Rennes le 24 Juin 2006, je me rends au festival Piqûres de rappel pour réaliser l'interview du groupe rennais Alee et les nouveau-nés à l'occasion de la sortie de leur dernier album Allons enfants… .Ce festival a lieu chaque année pour la fin de saison musicale du Jardin Moderne, lieu culte dans la région pour son studio d'enregistrement et ses divers évènements autour de la scène musicale rennaise. 18 heures, les balances ont du retard, c'est l'occasion de faire connaissance avec le groupe. Une fois que tout est prêt, Alee (chanteur/guitariste) et Hubert (guitariste) se prêtent au jeu de l'interview.
Hervé : Pour débuter l'interview, histoire de connaître tes débuts dans le milieu musical, est ce que tu pourrais me résumer un peu le chemin que tu as parcouru jusqu'à aujourd'hui ?
Alee : On a tous des parcours différents, chaque membre du groupe a vraiment un parcours différent. Moi j'ai commencé avec un premier groupe qui s'appelait T5A dans les débuts des années 1990, c'était un groupe de rap très classique. Le groupe s'est terminé en 1995-1996 et là j'ai monté les nouveau-nés avec Dj Chap en 1997 avec qui j'ai sorti un maxi en 1999. Ensuite on s'est séparé, moi j'ai continué l'aventure des nouveau-nés. En 2002 j'ai sorti un album, j'ai travaillé avec différentes personnes dont Hubert, Nida. Quand j'ai sorti cet album, In Memoriam en 2002 j'ai commencé à faire des concerts pour défendre l'album et je leur ai proposé de m'accompagner et puis au fur et à mesure des concerts ils ont pris leur place dans le groupe et c'est donc comme cela que s'est formé Alee et les nouveau-nés. Et là, on sort un deuxième album sous le nom d'Alee et les nouveau-nés.
Hubert : Je suis au départ musicien de rock, je faisais de la batterie et puis je me suis mis à la guitare et c'est à ce moment là que j'ai rencontré Alee. Au départ, on a commencé à jouer de plus en plus des morceaux à la guitare tous les deux .Et au fur et à mesure on a rajouté de la basse et de la batterie.
Hervé : Alee et les nouveau-nés n'a donc pas été ta première expérience musicale, est ce que les fans de la première heure de T5A suivent le parcours d'Alee et les nouveau-nés ?
Alee : Oui, toujours. D'ailleurs hier on a fait un concert et il y avait une amie à moi qui s'appelle Caroline qui me connaît depuis mes débuts, depuis T5A qui chantait « Attirer par le vrai » quand on faisait nos concerts lorsque l'on était plus jeune. Hier elle était là et elle chantait nos chansons du nouvel album. Elle me disait qu'elle trouvait cela super le changement qu'il y a pu avoir, musicalement certes, dans la forme ça a changé mais dans le fond elle m'a dit que ça restait à peu près la même chose. Après ça peut décevoir vraiment les puristes du rap, mais comme on dit souvent, je pense que le public que l'on perd en rap, c'est vraiment les moins tolérants, et puis je pense que les plus tolérants comprendront tout à fait le changement. Après tant pis et tant mieux à la limite.
Hervé : Alee, ton deuxième album Allons enfants… est sorti dans les bacs en Avril 2006, quels sont les échos que tu as eu dessus ?
Alee : Pour l'instant, on a de très bon retour. Au départ je me disais, vu que l'album n'est sorti que sur Rennes, les gens nous connaissent donc c'est facile d'avoir de bons retours mais on s'en rend compte aussi quand on va jouer à l'extérieur, dans d'autres villes où on va jouer devant un public où là on ne connaît vraiment personne et que les retombées sont les mêmes. La presse suit, et les radios donc pour l'instant il y a de très bons retours.
Hubert : En plus, on a un public qui est très large en fait, c'est une chance pour nous. Il se trouve que l'on fait de la musique qui nous plait, on ne fait pas cela pour attirer un maximum de public mais il se trouve que l'on a un public de tous les ages, de tous les milieux socioprofessionnels.
Hervé : Comment est apprécié ce nouvel album sur scène ?
Hubert : Depuis hier, on a un nouveau batteur qui s'appelle Sylvain. Le fait d'avoir une batterie cela permet de dynamiser des morceaux qui étaient déjà au départ assez relevés. Sur certains morceaux, il y a des gens qui dansent et puis il y a des morceaux plus calmes, beaucoup plus posés, aux atmosphères beaucoup plus intimes, donc le public réagit différemment et c'est ce qu'il faut. Si l'on compare « le récidiviste » et « On n'a plus le temps », il y a deux atmosphères vraiment différentes.
Alee : Il y aussi le coté surprenant, les gens sont souvent surpris de voir un rappeur avec une guitare, et de s'accompagner à la guitare. Mais ça permet de toucher un peu plus de gens, ça casse un peu plus les clichés, et le fait aussi que chaque membre du groupe a un parcours différent avec des influences différentes. Chacun apporte un peu sa touche, sa couleur, ce qui donne sur scène quelque chose de très variés. C'est vrai que ça nous ouvre pleins de portes et sur scène ça se ressent beaucoup.
Hervé : Le titre de cet opus est Allons enfants… , c'est aussi un morceau de l'album, pourquoi as-tu fait le choix de mettre ce titre en avant ?
Alee : C'est marrant car c'est le tout dernier morceau de l'album que j'ai écrit. Au départ, on était parti sur huit morceaux et il n'y avait pas Allons enfants. J'ai fais ce morceau par rapport à tout ce qu'il s'est passé fin 2005 dans les banlieues donc c'était pour moi une manière de dire ce que j'avais envie de dire par rapport à tout cela. Dire que le petit enfant d'immigré pouvait aussi se sentir français dans cette société. J'avais envie d'appeler cela Allons enfants pour moi c'était très symbolique. Appeler cet album Allons enfants est lui donner beaucoup plus d'importance. Il y a un moment donné où tu as vraiment envie de dire aux gens que tu es français. Appeler cela « Allons enfants » et puis d'avoir la petite tête d'arabe sur la pochette c'est symbolique. Ce qui est marrant, c'est que dans le groupe on a tous des origines différentes. Par exemple, Hubert, sa mère est vietnamienne, Dany est de la Réunion. Il y a un mélange culturel, ce qui prouve d'une autre manière que même avec nos cultures différentes on peut faire des choses ensemble.
Hervé : Avec le morceau « Allons enfants », voulais-tu faire une nouvelle Marseillaise ?
Alee : (rires !) Oui, c'est ma marseillaise à moi. C'est comme cela que j'ai envie de défendre le pays, surtout aujourd'hui, quand on entend Nicolas Sarkozy qui dit que ceux qui n'aiment pas la France n'ont qu'à la quitter, moi j'ai envie de la défendre de cette manière là. Même s'il y plein de choses qui me dérangent dans la France, ce n'est pas que je n'aime pas la France, c'est que je n'aime pas le gouvernement d'aujourd'hui et puis il y a des choses dans la société d'aujourd'hui que je n'aime pas et que j'ai envie de changer. Avec cette chanson, je le dis à ma manière, c'est comme cela que j'ai envie de changer les choses. Cette chanson, c'est ma marseillaise à moi, c'est sûr !
Hubert : Et puis pour les mélomanes qui sont très attentifs, notre excellent bassiste Dany introduit les premières notes de la Marseillaise, de Rouget De Lisle.
Hervé : Qui sont les nouveau-nés ?
Hubert : Donc il y a Alee au départ, c'est lui le nouveau-né, puis Nida au chant, moi Hubert à la guitare, Dany à la basse, Sylvain à la batterie et Bleuenn à la flûte.
Alee : Le fait d'appeler cela Alee et les nouveau-nés, a permis de laisser une certaine liberté à tout le monde en fait, c'est-à-dire que Hubert par exemple travaille avec un groupe qui s'appelle Norka. Dany a d'autres projets, il travaille avec d'autres artistes. Le fait d'appeler cela Alee et les nouveau-nés est intéressant, c'est-à-dire qu'à des moments donnés chaque membre aussi peut travailler sur d'autres projets différents et que si à un moment je me retrouve tout seul et bien ça s'appellera Alee. Le jour où l'on se retrouve ça s'appelle Alee et les nouveau-nés. Pour moi, c'est très important cette liberté là, on fait partie d'un groupe mais en même temps il ne faut pas que l'on se ferme des portes sur d'autres projets. Parce que c'est très nourrissant de travailler avec d'autres gens, d'aller vers d'autres univers.
Hervé : A la différence de tes autres albums, tu as intégrés des musiciens autour de ton projet musical. Désormais, on peut considérer qu'Alee et les nouveau-nés est un groupe, est ce que ce changement a influencé ton travail de composition ?
Alee : Oui car avant je ne composais pas, c'est la première fois que je compose. Avant la musique sur laquelle je posais mes textes, c'était d'autres personnes qui faisaient de la musique assistée par ordinateurs, donc tout était fait par machines, sur PC, c'était des instruments que je chopais à droite à gauche. Depuis que j'ai commencé à apprendre la guitare, là j'ai commencé à écrire mes chansons, écrire des grilles d'accords. Pour moi, ça à tout changé, ça à changé ma façon d'écrire mes chansons, de les travailler, même de travailler la scène aussi parce qu'il a fallut tout refaire, tout réapprendre. Et puis j'intègre aussi un autre élément que je ne faisais pas avant, c'est que sur certains morceaux je chante alors qu'avant je ne chantais pas du tout. Je n'avais aucune notion de chant donc il a fallu tout retravailler, même si toutes ces années dans le rap, m'ont données beaucoup de bases, j'ai beaucoup appris le métier. Pour moi, je redécouvre la musique et c'est cela qui est très bien dans cette aventure. C'est une renaissance, c'est pour cela que j'aime bien aussi le nom des nouveau-nés. Cela veut dire qu'il faut essayer d'aller vers d'autres choses pour renaître différemment dans la vie.
Hervé : Combien de temps as-tu mis pour écrire les textes de l'album ?
Hubert : Les plus vieilles chansons que l'on entend dans l'album sont «La diferencia», «No Stress» et « Ferme ta Bush», elles datent de 2003. Donc depuis 2003, on a composé plein d'autres chansons et on en a gardées quelques unes pour l'album…
Hervé : Donc, il y a des morceaux en stock ?
Hubert : Oui, il y en a en stock. Il y a trois chansons notamment que l'on joue sur scène qui ne sont pas sur l'album. On les garde pour le prochain.
Hervé : Dans quel studio s'est déroulé la session d'enregistrement ?
Alee : On a fait ça à la maison (rires !). On a fait ça dans ma chambre en fait. Dany a fait toutes les programmations chez lui, ensuite il est venu avec son matériel chez moi. Dans ma chambre on a enregistré les différentes guitares, flûtes, différents instruments. Ensuite, toutes les sessions de voix ont été enregistrées au Passage à Niveaux à Rennes, dans un gros studio, parce que là pour les voix, il nous fallait du matériel plus performant. On a masterisé l'album, chez un pote qui nous a fait cela tranquillement. C'est un album qui s'est fait à la maison, même les photos ont été prises chez moi, au final, c'est un album artisanal (rires !)
Hervé : Combien de temps a durée la prise du son ?
Alee : On a tout fait en deux mois. On a commencé vers la fin décembre (2005) et on a finit début février. Début février, l'album allait au pressage, donc en deux mois on a tout enregistré.
Hervé : Maintenant que l'album Allons enfants est sorti depuis plusieurs mois, y vois tu des défauts ?
Alee : Personnellement, non pas encore…Si je vois des défauts dans les prises de voix parce qu'il faut savoir que je les ai enregistrées en une après-midi. J'ai fait les neuf morceaux d'affilé. Je pense que si j'avais eu beaucoup plus de temps en studio parce que le studio ça coûte assez cher, j'aurais pu être un peu plus exigeant sur certaines choses. Mais dans l'ensemble, je suis plutôt content. Des défauts, je n'en vois pas encore, car pour l'instant c'est trop frais. La sortie se passe tellement bien pour l'instant que je n'arrive pas à avoir un regard critique.
Hubert : En fait, on ne l'écoute pas tant que cela l'album. On a enregistré en 2 mois, mais avant, on a travaillé plusieurs fois les morceaux donc on a pas mal bossé dessus … mais je pense qu'il est pas mal !
Hervé : Quelles sont vos influences musicales ?
Hubert : Je crois que dans le groupe c'est cela qui fait la force des Nouveau-nés, on a chacun des influences musicales bien différentes. Moi personnellement j'écoute aussi bien du rock, classique, Jazz, chanson française. Dany a une grosse influence Funk, musique noire et puis métal, rock. Alee au départ, c'est un rappeur, il vient du rap. Je crois que ce qui nous rejoint c'est notre goût pour la chanson.
Hervé : Alee, pour tes compositions, gardes-tu toujours comme influence première le rap ?
Alee : Oui, toujours. C'est comme cela que je suis venu à écrire des chansons, pour moi, c'est le rap français qui m'a donné envie d'écrire. Je me souviens quand j'étais plus jeune, ce n'est pas la littérature ou les cours de français qui m'ont donnés envie d'écrire, c'est NTM, IAM (rires !) … c'est Solar sur ses débuts. Je n'ai pas du tout envie de lâcher ce coté là. Même si plus tard j'ai découvert d'autres artistes comme Tété, Bénabar ou même Renaud que j'écoutais quand j'étais très jeune. Il m'a beaucoup influencé dans l'écriture, même des fois je fais des petits clins d'oeils…
Hervé : Justement, tu en fais un sur «No Stress » ?
Alee : Oui, sur « No Stress »et « Allons enfants ». Mais j'essaie de trouver un mélange entre le rap que j'aime beaucoup et que je n'ai pas envie de renier car il m'a amené à la musique, et puis il y a la chanson française parce que j'en écoute et qu'il y a des artistes que j'apprécie. En tout cas je ne lâche pas le coté rap, c'est pour cela que l'on aime bien appeler ça chanson Hip-Hop. Il y a toujours un coté hip-hop dans la façon d'écrire, de dire les choses, et même lorsque je suis sur scène
Hervé : Comment peux-tu définir ton style musical ?
Alee : Nous on dit chanson hip-hop. C'est de la chanson très métissée parce que quelquefois on va vers des choses très rock, des choses un peu Bossa, même disco. Mais au niveau de l'écriture, c'est très rap, donc le terme chanson hip-hop correspond bien.
Hubert : Chaque chanson à son propre univers musical. C'est très vague le terme de chanson, le chanteur il utilise un peu toutes les influences qu'il aime bien donc on retrouve effectivement un peu tous les styles.
Hervé : Sur des titres comme «la diferencia » ou « No Stress», vous avez intégrés des intonations latines en ce qui concerne le chant fait par Nida. Est-ce un choix de ta part Alee, ou l'influence que peuvent t'apporter Nida, Hubert ou Dany ?
Alee : Là, c'est vraiment Nida. Elle se sent à l'aise à travers cette langue, cette façon de chanter avec ces mots là, donc c'est venu assez naturellement.
Hubert : Peut-être que le déclic au départ, c'est que j'ai composé le morceau avec la guitare classique donc ça sonne un peu latin.
Hervé : Alee, avec «Ferme ta Bush», tu dénonces clairement la politique américaine ultra mondialiste, leur pouvoir face aux autres pays, et leur terrain de jeu favori … la guerre ! Vois-tu Bush comme un homme aussi dangereux que des Saddam, Ben Laden ?
Alee : Oui, c'est pareil. Et je pense que c'est pour cela qu'ils se font la guerre, ils veulent le pouvoir tous les trois. Oui, pour moi c'est pareil, Bush, Saddam, Ben Laden, même combat. Ils sont tous aussi dangereux. Ben Laden lorsqu'il utilise la religion, ce n'est qu'un prétexte en fait. Derrière, ce sont des enjeux politiques, économiques, et Bush, c'est pareil ! Je ne crois pas du tout en cet homme là, sinon je n'aurai pas fait cette chanson. Ça me fait franchement peur, c'est aussi pour cela, « 18 Mars 2003, j'ai perdu le sourire », quand je l'ai vu s'adresser à la télé en lançant l'ultimatum à Saddam Hussein, j'ai su que ça allait être la guerre. Ça m'a touché d'autant plus que dans « Allons enfants », il y a un couplet où je parle d'un petit jeune qui repart en Irak. En fait, c'était un copain avec qui j'étais à l'école. Il venait juste d'arriver en France il y a quelques années, il avait l'accent Irakien, il nous faisait rire et un jour il nous a dit qu'il retournait au pays. Quelques années après, c'est la guerre en Irak, et je me souviens un truc qui m'a marqué, c'est qu'un soir je regardais TF1 et je l'ai vu à la télé, il était interviewé. Quelques jours après, l'Irak était bombardé et je me suis dit qu'il était peut être mort, je ne sais pas du tout, si ça se trouve il est toujours vivant. Il a peut être prit les armes pour combattre les américains. Je me disais, ce mec là, j'étais en cours avec lui, pour moi il n'y avait aucune différence, à part l'accent. En 2003 quand j'ai vu Bush déclarer la guerre, ça m'a vraiment touché.
Hervé : Donc on peut te considérer comme un artiste engagé ?
Alee : Oui, même comme un groupe engagé. Je pense que nous le sommes tous sinon on ne jouerai pas ensemble. Je suis un artiste engagé, même si un jour j'arrête d'écrire des chansons engagées, je pense que je le serai toujours dans la vie de tous les jours.
Hervé : Tu abordes avec « la diferencia » un problème de société. L'existence de différences sociales, raciales et culturelles entre deux individus qui s'aiment malgré ces difficultés. Alee, ton rêve serait-il de vivre dans un pays exempt de tous ces discours méprisants ? Je sais… c'est un rêve utopique.
Alee : Oui, je suis un utopiste (rires !). C'est quelque chose que je vis au quotidien comme la différence de culture, aussi bien dans la société dans laquelle je grandis mais aussi au sein de ma famille. Parce que les traditions, c'est quelque chose qui reste très présent dans la vie de tous les jours, chez nous, quand je vais chez mes parents, quand je vois mes frères…Des fois, je me sens en décalage, j'ai l'impression de changer de peau. Quand je suis avec mes amis, je ne suis pas pareil que lorsque je suis avec mes parents. Mes parents ne me connaissent que lorsque je suis chez eux. C'est le poids des cultures qui fait cette sensation.
Hubert : C'est vrai que d'une part par notre métissage, car nous sommes plus ou moins métissés, culturellement ou ethniquement dans le groupe. On a forcément vécu des moments un peu difficiles, par exemple à l'adolescence. Mais en même temps la différence, on aime bien. Je trouverai triste, une société où il n'y aurait pas des noirs, des blancs, des jaunes. C'est cela qui fait la richesse relationnelle par le métissage, la rencontre des gens, des différentes cultures, différentes religions. Heureusement que l'on n'est pas tous pareils .
Hervé : Quel message voulez-vous faire passer avec le titre « le récidiviste » ?
Alee : Je m'adresse aux jeunes. Tu vois dans le morceau, lorsque je dis « Je fais de la peine, même à ceux qui m'aiment » , c'est-à-dire qu'un moment donné, les jeunes qui ont tendance à facilement se laisser emporter, et à se retrouver en prison, c'est pour leur faire comprendre que lorsque l'on va au parloir ou plutôt une famille qui va voir quelqu'un au parloir, c'est dur à vivre et ça fait du mal. J'ai des amis, leurs vies ont été gâchées par des petits délits. Je me souviens d'un pote qui avait quelques mois de sursis. Il se retrouve dans une salle de jeux, il vole un portefeuille dans une veste et se retrouve en prison. Ensuite, les cours s'arrêtent, plus personne ne veut de lui, après, c'est dur de se réinsérer dans la vie. A un moment donné, il faudrait peut être faire plus attention à la prévention par rapport à la petite délinquance. Je pense qu'à ce niveau, il y a beaucoup de travail à réaliser, tout comme la réinsertion. La prison change forcément une personne. C'est très dur par la suite de se réinsérer. Lorsque tu vas chercher du travail et que l'on te demande ce que tu as fait de telle période à telle période. Si tu ne dis rien, tu passes pour un fainéant, et si tu dis que tu étais en prison, là, c'est dur de trouver un boulot. La prison pour les petits voleurs, je pense que ça peut être très dangereux et l'on en ressort difficilement.
Hervé : L'écoute d'un album d'Alee est une invitation à la réflexion ?
Alee : En tout cas, c'est bien si l'album pousse à réfléchir. Je n'apporte pas de réponses, mais je pense que c'est important une société qui réfléchit, des citoyens qui pensent. Vu le déroulement des choses aujourd'hui, au bout d'un moment on pensera tous de la même manière, on mangera tous la même chose, on écoutera tous la même musique… La pensée, c'est ce qui fait la différence. Si l'on ne pense pas tous de la même manière on sera différent. On le voit dans le groupe, nous n'avons pas forcément tous les mêmes idées. On n'écoute pas tous la même musique, cette différence permet d'enrichir la chose et c'est très important.
Hervé : Que représente la scène pour vous ?
Hubert : La scène pour moi, c'est l'endroit où je me sens le mieux. C'est d'ailleurs pour cela que je fais de la musique. Si l'on a fait l'album, c'est pour monter le plus possible sur scène et sur des scènes intéressantes. Depuis que je travaille avec Alee, on a fait de très belles scènes, et c'est un énorme plaisir… c'est le pied total !
Alee : Pareil. D'ailleurs c'est comme cela que j'ai débuté dans la musique, à travers les concerts. A l'époque où j'ai commencé, enregistrer un disque c'était très dur, alors qu'aujourd'hui, c'est quand même beaucoup plus facile ! A l'époque, on ne pensait pas sortir un Cd. La seule opportunité que l'on avait était les concerts. C'est par ce moyen que l'on s'est fait et je ne conçois pas le métier sans faire des concerts, c'est impossible !
Hervé : Quels morceaux préférez-vous jouer sur scène ?
Alee : En ce moment, j'aime beaucoup jouer « Allons enfants » Peut-être parce que c'est le plus nouveau, le plus frais. Mais sinon, le morceau que j'aime beaucoup chanter, c'est « Je chante ».
Hubert : Moi aussi j'aime bien jouer « Allons enfants » parce que… (Rires !) ce que je joue dessus, c'est ce qu'il y a de plus facile donc je peux bouger facilement sur scène (Rires !) Sérieusement, j'aime bien « No stress » ou « ça vaut la peine ». D'ailleurs elle n'est pas sur l'album. Elle sera sur le prochain. Elle est dure à jouer. Elle demande beaucoup de concentration dessus, mais elle est vraiment belle.
Hervé : Alee, tu as fait des premières parties de prestiges (IAM, Tété…) qu'est ce que cette expérience t'a apportée ?
Alee : IAM, c'était avec T5A il y a quelques années. Tété, l'année dernière avec le groupe. Les premières parties, c'est toujours intéressant parce que lorsque l'on joue en première partie d'IAM ou Tété, on joue dans des conditions assez luxueuses. On joue devant un public qui vient pour s'amuser et faire la fête et on joue devant un public nombreux. C'est intéressant en terme de promotion, on se fait connaître à un plus large public et l'expérience de la scène progresse par la même occasion. Du coup, il faut assurer parce qu'un public qui vient voir Tété par exemple, nous, nous ne sommes pas forcément annoncé en première partie ou les gens ne nous connaissent pas. A l'époque, l'album n'était pas encore dans les bacs, les gens viennent pour chanter des chansons de Tété. Si c'est nul, ils partent et ils attendent l'arrivée de la vedette. Donc c'est un super challenge. Tété on en garde un très bon souvenir car le concert s'est super bien passé.
Hubert : On a réussi à attirer le public, les gens ne nous ont pas sifflés. Ils en redemandaient même un petit peu…
Hervé : C'est flatteur…
Alee : Ouais, c'est super !
Hervé : Il y a des featurings avec des artistes qui vous intéresseraient ?
Hubert : Les Beatles bien sûr… (Rires !)
Alee : Bob Marley…(Rires !) C'est sûr qu'il y a plein de gens que l'on aime. Comme Bénabar qui est quelqu'un que l'on aime beaucoup, Tété, ou des gens comme Zebda que j'aime beaucoup. Sur Rennes, je sais qu'avec Mr Roux on avait une grosse envie de faire quelque chose ensemble sur nos albums respectifs. Malheureusement, cela n'a pas pu se faire. On aimerait bien qu'à travers les concerts, on fasse quelque chose ensemble. Mr Roux par exemple, c'est vraiment la personne, si l'on fait un prochain album, qu'il sera dessus. D'ailleurs, il a sorti un super album à découvrir qui s'appelle « Ah si j'étais grand et beau… »
Hervé : Quels regards portez-vous sur la scène musicale en ce qui concerne notre région, la Bretagne ?
Alee : On est quand même bien servit, du coup il y a beaucoup de concurrences parce qu'il y a beaucoup de groupes. Mais sinon, on a la possibilité de faire beaucoup de scènes, il y a beaucoup d'endroits où l'on peut jouer. Il y a aussi de gros festivals et aussi de petits festivals. Pour des groupes comme nous, c'est très intéressant parce que c'est sur ces festivals là où l'on a plus la possibilité de jouer et ça attire quand même du monde. Je pense que par rapport à d'autres régions, on est très bien servit.
Hervé : Dernière petite question, Alee est-ce si difficile de devenir une « Star du rap ? »
Alee : Ouais c'est dur (Rires !) C'est galère ! D'ailleurs, ça fait 15 ans que j'essaie et je n'y arrive pas. Du coup, je me suis mis à la chanson et je pense que bientôt je ferai de la Dance (Rires !) ça marchera mieux ou sinon la Star Academy. (Rires !)
Merci à Alee et Hubert pour avoir répondu à mes questions. Je remercie tout le groupe Alee, Hubert, Nida, Dany et Sylvain pour leur accueil lors de cette rencontre.