Disbelief n'a jamais chômé, attaquant la planète death metal d'une nouvelle et efficace livraison chaque année depuis la sortie de son premier opus éponyme. Pourtant, 2006 n'aura donné lieu à aucune production émanant de la formation teutonne. Le quintet s'est cette fois accordé quelques mois supplémentaire, dégainant à nouveau un opus à la force de frappe incontestable, de retour pour l'occasion sur le label Massacre Records qu'il avait quitté le temps d'un unique album (66 Sick).
Car si Navigator n'apporte aucune innovation au son institué par les cinq musiciens sur les albums précédents, celui-ci témoigne par ailleurs de la même efficacité et d'un talent de composition que seulement une poignée peuvent se vanter d'égaler dans le milieu. La recette opérée par Disbelief reste unique en son genre, associant harmonieusement la puissance écrasante du death metal à une dose massive d'émotions, étiquette musicale hybride mais pourtant nullement bancale pour laquelle ils se démarquent presque en unique représentant. Le plus étonnant reste de constater que cette dimension émotive (certes bien moins probante que chez une formation traditionnelle d'émocore) n'apporte pas le sentiment que le groupe livre son âme au diable. Niveau violence et ambiances plombées, Disbelief connaît la formule sur le bout des doigts, couchant une nouvelle fois dix compositions lourdes et ne témoignant à aucun moment d'une rythmique galopante ou d'une échappée en solo décoiffante de la part des six-cordes (le tempo se voulant néanmoins plus relevé à l'occasion d'un « It Is Simply There » lancé par un discret accord de guitare). Le riff ténébreusement accordé est utilisé à outrance, martelé avec insistance afin de pénétrer le plus rapidement possible dans l'esprit (« Passenger », « Navigator »), les séries d'attaques frontales étant uniquement ponctuées de rares breaks permettant d'aérer des compositions enveloppées dans une noirceur prenante. La musique de Disbelief demeure sombre, confinée dans des ambiances oppressantes, les quelques incartades plus mélodiques ne parvenant pas à l'en détacher (l'introduction mélancolique de « Falling Down », à rattacher aux pauses dénuées d'électricité souvent utilisées dans le mouvement postcore).
Les structures ainsi que l'esprit reste identiques de morceau en morceau, Navigator faisant preuve à ce niveau d'une cohérence à toute épreuve. Pourtant l'album ne donne aucunement l'impression de se répéter, tout comme les nombreuses similitudes partagées avec ces prédécesseurs n'amènent qu'un légère impression de déjà-vu rapidement oubliée. Evoluant dans les graves les plus prfonds, la voix de Karsten "Jagger" Jäger apporte un accompagnement aussi habité que le tissu sonore avec lequel elle cohabite, le frontman témoignant d'un timbre rauque porteur de désillusions, modulant ses intonations avec brio tout en conservant la rage intacte. Si le hurlement arraché reste l'actionnaire principal et indétrônable, celui-ci n'hésite pas à dévier sans en abuser vers un registre parlé et plaintif (« When Silence Is Broken »), supprimant néanmoins les rares échappées en chant clair présentes sur la production précédente. Seul le son de batterie déçoit par moment, assez faiblard et peinant à emplir l'espace (« Between Red Line »), en particulier lorsque celui-ci se trouve abandonné par la présence des guitares. Un détail mineur qui n'entachera en rien la grande qualité de ce Navigator.
Se réinventer ne semble pas être l'objectif premier recherché par Disbelief. Mais qu'importe tant que les Allemands continuent d'ouvrer avec la même efficacité. Sincère, brutal tout en se voyant entouré d'une petite touche de sensibilité, Navigator ne souffre à aucun moment la comparaison avec ces grands frères, et c'est bien là l'essentiel.
.: Tracklist :.
01. Navigator
02. When Silence Is Broken
03. The One
04. The Thought Product
05. Between Red Lines
06. It Is Simply There
07. Falling Down
08. Passenger
09. Selected
10. Sacrifice