Splits et reformations à répétition, le parcours de Coalesce est à l’image de sa musique, chaotique. Une carrière semée d’embuches qui auront dans un sens contribuées, en parallèle d’une flopée d’albums aussi inventifs que barrés, à faire du quatuor l’un des groupes cultes de la scène underground américaine. Retour en grâce, Ox traduit aujourd’hui en trente-cinq minutes les envies primaires de la formation originaire de Kansas City : hargne et urgence. Des ingrédients indispensables à un album qui s’inscrit sans nul doute parmi les plus marquants de cette première moitié d’année.
Premier véritable opus composé en près de dix années, Ox est un furieux pavé de hardcore déstructuré et bouillonnant. Le quartuor ne se réinvente pas ici en profondeur, enroulant ses compositions dans une débauche d’électricité empruntant aussi bien au mathcore le plus rêche qu’au punk pour l’aspect brut de décoffrage de la production. Sauvages, ces quatorze nouvelles compositions déboulonnent les acquis et les formules calibrées avec la même folie que les précédents travaux du combo, les musiciens s’épanouissant pleinement dans les structures les plus alambiquées, compexes et inattendues. Le hardcore de Coalesce ne se profile pas comme une science exacte, la musique du groupe préférant avancer des propriétés mutagènes. Apocalyptiques, les ossatures vrillent dans les sonorités les plus distordues à grands renforts de guitares tonitruantes (« The Purveyor Of Novelty And Nonsense », « The Plot Against My Love »). A l’instar des regrettés cousins de Botch, la frontière entre riff pesant utilisé sans parcimonie et étendues perchées stridentes tend à être franchie à répétition, la très nette préférence du groupe pour les tempos les plus virulents démontrant de plus d’une incroyable aisance à concevoir des titres ultra-entrainants et étonnamment accrocheurs. Car si Ox témoigne d’un aspect résolument barré et anti-conformiste, il n’en reste pas moins le disque le plus accessible de la discographie de Coalesce.
Malgré le côté alambiqué de l’écriture des compositions, les morceaux de Ox bénéficient d’une production capté sur le vif, mais greffe à Ox un son à la fois clair et puissant permettant un accès aisé à l’univers du groupe. Sans effectuer de virage à 360 % vis à vis de leurs précédentes expérimentations, Coalesce à de plus opté pour une plus grande aération de ses incartades sonores. Le quatuor ponctue son travail de courtes respirations, plaçant de ci et là quelques interludes mélodiquement soignées (le bluesy « Where Satires Sour », « We Have Lost Our Will ») rompant avec l’aspect oppressant et déjanté instauré par ses compositions. Sans briser la cohérence de son œuvre, Coalesce lui confère une diversité aussi osée que bienvenue, ces passades stratosphériques apportant au sein de la composition des sonorités inattendues et rarement employées sur un disque de ce calibre (le break western de « Dead Is Dead »). Arraché, le chant de Sean Ingram habille enfin les instrumentations avec viscéralité, le frontman étant passé maitre dans les variations hurlées et schizophréniques. Habité, intègre, ce dernier dévie cependant de son registre de prédilection à l’occasion de rares étendues moins épileptiques, imposant un timbre clair aussi surprenant qu’appréciable (« The Comedian In Question », le pont mystiques et chaleureux de l’explosif « In My Wake, For My Own »).
Burné, azimuté, déroutant. Ox est un disque d’une incroyable intensité, imposant une fois de plus un groupe qui parvient à trouver un juste milieu entre écriture déglinguée et redoutable efficacité. Un véritable tour de force, pour une reformation qui n’a définitivement rien d’anecdotique.
.: Tracklist :.
01. The Plot Against My Love
02. The Comedian In Question
03. Wild Ox Moan
04. Designed To Break A Man
05. Where Satires Sour
06. The Villain We Won't Deny
07. The Purveyor Of Novelty And Nonsense
08. In My Wake, For My Own
09. New Voids In One's Resolve
10. We Have Lost Our Will
11. Questions To Root Out Fools
12. By What We Refuse
13. Dead Is Dead
14. There Is A Word Hidden In The Ground