On savait la tendance actuelle en matière de rock plongée dans un véritable revival eighties. Un phénomène de mode matérialisé par une invasion de formation s’affublant de l’inévitable « The » en guise de marque de fabrique. Mais la musique heavy restait elle plus solidement ancrée dans son époque, bien que des représentants tels que Trivium puisent dans l’âge d’or quelques éléments à marier à une formule moderne. Il en sera désormais autrement : originaires de la sainte patrie du Heavy, l’Australie, les jeunots d’Airbourne envahissent enfin le monde avec un premier essai bénéficiant d’un incroyable buzz.
Certains disquaires ne s’y étaient d’ailleurs pas trompés. Bien avant que Roadrunner ne se décide à distribuer Runnin’ Wild dans l’hexagone, de nombreux exemplaires importés de ce premier opus fleurissaient déjà dans les rayonnages. La réputation acquise en à peine plus d’un EP avait de quoi laisser rêveur, le groupe ayant assuré les premières parties de légendes du calibre des Rolling Stones ainsi que Motley Crüe, mais force est de constater à l’écoute de ces onze compositions bien trempées qu’elle n’était en rien mensongère. Car si les influences heavy de la vieille école demeurent plus qu’identifiables, Airbourne se dresse quasiment en unique représentant actuel d’un mouvement que l’on pensait voir s’éteindre avec ses plus vieux et derniers représentants. AC/DC peut prendre sa retraite sans crainte, tant le fabuleux binôme Young / Scott d’antan semble avoir enfin trouvé de dignes successeurs (« Heartbreaker », une référence à l’album Ballbreaker ?). Le chant de Joel O’Keeffe se rapproche en effet au plus près de celui du regretté Bon Scott, le frontman affichant un timbre chaud et puissant, influencé d’une époque ou les chanteurs heavy abreuvés de Jack Daniels perchaient leurs tirades vocales dans les aiguës. Une technique que O’Keeffe s’approprie à merveille, posant sur bandes une série de refrains ultra-entraînants soutenus par les inévitables backing vocals assurés par le duo David Roads / Justin Street (« Girls In Black », le single « Too Much, Too Young, Too Fast » et son refrain en forme d’hymne des stades).
Musicalement, le quatuor affiche les mêmes prétentions, mais surtout un savoir-faire inébranlable et une technicité virtuose. Dire qu’Airbourne s’est gavé d’AC/DC durant ses jeunes années serait un doux euphémisme, tant les musiciens excellent à construire des morceaux à l’impact similaire. Des riffs simples et sautillants qui vont droit au but, dénués d’une lourdeur excessive au profit au profit d’une légère touche bluesy, fusant sur des rythmiques binaires appuyées (« Runnin’ Wild », « Fat City »). Une série d’accords tranchants et bien rock’n’roll qui construisent un canevas propice à un véritable festival pyrotechnique de solos en tous genres, composante essentielle dont Airbourne ne se prive heureusement pas. Joel O’Keeffe fait preuve d’un indiscutable talent de composition, et sert une conséquente poignée d’interventions lead bien senties, passades héroïques décoiffantes directement importées des années soixante-dix (« Stand Up For Rock’n’Roll », « Cheap Wine & Cheaper Women »). La production ainsi que le mixage mettent par ailleurs parfaitement en exsangue l’aspect old-school de la musique d’Airbourne, lui conférant un son quasi-live et vinyle parfaitement adapté (les backing-vocals semblent résonner loin derrière).
Si Airbourne n’a rien du messie, Runnin’ Wild ne faisant pas preuve d’une originalité débordante, le quatuor se positionne comme le « jeune-vieux groupe » le plus rafraîchissant du moment. Nul doute que sur scène, leur son fera sévèrement taper du pied. Un excellente mise en bouche avant le prochain AC/DC.
.: Tracklist :.
01. Stand Up For Rock 'N' Roll
02. Runnin' Wild
03. Too Much, Too Young, Too Fast
04. Diamond In The Rough
05. Fat City
06. Blackjack
07. What's Eatin' You
08. Girls In Black
09. Cheap Wine & Cheaper Women
10. Heartbreaker
11. Let's Ride