Qu’est ce que le Groezrock? Un festival belge,en plein milieu de la campagne des Flandres, dédié au Punk-Rock et ses genres afférents (Ska Punk, Hardcore) et qui a craint les annulations en cascade à cause de l’éruption du volcan islandais. Mais si le festival a bien été recouvert par un nuage, c’est dû à la poussière remuée par les pits et pogos en tout genre, en lieu et place des déjections du volcan redouté…
La semaine précédent le festival a donc été marquée par les annulations de Hatebreed et Snapcase, notamment, qui laissait présager le pire quant à la présence des nombreux groupes américains programmés, en raison des restrictions imposées sur l’espace aérien européen. Mais le pire a été évité de justesse, et la majorité des punk-rockers US répondent présents, voyant même Millencolin s’ajouter à la liste en dernière minute. Les têtes d’affiches de ce festival étaient les vétérans de Bad Religion, qui fêtaient la première date de leur très longue tournée européenne et l’anniversaire de leur 30 ans d’existence, Sum 41 pour les kids en baggy fans de American Pie, et Pennywise pour les nostalgiques de la vague skate-core des années 90 qui a vu tant de groupes punk-rock californiens atteindre le firmament de leur popularité.
Mais la journée de samedi voyait aussi bon nombre d’autres groupes talentueux faire pogoter les fans de punk en tout genre. Les coreux d’H2O, le ska-punk de 88 Fingers Louie, très représentatif du son de Fat Wreck Chords (label de Fat Mike, leader de NOFX) ou le son puissant de Parkway Drive ont animé tour à tour les trois scènes sous chapiteau du festival belge. Mention très bien à ces derniers, d’ailleurs, qui en dépit de faciès de surfers californiens propres sur eux, déclinent une vague de violence entre Hardcore, Rock et Métal qui en a surpris plus d’un. Chant énorme, guitares ultra-rapides et salves de double-pédale surpuissante rien de mieux pour se préparer à l’assaut final du Groezrock. Palme de la surprise à AFI, un des fers de lance d’Epitaph (label prédominant dans l’essor du Punk-Rock californien), qui pratiquent un punk mélodique très attractif mais surtout original et plus technique, ce qui ne fait pas de mal à un style dont le grand défaut est d’avoir tendance à se répéter. Bon, même s’il faut avouer que le look et le déhanché du chanteur nous ont atrocement fait penser à Nicolas Sirkis, une fois passé outre, on a passé un très bon moment devant le show des américains. Comble de l’inavouable, on a même été pris en flagrant délit en train de chanter un hit radio de Sum 41… décidément la fraternité punk, ça fait faire des trucs pas possibles parfois.
Après un repos mérité fait de grasses frites belges arrosées de ketchup sucré (ou plutôt l’inverse), vient l’entrée en scène de Pennywise sur le Main Stage, c’est donc avec un entrain d’ado boutonneux qu’on se lance dans le beuglement à tue-tête des hymnes du quatuor californien qui a accompagné tant de virées en skate dans les 90’s. Le chanteur n’est plus le même, certes, après le départ du chanteur historique, mais même si on met un peu de temps à s’habituer au nouveau chant, l’efficacité des mélodies reste identique et c’est avec plaisir qu’on replonge avec eux dans les morceaux rapides et intenses des albums Pennywise, Unknown Road et Full Circle, qu’évidemment une bonne partie du public connaît par coeur. Après une formidable reprise du standard « Stand By Me » en version punk, c’est le cultissime « Bro Hymn » qui, depuis la mort du bassiste Jason Matthew Thirsk en 1996, achève les concert des californiens, avec une cinquantaine de personnes qui montent sur scène pour entonner avec eux cette formidable communion. Jouissif, on vous dit.
Dernier acte de ce festival qui tient ses promesses à de nombreux égards: les tenanciers de la maison punk-rock californienne, Bad Religion. La terre a tourné depuis 30 ans qu’il parcourent la planète avec ce punk-rock mélodique unique en son genre, ses riches textes engagés et son énergie unique, mais le processus de vieillissement a seulement marqué quelque peu les visages, pas le show du groupe à l’origine de l’éclosion des populaires The Offsprings. Panel représentatif de la grosse quinzaine d’albums du groupe, la setlist reprend les standards du groupe, de « Sanity » à « Infected », en passant par le génial « Best For You » ou l’indémodable hit « 21st Century Digital Boy ». Affuté techniquement, remuant dans tous les sens et se marrant franchement sur scène, c’est un vrai bonheur de voir ce groupe phare faire chanter un public acquis à sa cause et diablement enflammé. Groupe unique en son genre tant par la qualité de ses textes et de ses prestations scéniques que par sa longévité, Bad Religion a été et reste ce qui se fait de mieux en la matière.
Dans l’ombre des gros festivals allemands et hollandais que sont le Rock Am Ring ou le Rock Im Park, ce festival à taille humaine (10 à 20 000 personnes quand même) s’impose comme une référence pour les amateurs de Punk-Rock, en raison de son organisation quasi-parfaite, et de sa position géographique idéale (entre l’Allemagne et les Pays-Bas), malgré sa faible réputation en France. Si son défaut majeur est le manque de diversité des groupes, il est amplement comblé par le fait que ce punk-rock américain là est, malgré les critiques et son supposé faible niveau technique, diablement fédérateur et convivial sous le soleil du plat pays.