Préparez-vous à affronter les murs d’amplis et un déluge de décibels en ce radieux mois de mai. Après Paris sous la neige, Paris sera Noise. Après avoir accueilli récemment Pelican, The Melvins, Torche, Russian Circles, Scott Kelly ou Mouth Of The Architect, Glazart recevra du 18 au 31 mai, rien de moins que les leaders de tout un pan de la musique bruitiste : Wolves in Throne Room, Ufomammut, No Means No, The Pack A.D, Aucan, HKY et Zëro. Dossier spécial garanti sans bruitage.
Du 18 au 30 mai, le Glazart recevra les leaders de la Noise actuelle
Style trop souvent en marge de la programmation des salles parisiennes, la Noise sera à l’honneur à Glazart, au travers de trois soirées spéciales. Le 18 mai s’abattra une avalanche métallique avec Wolves in throne room et Ufomammut à l’affiche. Le lendemain, le 19 mai, l’ambiance sentira bon le fond du garage de papa avec No Means No et The Pack A.D. Enfin, le 30 mai, Noise Mag aura carte blanche pour nous faire découvrir les meilleurs talents noisecore du moment, avec Aucan, HKY et Zëro.
Wolves in Throne Room + Ufomammut
Mardi 18 mai
De 20h à minuit
15 euros en prévente (hors frais de location), 20 euros sur place
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Originaires d’Olympia, dans l’Etat de Washington, les Wolves in Throne Room sont sans conteste les porte-drapeaux de la scène dite post-black metal. Le groupe a fait ses premières armes dans le milieu punk et le monde des squats avec lesquels ils partagent toujours cette même ferveur pour l’éthique D.I.Y. Leur passage à Glazart suit la sortie de leur EP Black cascade.
Ecouter Wolves in Throne Room sur Myspace.
De son côté, Ufomammut est un trio italien formé en 1999. Le groupe sort son nouvel album au croisement du Sludge et du Doom, fortement emprunté de psychédélisme à la fin du mois de mai. Très remarqués dans certains festivals internationaux (Hellfest, Roadburn, Assymetry), Ufomammut atteint aujourd’hui un plus haut niveau avec un son plus diabolique et plus mature. Deux membres d’Ufomammut ont fondé Malleus, un trio artistique qui associe le dessin à la musique en composant des couvertures d’albums, de fanzines, des affiches de concerts (Brant Bjork, Prodigy, Iggy Pop, Nine Inch Nails ou même les Sex Pistols). L’iconographie s’inspire de différents mouvements : expressionnisme, symbolisme, art nouveau, surréalisme, pop art ou encore art psyché. Chaque production étant unique, leur affiches se vendent très chères. Leur venue est exceptionnelle !
Ecouter Ufomammut sur Myspace.
No Means No + The Pack A.D
Mercredi 19 mai
De 20h à 01h
17 euros en prévente (hors frais de location), 20 euros sur place
Réserver une place
No Means No affiche plus de 25 années au compteur mais pas une seule ride. Après plus de six ans de silence, le groupe des frères Wright a livré l’an dernier All Roads Lead To Ausfahrt, un énième album de punk rock au souffle salvateur tandis que leurs influences couvrent aussi bien le jazz que la drum’n’bass tout en n’oubliant pas évidemment le hardcore. Originaire de Colombie Britannique, la formation, qui s’érige aujourd’hui en monument de la scène canadienne, a pour habitude de livrer des prestations de plus de 120 minutes ! Ecouter No Means No sur Myspace.
Prêtes à faire s’abattre leurs foudres sur la petite salle de la porte de la Villette, les deux filles de The Pack A.D sont deux véritables terreurs nourries au garage-rock et au punk. Elles se sont rencontrées dans une station d’essence de East Vancouver où Becky travaillait et ont vite décidé qu’elles préféraient faire de la musique et devenir un groupe qui peut te faire rester dans un bar après le last call plutôt que de garder leurs emplois minables. Elles se sont donc appliquées à enregistrer leur premier album, Tintype, qui broyait des sons qui « font pleurer des garçons, rendent des filles séduisantes et font vendre de la bière ».
Ecouter The Pack A.D sur Myspace.
Aucan + HKY + Zëro
Dimanche 30 mai
20h > 01h
5 euros
Aucan se donne le défi de donner à sa musique une puissance et une énergie unique. Après un premier album en 2008 et une tournée supportant plusieurs groupes tels que Antipop Consortium, Zu – dont le batteur joue sur ce nouveau EP – Sleeping People, Dj Rupture, Hey ! Tonal, Aucan revient avec DNA, un EP tout fraichement enregistré en Décembre 2009 (5 morceaux, 35mn), dans la continuité du premier album, avec une intégration plus importante d’éléments électroniques, la fusion rock/électro est à son comble. Ce disque – dédié à Gerhardt Fuchs, le batteur défunt du groupe Maserati – est d’une grande puissance, à écouter très fort donc, pour les initiés et les fans d’ambiances électroniques novatrices.
Associé à la scène « post hardcore parisienne », HKY s’extrait très facilement de ce genre par une atmosphère encore plus dense et plus sombre que celle couramment associée au style. Ainsi bien que le nom de Neurosis saute aux oreilles, c’est aussi celui de Darkspace qui apparaît clairement dans le jeu des samples associés aux riffs lourds et sombres. HKY n’en est qu’à son premier album (quatre titres de huit minutes en moyenne) mais tout est donc déjà semé pour que la suite n’ait plus grand chose à voir avec la musique composée par les fans de Isis et de Cult of Luna. Lents et denses, les riffs de guitare auréolés de samples glacials résonnent lourdement devant la section rythmique. Ce premier album parle pour eux et suffira sans l’ombre d’un doute à convaincre jusqu’à ce que leur prochain disque l’enterre.
Ecouter HKY sur Myspace.
Né des cendres de Bästard et de Narcophony, les membres de Zëro viennent de lancer leur deuxième album, Diesel Dead Machine. On sent que le groupe a tourné, l’énergie brute des concerts est ici restituée avec ferveur. Il suffit de les voir en concert pour le comprendre. C’est sans doute là que le message de Zëro se révèle, approchant avec une totale liberté d’expression ce que le rock représente à leurs yeux: un métissage de cultures et d’influences où le punk des premiers Devo, le jazz d’un Sun Ra et le blues d’un Captain Beefheart ne sont pas étrangers mais complètement assimilés. Il est clair que la musique de Zëro s’aventure plus dans des contrées inventives que dans les sentiers battus du rock à identité fixe. On y croise autant Jack Berrocal et Gene Vincent en « Drag Queen blues » sous extasy, que le krautrock de Can et Kraftwerk dans un « Luna Park » ludique où psychédelisme et harmoniques offrent un roller coaster cérébral et addictif.
Ecouter Zëro sur Myspace.
Mais je comprends pas… c’est quoi la Noise ? Retour sur le concept et l’histoire de la musique bruitiste.
Qu’est-ce que la musique si ce n’est une succession de bruits organisés culturellement ? En arrangeant sons et silences au cours du temps, l’auteur combine rythme, fréquence et hauteur afin de créer une œuvre d’art. De l’Homme préhistorique à Cannibal Corpse, en passant par Mozart, rien n’a vraiment changé. Les œuvres musicales ne sont que des combinaisons rythmiques, mélodiques et harmoniques d’unités sonores. Cependant, les Hommes ont toujours attribué une fonction expressive à la musique en obéissant à des règles variables selon les époques et les civilisations. Ainsi, dans l’univers sonore traditionnel occidental, le son musical incarne le beau, tandis que le bruit est perçu comme le laid. L’histoire de la musique moderne a ainsi vu la « musicalité » intrinsèque des œuvres dépassées par le « message » qu’elles revendiquent.
La musique est un moyen de contestation et de protestation esthétique, sociale et politique. En désirant de l’indésiré, l’amateur de bruit ne clame pas seulement l’envie d’un monde autre, mais aussi d’un autre monde (volonté de réenchantement). Le désir de bruit fait donc clairement signe vers une révolte de l’être tout entier. Le bruit, revendiqué en tant que tel, traduit alors le soucis de trouver une expression conforme aux réalités intérieures de l’Homme qui opposent beauté et laideur, misère et grandeur, le vice et la vertu. Alors, où se situe la frontière entre la musique et le bruit ? Répondre à cette question serait une lapalissade, mais les artistes contemporains ont bien compris que le son musical s’achève en bruit lorsque la musique est jouée trop fort.
Ainsi, les concerts sont depuis toujours des lieux d’exposition à la surpuissance sonore. « On aime le bruit, c’est notre choix, c’est ce qu’on veut faire », déclaraient les Sex Pistols en 1977. Les chouchous de Malcolm McLaren ne sont pourtant pas des précurseurs dans ce domaine puisque la musique bruitiste est une vaste appellation qui regroupe de nombreux genres musicaux issus de différentes familles : jazz, rock, musique improvisée, électroacoustique… Malgré leurs différences de styles, Lou Reed, Sonic Youth, Polvo, My Bloody Valentine, Pelican, The Melvins, Torche, Russian Circles, Scott Kelly ou Mouth Of The Architect peuvent être rattachés à la Noise. Leurs points communs ? Le rejet des schémas traditionnels de leurs genres musicaux respectifs (le rock, le metal, le punk, la pop…) en valorisant l’improvisation, la dissonance et la déstructuration. Certains vont jusqu’à utiliser des guitares ultrasaturées ou à intégrer une composante aléatoire à leur musique.
Mais pourquoi Glazart programme de la Noise en mai ? – Question posée à l’équipe programmatrice de la salle.
« Glazart a toujours réservé une place importante aux déclinaisons noisy, sludge, post rock ou post hardcore, expérimentales afin de valoriser cette scène qui nous tient à cœur et de lui offrir de bonnes conditions de diffusion.
Nous avons par exemple accueilli ces derniers temps Pelican, The Melvins, Torche, Russian Circles, Scott Kelly, Mouth Of The Architect et bien d’autres. Ces dates nous permettent surtout de proposer des groupes de première partie en développement et contribuer ainsi au dynamisme de la scène locale. On retiendra à ce titre Blackthread, Membrane, La Terre Tremble, Aside From a Day ou encore Stellardrive, ainsi que les soirées découvertes en partenariat avec Noise Mag sur lesquelles nous avons déjà accueilli Kourgane, Aucan, Zëro, … »
[Note : Ce billet est soutenu par le Glazart mais a été rédigé librement par Cap’tain Planet – rédacteur de Vacarm.net]