A peine quelques semaines après l’arrivée remarquée de l’énigmatique et monolithique MoRT, Blut Aus Nord annonçait l’enregistrement d’un nouvel opus. Une sur-activité rare pour un groupe résolument anti-conventionnel, qui se permet avec ce nouvel opus un revirement de situation tout aussi surprenant que l’avait été son opus précédent. Car Odinist – The Destruction Of Reason By Illumination ne tisse guère de liens de parenté avec MoRT, mais reprend plutôt les choses là ou la troupe de Vindsval les avaient laissées quelques années auparavant.
Peut-on voir dans ce retour aux sources une plus grande facilité d’accès à la musique aux empereurs de ce que l’on pourra étiqueter comme post black metal ? Sûrement pas. Certes, Odinist demeure plus aisé à aborder que son prédécesseur pour les oreilles averties, mais conserve toutes les facettes atypiques spécifiques à Blut Aus Nord. La formation dessine comme toujours ses sonorités avec la même gamme de couleur : le noir prédominant. La teinte est même tyran, dominant le temps et l’espace, ne laissant aucun recoin de l’univers de Blut Aus Nord à une quelconque tentative d’incursion de la part de la concurrence. Les musiciens divisent par ailleurs leur album en neuf compositions (dont deux morceaux glissés sans annonce en fin de track-list) aux structures plus abordables là ou MoRT ne témoignait que d’une longue et étrange étendue, titres qui sans proposer véritablement de schémas accrocheurs et usités jusqu’à la corde à base de couplet / refrain / couplet se permettent d’avancer aux premier plan quelques gimmicks bien reconnaissables. Les parties de guitares se dressent en tant qu’unique élément mélodique sur un terreau de brutalité construit par une fusion basse / batterie d’une implacable et écrasante lourdeur. Une rythmique plombée à l’extrême, chaos sonore apocalyptique mettant en relief une six-cordes comme délivrée de ce carcan ténébreux, composante instrumentale qui servira presque de fil rouge à cette plongée dans les recoins les plus sombres et terrifiants de l’esprit (« Mystic Absolu », « Odinist », véritable apothéose placée à mi-parcours).
Vindsval et ses sbires peuplent les compositions d’Odinist de thèmes noctambules enivrants revenant au sein d’une même composition avec une répétitivité quasi-hypnotique lancinante appréciable (« Ellipsis », le bluffant « The Sounds Of The Universe ») ainsi qu’une dimension mystique toute aussi riche en distorsions que par le passé. Odinist est un album malsain et habité, une succession d’univers cohérents et desepérés sur lesquels la voix de Vindsval fait une nouvelle fois des merveilles. Bien qu’indiscutablement peu varié, le timbre vocal vampirique hululant s’accorde à la perfection aux instrumentations aussi déglinguées que dénuées de toute luminosité. Le hurleur en chef cède sa place de meneur aux tirades de guitares, se contentant pour sa part d’apporter un accompagnement de qualité à base d’incantations graves et arrachées (« The Cycle Of The Cycles »). Vindsval utilise le chant comme un instrument supplémentaire gravitant autour des thèmes récurrents, les brides de paroles étant de toute manière absolument imperceptibles.
Si Odinist amène presque comme l’annonce son titre à la destruction de toute raison passé trente-cinq éprouvantes minutes, l’illumination demeurera bel et bien un mystère. Ce nouvel opus est comme toujours teinté dans une noirceur visqueuse et absolue, mais ouvre légèrement la porte à ceux qui aimeraient s’aventurer sur les terrains de Blut Aus Nord.
.: Tracklist :.
01. An Element Of Flesh
02. The Sounds Of The Universe
03. Odinist
04. A Few Shreds Of Thoughs
05. Ellipsis
06. Mystic Absolu
07. The Cycle Of The Cycles