esprit créatif et prolifique. C’est une étape de notre vie et aujourd’hui nous sommes ailleurs car nous sommes dans le développement de cette étape. On est dans la perfection de notre art et nous n’allons pas nous arrêter tant que nous avons pas fait ce que nous voulions. Tant que nous avons envie de créer des choses différentes nous continuerons dans cette voie.
Hervé : Je voulais savoir au niveau de l’album, est ce que le choix de la tracklist a été difficile ? Vu que vous aviez sorti un EP, le choix des titres aurait pu être difficile si vous vouliez mettre des titres de cet Ep sur l’album. Certains titres ne figurent pas sur Music For A While.
Christophe : C’est le cas, il y a trois titres de l’Ep qui sont à nouveau présents sur l’album.
Hervé : Il y a des chansons de l’Ep qui ne figurent plus dans Music For A While.
Ambroise : En fait, il y a un morceau que l’on a réenregistré qui s’appelle « 2.A.M Bigwish » mais il ne figure pas sur l’album. Un autre morceau a été enregistré « Have You Seen My New Friends » que l’on a également pas inséré dans l’opus. On a juste essayé de faire un tracklist cohérent, équilibré et surprenant. Il se trouvait que « My New Friends » avait du mal a trouver sa place dans cette tracklist et « 2.A.M Bigwish » n’était pas une version radicalement différente par rapport à l’Ep. Du coup, on s’est dit que l’on n’apportait rien de nouveau avec ces morceaux pour l’album.
Hervé : Est ce que le studio utilisé pour Music For A While est le même que pour pop de chambre ?
Ambroise : Pas du tout. Pop de Chambre a été enregistré dans le studio d’un ami tandis que l’album a été réalisé au studio Pigalle qui est un grand studio d’enregistrement sur Paris…
Christophe : Non… Dans la catégorie des grands studios, c’est le petit des grands studios. Le studio Pigalle est très agréable, il est à bonne dimension pour un groupe de trois à quatre personnes. Au delà de cela, je pense qu’il serait un peu petit. Pour un groupe comme Revolver, c’était idéal et parfait. En plus Julien Delfaud avec qui nous avons réalisé Music For A While a été vraiment génial pendant cette période. Pour nous, à ce moment là, c’était la rencontre idéale.
Hervé : Vous connaissiez votre réalisateur avant d’entrer dans le studio pour Music For A While ?
Christophe : On l’avait rencontré quelques mois avant d’enregistrer l’album pour discuter et faire connaissance.
Ambroise : C’était le premier qui nous avait réellement convaincu dans sa vision de la musique. On a rencontré pas mal de gens qui voulaient réaliser l’album, mais ces personnes ne nous avaient pas marquées.
Christophe : Lui, il avait cette touche très moderne car il a travaillé sur des albums de Phoenix, Herman Dune…Il a une vision assez moderne du son et nous ne voulions pas aller dans une émulation vintage, très années 60. Nous ne sommes pas des adeptes du Lo-Fi ou même des bandes avec le coté analogique. Sur l’album, il n’y a pas cette émulation qui vise à rentrer dans une ambiance année 60 et avec ce réalisateur, on a pu trouver ce coté plus frontal dans le son sans obligatoirement avoir de grandes reverbes…
Ambroise : Le coté très propre du son vient surtout du travail de Julien Delfaud car il garde cette touche dans presque tous les albums qu’il réalise…
Christophe : Il suffit d’écouter l’album de Phoenix. Phoenix a un son chirurgical.
Ambroise : Globalement dans le travail de Julien Delfaud, il y a cette recherche d’avoir peu d’éléments mais de bien entendre tous les éléments présents. C’est ce coté propre qui le démarque.
Hervé : Est ce que des collaborations auraient pu être possible sur Music For A While ?
Tous ensemble : Non !
Hervé : Vous ne vouliez pas de collaborations pour votre premier album.
Jérémie : On voulait réellement présenter notre musique au nom de Revolver sans avoir besoin de quelqu’un pour se faire connaître.
Christophe : J’imagine plus des collaborations sur scène avec Sammy Decoster ou avec Mustang. Des gens avec qui nous tournons en live. C’est agréable de reprendre un morceau avec eux sur scène. Après sur un album, on est déjà trois et je ne sais pas si nous avons besoin de quelqu’un en plus qui prendrait le rôle de collaboration. Après s’il y avait un coup de cœur pourquoi pas, on ne reste pas fermé. J’aime bien garder un peu ce coté de faire un délire en duo avec quelqu’un, genre Dylan qui chante avec Johnny Cash. Tu sens qu’ils sont tous les deux un peu bourré, ils font leur musique…c’est très beau mais ca reste le coté « On joue ensemble, on est content et point final ». Essayer d’avoir une grosse prétention en faisant une collaboration, ça ne me plait pas du tout.
Hervé : Il vaut mieux être intéressé par votre musique que par le featuring en lui même.
Christophe : Exactement ! Après je ne suis pas contre du délire de reprendre des choses avec personnes mais je ne veux pas que ce soit un argument commercial. On est trois et l’on essaie de faire quelque chose de bien à trois donc nous pensons que nous n’avons pas besoin d’une quatrième personne.
Hervé : Quels sont les groupes ou artistes qui font aujourd’hui l’identité musicale de Revolver ?
Ambroise : C’est Revolver qui fait l’identité musicale de Revolver !
Christophe : Alors là sans paraître prétentieux, je ne vois pas d’autres réponses que celle ci.
Hervé : Je voulais savoir quelles étaient vos influences musicales ?
Ambroise : Au moment de la création de l’album, il y avait Vampire Weekend que l’on respectait beaucoup et que l’on respecte toujours autant…
Christophe : Finalement Léonard Cohen nous a plus influencé que Vampire Weekend.
Ambroise : Mustang nous a plus influencé pour les live avec leur coté rock…
Christophe : Même Sammy Decoster !
Ambroise : Mustang m’a beaucoup influencé pour les concerts et la construction d’une identité pendant un show. Pour le disque, je crois que l’on avait vraiment envie de définir la musique de Revolver.
Christophe : Après en ce moment c’est variable, je ne sais pas ce qu’écoute Jérémie en ce moment (Rires !)
Jérémie : Du Mahler, beaucoup de Malher !
Christophe : Il me fait acheter du Malher et du Brahms. Pour ma part, je découvre la branche des folk singers comme Bert Jansch, Davy Graham ou Jackson C Franck que j’ai découvert il n’y a pas longtemps… Après il n’y a aucun rapport entre Jackson C Franck et Malher donc on verra ce que cela va apporter.
Jérémie : On a été marqué avec Ambroise par « This Is It », le film sur Michael Jackson. Il y a beaucoup de choses intéressantes.
Christophe : J’ai très envie de le voir ce film.
Hervé : Je n’ai pas vraiment suivi l’actualité sur ce film. C’est un documentaire sur sa vie personnelle ?
Jérémie : Non, c’est des passages de répétitions de sa tournée qu’il devait faire et c’est assez incroyable. Il avait des musiciens excellents.
Christophe : Justement avec Maxime Garoute, notre batteur sur l’album, on a parlé de ce film. Il y a un passage où l’on voit Michael Jackson lancé un morceau en faisant un signe de main. Il n’y a pas de décompte, seulement un signe de main et tout le monde part au même tempo. Il fait la même chose pour arrêter le morceau, personne s’y attend et tout le monde stoppe sous ses ordres. C’est énorme.
Jérémie : Il faut dire qu’il a un batteur qui possède un excellent niveau.
Christophe : Maxime disait qu’avec Johnny Hallyday c’était le même genre de délire sur scène. Il lève la main et tout le monde doit s’arrêter, peut importe ce que tu fais, tu dois t’arrêter.
Hervé : Tous les titres de ce lumineux Music For A While sont en anglais. Pourquoi attachez vous une grande importance à la langue de Shakespeare ?
Christophe : C’est vraiment une question de style. Pourquoi utiliser une guitare avec des cordes en métal plutôt qu’une guitare avec des cordes en nylons ? Ce n’est pas une question de savoir dans quelle langue nous chantons. Il y a quelque chose dans la musique pop et évidemment que nous voulons utiliser l’anglais car nous avons été formé à l’anglais avec la musique pop. On a découvert la langue anglaise avec Dylan, Lennon… Après dans un registre fétichiste, nous avons peut être envie d’être reconnue par des personnes que l’on écoute et à ce moment là nous allons utiliser l’anglais.
Jérémie : Il y a une question de cohérence artistique car si nous chantions en français nous n’aurions pas du tout les mêmes voix.
Hervé : Aucun titre de Revolver avec des textes en français à l’avenir ?
Christophe : Pour le moment, ce n’est pas d’actualité. Ça pourrait arriver mais ce n’est pas un interdit.
Hervé : La musique classique prend une place importante dans votre vision de la musique et vos compositions ?
Ambroise : Oui ! Dans notre vision de la musique on essaie d’avoir une vision globale de la musique. Qu’elle soit classique, pop ou même du Michael Jackson ou encore celle d’un illustre chef d’orchestre, il y a une espèce de lien entre les grands musiciens, les grands créateurs. Il y a la volonté de dire quelque chose. Je crois que c’est ce que l’on essaie de faire, c’est d’avoir un discours et d’être les meilleurs dans ce discours et dans le fait de défendre quelque chose. Avec Jérémie, la musique classique nous a apporté énormément de bases. Elle a été notre première expérience.
Jérémie : Lorsque l’on fait de la musique et que l’on essaie de se cultiver, on ne nie pas toute l’histoire de la musique que ce soit du classique, de la pop, du baroque…Il y a pleins de compositeurs qui ont existé et ils ont tous voulu faire leur musique. Je trouve que dans la musique, il n’y a rien à négliger.
Hervé : N’était ce pas un peu difficile d’intégrer un batteur pour garder cet esprit de musique épuré de vos compositions ?
Ambroise : C’était difficile de trouver notre ligne directrice. Ce discours que l’on défendait lorsque nous étions trois et que l’on avait pensé et mis au point depuis le départ de Revolver, il fallait le garder en intégrant un batteur. C’était difficile de transposer cette énergie que nous avions à quatre. Un élément comme une batterie change beaucoup de choses. Intégrer une batterie était devenue nécessaire après l’album parce qu’il avait été réalisé avec une batterie mais nous travaillons pour essayer de garder ce discours que nous possédions avant l’arrivée de ce nouvel instrument.
Hervé : Si vous deviez choisir un album qui figure dans votre top 3 ?
Jérémie : Off The Wall, Thriller et Bad.
Christophe : Le deuxième d’Elliot Smith, Niandra Lades de John Frusciante et le White Album des Beatles
Ambroise : Help des Beatles, Either/Or d’Elliot Smith et Nocturnes de Chopin.
Christophe : Je vais en rajouter un quatrième, Blues Run The Game de Jackson C Frank. Ce type possède une telle liberté, tu vois Dylan sur Highway 61 entre le texte et la musique et bien Jackson C Frank possède cette chose évidente. Il peut avoir des paroles très longues avec des changements d’accords sur les paroles. Il a un réel talent cet artiste.
Hervé : Quels seront vos projets pour la suite de Revolver ?
Ambroise : Devenir des bêtes de scène. On y travaille mais ce n’est pas gagné. (Rires !)
Merci Christophe, Ambroise et Jérémie pour avoir répondu à mes questions.