Zakk Wylde et Ozzy Osbourne cultivent une bien étrange relation. Une nouvelle fois limogé par le prince des ténèbres, le guitariste virtuose n’aura pourtant eu besoin que de quelques mois pour ré-activer Black Label Society, formation au sein de laquelle le musicien exerce en dictateur incontesté. Faisant fi des diagnostics qui le déclaraient au plus mal au cours de l’année précédente, Wylde rétorque avec un huitième album studio directement inscrit dans la continuité de son prédécesseur, le critiqué Shot To Hell. Un habituel changement de line-up – l’histoire du groupe étant jalonnée d’indénombrables mouvements de personnel – marquent l’unique évolution dont vient témoigner Order Of The Black, l’album sonnant comme un pur concentré de Black Label Society.
Originalité et évolution demeurent deux notions partiellement ignorées par Zakk Wylde. Si le musicien touche à tout à connu un net changement de cap à l’occasion de 1919 Eternal, opus charnière plus prompt à s’aventurer vers les mélodies bluesy, Black Label Society tient depuis fermement la barre de son navire. Biberonné au heavy metal, Wylde ne propose rien de fondamentalement nouveau, mais s’affranchit une nouvelle fois de son art avec un incontestable panache. Exit fioritures et poudre aux yeux, le guitariste pose sur bandes un furieux condensé de rock’n’roll sudiste, avec tout ce que cela incombe de clichés burinés et de guitares hurlantes. Alimentée au whisky frelaté, la machine tourne toujours à plein régime. Voire même sur une rythmique légèrement plus soutenue que Shot To Hell, Order Of The Black dégueulant de compositions rapides blindées de riffs gras et typiquement rednecks (le redoutable « War Of Heaven », « Crazy Horse » et ses accords distordus). Techniques, furibondes, les guitares règnent en maitres sur des canevas bardés d’effluves arides et cradasses, les relents Stoner-Rock enrobant les entournures de compositions efficaces et directes. Artisan appliqué, Wylde conserve en effet une extraordinaire propension à enluminer une composition à l’architecture originelle basique (« Parade Of The Dead », « Riders Of The Damned ») d’envolées et d’harmonies particulièrement travaillées.
Botte secrète de Black Label Society, l’intervention en solo reste l’ultime valeur ajoutée de Order Of The Black. Rapide et déboussolant, le travail de Wylde fait preuve d’un savoir-faire inchangé en la matière (« Black Sunday »), le musicien évitant une nouvelle fois avec brio de sombrer dans le superflu démonstratif. Une technicité qui n’empêche les ballades de circonstances, la formation misant comme d’ordinaire sur les contrastes les plus abrupts. Aussi bien inspiré par le heavy brut de décoffrage que par le blues, Wylde s'éloigne de son univers de prédilection initial à l'occasion d’un important chapelet de mid-tempos – quatre – certes agréables, mais non exempts de faiblesses. Si la courte expérimentation flamenco (« Chupacabra ») ou l’apport des cordes (« January », plutôt appréciable) apportent un coup de fouet aussi appréciable que surprenant, les cassures rythmiques imposées par les interventions systématiques d’un piano langoureux engluent les morceaux dans un marasme mélodique sans véritables reliefs. Reste la voix de Zakk Wylde, impeccable et définitivement ancrées dans les eighties. Nanti d’un timbre haut perché mais jamais criard, le frontman excelle sur les tempos relevés tout en démontrant d’une très bonne adaptabilité sur les occasionnelles baisses d’intensités.
Si Order Of The Black ne présente rien de bien neuf sous le soleil de l’ouest Américain, Black Label Society s'acquitte une nouvelle fois d’un bon album. Bien que perfectible, ce dernier ne fait jamais preuve de prétentions autre que celle de proposer un rock’n’roll bien huilé. Contrat respecté.
.: Tracklist :.
01. Crazy Horse
02. Overlord
03. Parade of the Dead
04. Darkest Days
05. Black Sunday
06. Southern Dissolution
07. Time Waits for no One
08. Godspeed Hell Bound
09. War of Heaven
10. Shallow Grave
11. Chupacabra
12. Riders of the Damned
13. January