Me voici à l'espace presse du Furia Sound Festival en compagnie de Dominique et Antonin du groupe High Tone pour une interview un peu particulière. En effet, une nouvelle fois j'ai enquêté auprès de quelques groupes de dub / electro afin de leur concocter une interview originale ! La parole est donc donnée à une dizaine de groupes d'envergure nationale ou régionale …{multithumb thumb_width=500 thumb_height=350}
Löbe Radiant Dub System : Ne pensez vous pas que sous le mot "dub" on regroupe bien des groupes et styles de musiques qui n'ont rien à voir entre eux et qui s'éloigne du sens original et donc des foundations ?
Dominique (batteur) : Bien sûr, en fait le mot « dub » est juste l'appellation d'une technique de studio dont pleins de groupes se servent. L'histoire commune à tous ces groupes et notamment français est d'essayer de maitriser la rythmique reggae. C'est un travail instrumental avant le dub et ensuite ils essayent de faire évoluer ce style inventé par les jamaïcains en 1970 puis relancé par les anglais avec le son digital. Les étiquettes ne sont pas très importantes tant qu'on a de bonnes oreilles !
Antonin (clavier) : Pour nous le « dub » n'est qu'une technique. Peut-être que pour le public ça représente autre choses et qu'ils classent des groupes comme « dub » alors qu'ils ne le sont pas …
Dominique : C'est surtout rentrer dans un discours un peu puriste. Certains diront par exemple qu'Improvisators Dub fait vraiment du dub alors que Zenzile fait du rock. En tous cas, quand les journalistes parlent de « la scène dub française », ils se trompent en classant Mei Tei Sho ou Le Peuple de l'Herbe dedans … Ces groupes ont incorporés des techniques de dub : retirer des instruments, faire des cassures, créer de l'espace, rester dans des rythmiques minimales et hypnotiques.
Cap'tain Planet : On vous défini comme un groupe dub pourtant je trouve qu'il est difficile de vous appliquer une simple étiquette tellement votre musique est riche. Si vous deviez imaginer un monde correspondant à la musique de High Tone, à quoi ressemblerait-il ?
Dominique : C'est une question très large. Ce qu'on essaye de faire c'est s'amuser à dompter les machines tout en gardant notre aspect de musiciens et d'instrumentistes. Notre monde ressemblerait à celui-là mais en espérant qu'il aille un peu mieux qu'en ce moment ! (rires). On est bien sur Terre avec ce qui nous entoure mais on aimerait que des choses évoluent comme notre musique !
Tchao Pai Pai : Dans le DVD de Jarring Effects, vous parliez de vos débuts où vous faisiez « de la musique d'extraterrestres », que vouliez-vous dire par là ?
Dominique : Tout d'abord dans le fait de ne pas avoir de chanteur, ensuite parce qu'on ne jouait pas très bien ! La sauce prenait dans nos idées mais nous avions des carences musicales notamment car nous ne remplissions pas assez l'espace. Il y avait des questionnements de la part du public. On a réussi à imposer nos idées de groupe instrumental en ayant un langage de groupe et de musicien. Chaque morceau fait passer un message sans l'utilisation de la parole. Quand on regarde aujourd'hui notre première tournée, on ressemblait effectivement à des extraterrestres : on jouait dans le noir avec pleins de flashs, il n'y avait pas de sideman, etc… Peu de groupes faisaient ça.
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Antonin : En fait à l'époque, la scène dub était beaucoup moins ouverte…
Dominique : Les gens ne comprenaient pas la musique lorsqu'ils voyaient un mec seul derrière une platine qui passe une heure à lancer des samples de sirènes…
Cap'tain Planet : Qu'est ce qui vous a motivé à vous exprimer sous cette forme musicale ?
Dominique : La place que chacun trouvait dans cette musique et la liberté de jeu qu'offre le dub. Ne pas à avoir à supporte un chanteur et ses idées aussi ! (rires). J'adorerais jouer avec un chanteur mais la rencontre ne s'est pas encore faite …
Kaly Live Dub : C'est quand que vous prenez un chanteur ?
Dominique : … et eux ?! (rires). J'adore le maxi qu'ils ont fait avec Rod Taylor, faut pas qu'ils hésitent à retenter ce genre d'expériences car ils y arrivent bien. Pour notre part on a fait ça avec The Real Fake MC et une tournée avec un chanteur marocain mais tout dépend des rencontres …
Cap'tain planet : Proposer une musique sans paroles est-il un moyen pour vous de proposer une musique universelle ?
Dominique : Oui bien sûr, chacun l'interprète comme il veut, il n'y a pas le poids des mots.
Antonin : Il y a aussi l'intonation de la voix. Parfois ça peut prendre le dessus sur les parties instrumentales. Tout à l'heure Dominique parlait de place et le fait de ne pas avoir de chanteur laisse à chacun de nous beaucoup d'espace pour s'exprimer. Chaque musicien amène ses influences de cette manière …
Aïzell (qui vous transmet toutes ses amitiés) : Après avoir écumé avec succès quasiment toutes les salles et festivals de France, avez-vous des projets (studio, ou live) un peu originaux ou farfelus… ? (Tournées avec d'autres artistes très différents, ou dans d'autres pays, etc…)
Dominique : Non rien de réellement original et farfelue mis à part les rencontres qui découlent d'apéros un peu tardifs : Kaly live dub, Improvisators Dub, Zenzile, Wang Lei … On a fini par se saouler en disant qu'on ferait un album ensemble et on l'a fait ! Celle qui ressort le plus du contexte c'est celle avec Zenzile (« Zentone ») qui sortira en septembre. Contrairement aux autres rencontres qui étaient de l'improvisation et réalisées avec des délais très courts, cette fois-ci nous avons eu plus de temps pour se préparer, se rencontrer et réaliser l'album.
IDEM : Comment s'est passée la collaboration avec nos amis angevins de Zenzile ?
Dominique : Super bien. Je pense qu'ils diraient la même chose. On a fonctionné par envoi de pistes de morceaux une fois que chacun avaient des bouts d'idées puis pendant 15 jours on est allé chez eux pour effectuer les prises dans leur studio. Chacun a mixé les 10 morceaux qu'ils avaient faits. Au final il y a donc 20 mix des mêmes morceaux qui seront répartis entre la version vinyl et la version CD.
Cap'tain planet : D'où vient cette volonté de composer avec d'autres artistes ?
Antonin : Je pense que c'est dû au fait que tous ces groupes ont un historique commun et la même démarche de recherche musicale. Ce sont des personnes qui font la même chose que toi et qui sont assez proches humainement.
Dominique : On a vécu les mêmes choses : les concerts d'extraterrestres, la motivation pour enregistrer le premier disque et être distribué, vivre des aventures avec le public, se rendre compte des différences d'appropriation du dub, etc… On avait l'envie de partager cette vision des choses avec tout le monde.
Botom Botom : est-ce que vous avez changé votre manière de composer pour chacun de ces albums et si oui qu'avez-vous changé ?
Dominique : Ca évolue au gré des disques. Les premiers étaient réalisés dans des conditions d'urgence et exécutés « en live ». Maintenant ont travailler plus avec des machines. Au niveau de la composition, ça se passe au local. Il est rare que quelqu'un arrive avec une idée de morceau très avancée. Il n'y a pas de différence fondamentale dans la composition des différents albums. Ca part de jam…
Djins : C'est forcément une question concrète et musicale mais aussi personnelle. A quand un maxi high tone vs djins ?
Dominique : C'est toujours pareil … on aimerait d'abord se concentrer sur la production du prochain album d'High Tone. On aimerait le faire bien, pas trop vite. On ressort juste de la collaboration avec Zenzile mais ça sera avec grand plaisir pour la prochaine fois !
Zenzile : Comment pensez-vous évoluer dans la forme : plus de machines ? ou un retour à la formule originelle : plus d' instruments ?
Dominique : Les deux mais avec des morceaux très acoustiques … On ne sait pas vraiment comment vont être les prochains morceaux. Sur « Wave Digger », on avait exploré des horizons divers avec des ambiance down-tempo, dark et trip hop pour faire un disque varié. Personnellement je suis plus attiré par le dub hip hop, la soul, etc… Je reviendrais bien à du dub hip hop acoustique d'une part, et d'autre part je tenterais bien des compositions avec des machines très dark et down tempo. On a pas encore poussé la réflexion assez loin…
R2jeux : Comment voyez-vous évoluer la scène dub et la scène electro ? Comment voyez-vous évoluer votre carrière ?
Antonin : Aucune idée ! J'espère qu'on pourra organiser des plateaux grâce à une reconnaissance du public. Ca fait plaisir de voir que de jeunes groupes citent comme influence principale des groupes de dub français. J'espère qu'il y aura de nouvelles évolutions et que les jeunes groupes joueront d'autres choses que la dizaine de groupes présents depuis 10ans …
Dominique : J'espère qu'ils trouveront leur identité, qu'ils ne répéteront pas ce qui a déjà été fait.
Cap'tain Planet : Et dans 10 ans vous vous voyez où ?
Dominique : Aucune réponse ! Tant qu'on a la gniak c'est bon !
Dubwiser : Quelle est la bonne question que vous aimeriez-vous que l'on vous pose ?
Dominique : … mais que fait Dubwiser en ce moment ?
Dubphonic : Mon père, pendant de nombreuses années, a mangé des toasts au petit-déjeuner… Et vous?
Antonin : Moi aussi et j'espère pour encore de nombreuses années !
Improvisators Dub : Etes-vous prêts à arrêter de jouer avec des boules loisirs à la pétanque ?
Dominique : DJ Twelve a commencé à investir dans des 700g. Effectivement, elles sont bien mais vu que contrairement à Improvisators Dub on ne les laisse pas tout l'hiver dans de la graisse d'ours, on sera forcément toujours un peu en dessous d'eux. S'ils amènent les glaçons pour l'anisette, on devrait pouvoir les battre ! (rires)
Antonin : J'ai bon espoir de faire sponsoriser le groupe par Obut pour avoir des boules gratos ! (rires)
La Phaze : Etes-vous sponsorisés par une marque de tongs ? Quelle est la marque qui sponsorise ???
Dominique : Comme dans High Tone, c'est très expérimental et freestyle. C'est de la pure improvisation … Au moment où je réponds à la question, il fait 15°C , il pleut et je suis en tongs dans la boue !
Cap'tain Planet : Les groupes précités auparavant vous ont posé des questions plus tordues les unes que les autres, quelle question leur poseriez-vous ?
Antonin : C'est pas la Phaze qu'on a battu à la pétanque la dernière fois ? Quand est-ce qu'on se recroise pour vous foutre une raclée ??
Dominique : Vous n'avez pas mieux à foutre ???
Cap'tain Planet : Préféreriez-vous que les jeunes filles du premier rang pleurent ou s'évanouissent en vous voyant ?
Antonin & Dominique : On préférerait qu'elles prennent nos numéros de téléphone qui sont marqués sur tous les retours et sur nos instruments ! Ouvrez bien les yeux !!!
Un grand merci à tous les groupes qui m'auront aidé à réaliser cette interview ainsi qu'au label Jarring Effects et à High Tone !