Après Alice & June, double album contenant quelques perles (le titre éponyme, ou le surprenant « Ceremonia ») mais dans l’ensemble bâclé sur bien des aspects (textes presque autoparodiques, qualité du son approximative, collaborations à côté de la plaque [AqME et Wampas]), Indochine revient avec ce qui le caractérisait dans les années 90 : un rock ouvertement tourné vers la pop, hétéroclite et sans compromis. « Little Dolls » en donnait d’ailleurs un bref aperçu en mélangeant la structure rock d’Un Jour Dans Notre Vie à l’électro de Dancetaria. Sauf qu’il est bien connu qu’un single ne se veut pas toujours le reflet exhaustif d’un album.
Comme sa pochette l’indique (rappelant évidemment Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band des Beatles ou encore l’esprit collage de Sexplosive Locomotive de Punish Yourself), La République Des Meteors témoigne d’un condensé de plusieurs styles, propres ou non à Indochine, en se dotant du principe de concept-album. Basé sur le thème de l’absence, de la recherche de Soi et de l’Autre ou de la perte de repères, La République Des Meteors libère ses idées à travers la métaphore, il faut bien le dire, aussi maîtrisée que bien trouvée. Musicalement, Indochine revient à des styles expérimentés dans les années 90 (rock, acoustique, électro, pop) en s’autorisant quelques simulâcres eighties (rythme new wave sur « Je t’Aime Tant » et « Le Dernier Jour », petites ambiances asiatiques sur « Little Dolls » et « Républika », l’ovni dansant « Playboy ») ; le résultat est, sinon bluffant, convaincant et de bonne facture.
Indochine s’essaie à quelques curiosités comme le ukulélé ou l’accordéon, sans tomber dans le kitsch. Les parties acoustiques sont poignantes (« Le Grand Soir », « Mexicane Syndicate » aux accents irlandais), sans doute les meilleurs passages du disque, l’électro est relayée en second plan et de façon plus discrète (« Un Ange À Ma Table », « Les Aubes Sont Mortes » écrit par Chloé Delaume), le rock-indus de Paradize s’éteint progressivement (« Go, Rimbaud Go ! », « Républika »), et le virage pop annoncé assure d’excellents morceaux (« Le Lac », « Little Dolls », « Union War »). L’ensemble est percutant, bien produit et diversifié, offrant un opus intemporel et hors des modes.
Mais il y a un mais. En 2009, et ce depuis Paradize, le principal défaut d’Indochine est incontestablement de trop remplir ses albums, insérant quelques titres certes généralement agréables mais redondants, plus adéquats sur une face-b de single qu’autre chose. La République Des Meteors ne manque malheureusement pas à cette faute de choix. Ainsi, on se prendrait à bailler sur « Bye Bye Valentine » (rappelant pourtant la féérie pop industrielle de Dancetaria), et surtout sur « L World » et « La Lettre De Métal », sortes d’hymnes émo aux paroles ridicules.
Il est également regrettable que sur un concept-album, qui plus est abouti, la bande de Nicola Sirkis décline une intégrité évidente en intégrant des titres sans aucun rapport avec le reste, afin de satisfaire un jeune public post Paradize. On pense en particulier à « Playboy », morceau enjoué et sans prétention carrément sorti (comme un cheveu dans la soupe) en second single, précédant ainsi « Le Lac », beaucoup plus adapté. Ce manque de prise de risque se ressent également sur les concerts du groupe, oubliant complètement les joyaux Le Baiser, Un Jour Dans Notre Vie, Wax et Dancetaria au profit des trois derniers albums, largement moins aboutis.
Il en reste donc que La République Des Meteors est un très bon album, s’écoutant comme dans une bulle, mais dont les défauts parfois grossiers auraient pu être facilement corrigés.