Il demeure étrange de constater aujourd’hui combien l’attirail stylistique avancé par certaines formations leurs permettent de s’adjoindre l'approbation d’un public conséquent. Les jeunes énervés de Bring Me The Horizon semblent l’avoir parfaitement compris, et cultivent avec passion la mèche lissée et le tatouage imposant sensé lui apporter une certaine crédibilité hardcore. Le phénomène d’identification fonctionne en l’occurrence à plein régime, la guimauve métallisée des formations néo d’antan n’obtenant plus les mêmes faveurs dans le cœur des adolescents en quête d’un peu de violence auditive. Mais passé l’aspect purement visuel de la chose, le quintet avance bien une véritable force de frappe ainsi qu’un indiscutable talent pour la musique qui tache. Suicide Season en est aujourd’hui un exemple des plus frappants.
Stylisé à l’extrême, certes. Mais par ailleurs bien équipé lorsqu’il s’agit de démontrer que les musiciens ont le nécessaire pour tataner sévère leur public. Avec Suicide Season, Bring Me The Horizon amorce un retour sous les meilleurs auspices, se fendant d’un hardcore bien buriné satiné aux encornures d’une dégoulinante dose de death moderne. Des élucubrations sonores de plus en plus appréciées par les jeunes générations, sur lesquelles on posera une étiquette hybride de Deathcore. Si l’originalité n’est plus vraiment de mise, la propension présentée par Bring Me The Horizon à s’épancher dans une violence jouissive et communicative confère à sa musique une qualité certaine. Riffs saccadés à foison, mosh-parts savoureuses et ultra-afficaces, basse marquée et groovy, Suicide Season conjugue des éléments en acier trempé sur la base de la puissance écrasante et de la vélocité dénuée de temps morts (le single « The Comedown », « Football Season Is Over », « Sleep With One Eye Open »). Car Suicide Season ne fait preuve d’aucune concession opportuniste, ce troisième opus établissant le riff acéré et puissant en véritable religion. Une politique appréciable en ces temps de standardisation FM à l'extrême. A cette formule explosive s’allie le timbre arraché d’un Oli Sykes allumé. Le frontman beugle sans discontinuer, optant pour un alliage désormais bien connu des quelques formations Deathcore pullulant ces dernières années et visant à combiner les hurlements hardcore conventionnels à de nombreuses tirades aux intonations porcines (« Chelsea Smile », « Diamonds Aren’t Forever »). La rapidité d’exécution est de mise aussi bien vocalement qu’au niveau des constructions instrumentales, et le tout se marie à merveille.
Malgré son aspect marteau-piquer, Bring Me The Horizon pose néanmoins sur bandes ses tribulations avec une certaine finesse. Mais bien que les mélodies ne manquent pas à l’efficace tambouille du quatuor, celles-ci ne viennent à aucun moment occulter la violence de l’ensemble. A contrario de certaines formations metalcore Américaine, Bring Me The Horizon ne ternit jamais l’impact sismique de ces compositions, menées tambour battant par un Matt Nichols à la frappe de damné. Les subtilités mélodiques sont particulièrement bien intégrées et discrètes pour ne pas briser la cohérence des morceaux, le groupe laissant « chanter » ses guitares sur de relativement courtes plages (les pré-refrains de « The Comedown »). Les envies d’ambiances moins saturées transparaissent d’avantage au cours des deux dernières compositions, sur lesquels les guitares sont légèrement mises en retrait au profit du chant clair éraillé de Sykes. Bring Me The Horizon parvient cependant à conserver l’énergie intacte, notamment via une rythmique bien plombée.
Bien qu’ils s’identifient pleinement à Bring Me The Horizon, les émo-kids risquent bien de se faire ratatiner les dents de devant. Les autres se convaincront sans peine que l’habit ne fait pas le moine. Sanglant et bien trempé, ce virulent Suicide Season s’avère être une excellente surprise.
.: Tracklist :.
01. The Comedown
02. Chelsea Smile
03. It Was Written In Blood
04. Death Breath
05. Football Season Is Over
06. Sleep With One Eye Open
07. Diamonds Arent Forever
08. The Sadness Will Never End
09. No Need For Introductions
10. Suicide Season