{multithumb}Alors que le groupe avait préféré annuler son Elysée Montmartre en 2006 et c’était tout juste fendu d’un timide passage par la capitale quelques semaines avant la sortie de son terrassant The Last Kind Words, le retour de DevilDriver sur nos terres en cette fin de tournée avait de quoi surprendre. Une occasion inespérée pour le public français d’enfin découvrir le dernier brûlot des américains en live, le quintet n’ayant livré lors de leur précédente venue qu’un court chapelet de quatre nouveaux morceaux. Rendez-vous était donc pris en ce pluvieux et grisonnant mardi 29 avril, conditions climatiques sans doute prémonitoires à la furie dont allaient témoigner les membres de DevilDriver quelques heures plus tard.
La soirée démarrait pourtant en laissant traîner en bouche un léger sentiment de déception. Présent sur la tournée Américaines et à l’origine annoncés sur l’affiche, les protégés de Joey Jordison, 3 Inches Of Blood, ne seront finalement pas de la partie. Leur absence est d’autant plus regrettable que le groupe n’a encore opéré aucun détour par la France afin de défendre un surprenant Fire Up The Blades teinté d’influences old-schools. Inconnu au bataillon et d’origine Néerlandaise, MagnaCult aura donc la lourde charge d’ouvrir les hostilités à l’aide d’un metal puissant et sans concession puisant ses influences aussi bien du côté de Pantera que des récents travaux de Chimaira. Relativement brouillon, le son dont se voit affublé le quintet n’aide pas à l’adhésion de morceaux ultra-compacts qui laisseront planer un certain sentiment de répétitivité, malgré des breaks plus éthérés se montrant relativement rares mais bien présents.
Dommage que le rendu sonore de la soirée ne les rendent pas plus audibles, tant ces incartades permettraient d’aérer la musique de MagnaCult, efficace et appréciable sur disque. Le groupe en est encore à ces premiers balbutiements, et le jeu de scène, relativement statique, s’en ressent forcément. Le frontman Sebastian et le bassiste Spit (qui gratifiera l’assistance d’un amusant headbanging de barbe) mènent quasiment à eux-seuls le show, ne se démontant pas face à un public peu réactifs qu’ils parviendront néanmoins à entraîner dans leur jeu en fin de set. Si la prestation restera dans l’ensemble critiquable, la présence de MagnaCult sur l’affiche aura donné l’occasion à l’assistance de découvrir par la suite un album véritablement prometteur (Synoré, publié dans une relative indifférence l’année dernière). Avec cette unique carte de visite au compteur, les musiciens remplissent parfaitement les trente minutes qui leurs sont attribuées, avant de laisser place aux maîtres de cérémonie.
Si le Trabendo s’est légèrement complété pendant le show de MagnaCult, la salle est néanmoins très loin d’afficher complet et ne présentera qu’une assistance clairsemée. Qu’importe, tant les notes de l’intro du set de DevilDriver suffisent à amasser une solide fan-base sur le devant de la scène. Là ou il aura fallu plus d’une vingtaine de minutes à leurs prédécesseurs pour lancer les premiers mouvements, il ne suffira à DevilDriver que d’un riff pour envoyer ses adeptes sur orbite. Le meurtrier « Not All Who Wander Are Lost » en l’occurence, enchaîné sans perdre une seconde sur « Clouds Over California », redoutable et incontestable hit provenant de The Last Kind Words.
Comme pour mieux s’excuser de la maigre place laissé à son dernier album lors de leur précédent passage en terres parisiennes, le quintet va se soir en balancer des extraits dans tous les recoins, ce qui ne sera pas pour déplaire à un public littéralement intenable. Dez Fafara, grimmé comme à son habitude, n’y sera d’ailleurs pas insensible, et motive les troupes à se lâcher complètement. Affluence minime oblige, les rois du circle pit ne reproduiront pas les exploits dont ils sont les investigateurs sur le continent anglais, mais l’intensité au sein de la fosse se sera sans aucun doute avérée en tous points similaire.
Car sur les planches, le tremblement de terre va bon train, les musiciens enquillants les morceaux dantesques et fédérateurs issus de leur trois productions sans faiblir. Le son se montre d’ailleurs à la hauteur de l'interprétation, adjoignant toute la férocité nécessaire à des titres en acier trempé comme « Grinfucked », « Nothing’s Wrong ? » et « Burning Sermon ». La batterie demeura néanmoins le seul point faible de la soirée, pâtissant par moments d’un son « casserole » légèrement gênant. La performance de John Boecklin a heureusement de quoi rattraper ces quelques lacunes de son, le batteur en imposant de par sa technique sans faille. Un bon point que l’on pourra attribuer à tous les musiciens, qui exceptés quelques pains sans réelle gravité sur les solos, retranscrivent de façon plutôt fidèles les morceaux. La technicité contrebalancera pour ces derniers la présence scénique, difficilement comparable à l’incroyable charisme émanant d’un Dez Fafara toujours au top de sa forme la quarantaine passée. Impressionnant. Le point fort du concert demeurera l’ultime tube « I Could Care Less », repris en chœur par l’assistance, à la suite duquel DevilDriver fera même une entorse à la politique sans surprise des set-lists américaines.
Les musiciens vont en effet nous sortir de leurs cartons poussiéreux une B-Side surprenante et bien connue des aficionados, « Guilty As Sin ». Le morceau aux forts relents heavy metal classic marque une petite pause non négligeable, avant que les cinq enfants terribles ne relancent la machine sur leur tout nouveau single « Head On To Heartache (Let Them Rot) ». La fin du set sera à l’image de la soirée : ultra-rodé et efficace. On craint un temps pour les murs du Trabendo, durement malmenés cinquante-cinq minutes durant, avant que le groupe ne s’efface. Un court rappel composé d’un appréciable « Ripped Apart » plus tard, et les musiciens regagnent définitivement les loges. Lessivé malgré cette courte prestation, le public videra les lieux le sourire aux lèvres. Dehors, les nuages couvrent toujours Paris. Le ciel semble juste descendu d’un étage supplémentaire.