La tournée du Roadshow (Fred, Salsedo, Mauss et Zoé Avril) était de passage à Nantes. Occasion pour rencontrer un artiste authentique qui vient tout juste de sortir son second opus sous le nom de Mes Graines, successeur de Sauter du nid. Rencontre avec Fred quelques heures avant son concert à la salle du Ferrailleur pour une interview .
Hervé : Après avoir sauté du nid en 2003, tu prends ton envol avec Mes Graines ton deuxième opus, sorti depuis un mois jour pour jour. Est ce que ce second album de l’homme bio porte ses fruits face aux yeux des critiques et du public ?
Fred : Je ne voulais pas reproduire le premier album. Je ne voulais pas faire un album qui soit, sans méchanceté, un album qui soit classé dans la chanson française guitare/voix, fait à la maison. Je voulais faire un disque en prenant le temps de le faire, m’entourer d’un réalisateur qui a déjà touché à autre chose. C’est quelqu’un que j’admire et qui m’a surpris sur des productions qu’il avait faite.
Hervé : Ce réalisateur c’est Jean Lamotte ? Il a travaillé avec Noir Désir.
Fred : Tout à fait c’est Jean Lamotte. Il a travaillé avec Noir Désir sur Des visages des figures, Salif Keita… J’avais toujours été surpris par ses productions. Puis je pense que le chemin qui est en train de se faire, les personnes qui suivaient le premier album, qui étaient très fan de cet opus et qui m’ont répété plusieurs fois lors des concerts ou même sur myspace, on attend le prochain album, quand est ce qu’il arrive ? Avoir travaillé pour leur offrir quelque chose qui ne reste pas seulement dans la même veine et qui apporte une nouveauté, c’est intéressant.
Hervé : Pour ceux qui ne te connaissent pas, est ce que tu peux expliquer tes débuts dans le milieu musical ? Tu avais sorti un EP assez prometteur qui avait été l’élément déclencheur…
Fred : Le premier 6 titres, je l’ai autoproduit et il m’a permis de faire pas mal de dates en France. Il y avait donc 6 titres dont deux titres qui ont été repris sur cet album (Sauter du Nid). Ma vie en maison de disque commence avec cet EP.{multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Hervé : Ton premier album est signé chez Sony. Est ce que cette major t’a découvert directement ou il y a eu des intermédiaires ?
Fred : A l’époque je fais ce 6 titres puis je m’adresse à une personne qui est devenue par la suite mon manager. Il travaille sur Deux Temps Trois Mouvements aujourd’hui. Il s’occupe aussi de Camille Bazbaz, R-Wan de Java, Chet, NDE… Je lui ai donné l’EP et il a commencé à démarcher pour trouver des concerts. Il m’a aidé à trouver des concerts dans des clubs, dans différentes salles de milieux alternatifs qui laissaient place à ce que je voulais faire sur scène. Au début, avec le plan guitare/voix, ces salles attendaient de voir ce que ça allait donner car c’était un peu frileux sur la programmation. Il a fallut faire son chemin, prouver qu’il y avait un projet plutôt à long terme et qui n’était pas un délire de fin d’adolescence où j’avais juste envie de prendre une guitare. La peur lorsque tu commences ce métier de musicien, c’est est ce que je vais en avoir assez pour pouvoir continuer ? On pourrait aussi faire différents métiers dans sa vie !
Hervé : Mes Graines est signé sur une major, Sony. Avec ton passé de voyageur, n’aurais tu pas voulu être signé sur un label indépendant ?
Fred : Non parce que je connaissais pas mal le milieu indépendant. Mon manager avec qui je travaille vient du milieu indé et je sais que dans ce milieu au bout d’un moment, tu restes avec peu de moyens pour défendre un projet artistique qui allait rester dans l’ombre, il fallait quand même démocratiser un petit peu ce que je faisais. Quand je dis populaire, je ne dis pas baisser son froc et faire n’importe quoi, faire du populaire pour faire du populo ! Ta qualité artistique, tu la découvres et tu la renforces d’albums en albums et de concerts en concerts. Il fallait faire quelque chose où il y avait les moyens derrière pour populariser ce que je faisais et donner une plus grande écoute.
Hervé : Fred, c’est un sentiment que je possède par rapport a toi et qui est partagé avec d’autres personnes connaissant ton parcours musical. Tu es signé chez Sony mais en même temps tu n’es pas trop médiatisé, tu n’es pas surmédiatisé et c’est ce qui fait un peu son charme. Le public suit cette voie.
Fred : Très bien si le public suit en plus si c’est ressenti par des personnes comme toi qui font des critiques d’albums et qui rencontrent d’autres artistes.
Hervé : Personnellement c’est ce qui m’a plu chez toi sans compter tes compositions.
Fred : Merci ! Tu vois aujourd’hui il y a un article sur le Roadshow dans Libération parlant de cette tournée et des concerts que je fais habituellement. L’auteur de cet article disait que l’on aime ou que l’on n’aime pas c’est authentique. C’était le sentiment que je voulais qu’il fallait garder en allant travailler avec une major. C’est pour cela que le manager qui vient du milieu indépendant sa force c’est d’être assez punk dans les relations qu’il peut avoir avec le label en disant clairement son avis dès que ça ne va pas.{multithumb thumb_width=450 thumb_height=320}
Hervé : Hier soir tu jouais presque à Domicile, à Paris Guyancourt en première partie de Bazbaz. Ce soir, tu es à Nantes pour le Roadshow où tu partages la scène avec Salsedo, Mauss et Zoé Avril. Comment se passe cette tournée assez rythmée ?
Fred : Ça va ! (Rires !) Il y a des fois où tu as du mal à accumuler toutes les choses. C’est surtout le matin que c’est le plus dur (Rires !). Il y a un rythme de boulot sur une tournée. Tu as du mal à quitter l’endroit où tu as joué le soir, tu as envie de rester avec les gens, pour les fois où tu joues bien. Il y a des fois où tu ne joues pas bien et tu as envie de rentrer à l’hôtel si tu es en province ou bien tu rentres chez toi (Rires !) Mais sur la tournée le plus dur c’est la fatigue. Tu es motivé par ce qui va te tenir le soir sur scène, l’envie de bien faire ton show, le plaisir de découvrir une scène, découvrir comment les gens réagissent face à ta musique… Mais on s’occupe bien de nous, on n’a rien à faire, on nous fait à manger etc… Par contre l’année dernière j’ai vécu en province où j’ai connu le désœuvrement donc je savoure toutes les choses qui me viennent c’est quand même cool ! Passer sa journée à faire du son, commencer à travailler sur un nouvel album, correspondre sur le myspace, voir les critiques des gens qui étaient au concert…
Hervé : En tout cas hier soir tu as eu de bonnes critiques pour ta première partie du concert de Camille Bazbaz.
Fred : Ah cool !
Hervé : Camille Bazbaz a travaillé avec toi pour le premier album ?
Fred : Oui et même sur le deuxième album. Il y a un morceau qui s’appelle « Toi et ton chat » sur lequel il fait les claviers, l’orgue…
Hervé : Beaucoup de personnes viennent pour te voir jouer en live et même lorsque tu es programmé en tant que première partie. Tu possèdes un public fidèle…
Fred : Oui. C’est précieux un public comme celui là. Ce n’est pas un public volatil. Les gens sont présents, ils ont écouté l’album pour venir aux concerts. Je sais qu’il y a peu de communication autour de moi …
Hervé : C’est la chose que je te disais tout à l’heure au niveau de la communication.
Fred : En même temps, il y a une com que j’ai adoré c’est celle du terrain. Par exemple Noir Désir, le groupe ne se pointait pas sur toutes les médias même si depuis quelques années, il y a certains événements qui ont précipités leur communication. C’est dur de garder cette position lorsque tu es dans une maison de disque, il faut tenir la barre pour ne pas faire n’importe quoi. Sur le premier album on m’a proposé d’aller faire Paris match etc… où on me pose des conneries comme Qu’est ce que vous mangé ? Comment est votre intérieur ? Il n’y a aucun intérêt à poser des questions comme celle là.
Hervé : Considéres tu Mes Graines comme l’album de la confirmation ?
Fred : Dans les trois albums que j’ai fais, je considère Mes Graines comme l’album de la confirmation.
Hervé : Tu considères l’Ep comme un album…
Fred : Oui, on m’a appris à le considérer comme un album en se disant que c’est quelque chose que j’ai réalisé. On ne peut pas considère une création musicale comme un album seulement lorsqu’il est disponible dans le commerce. Mes Graines, c’est un album où j’ai appris des choses, tu apprends à travailler. Ce que tu as fais en 5 ans sans penser à ce que tu allais faire un album, signer en maison de disque et commencer à tourner tout à coup ça devient qu’n deux ans tu dois écrire textes, musique, trouver le fil conducteur et réaliser quelque chose qui tienne la route. Tu vas puiser plus loin en toi. Dans cet album j’avais envie d’avoir ce regard sur le pays dans lequel je vis, les tensions sociales, le rapport entre la France et l’Afrique. Des souvenirs plus personnels comme sur le morceau « Déluge » où c’est des souvenirs de région parisienne. Le prochain album sera peut etre un album de consécration, si toutefois j’ai envie de revenir à quelque chose de plus épuré. Après, la consécration peut être dans les ventes ou dans la reconnaissance. Je sais qu’un niveau des médias il y a une certaine reconnaissance qui se fait parce qu’on se dit que ce mec là suit son parcours.
Merci à Fred pour avoir répondu à mes questions. Merci à Patricia Téglia pour m’avoir permis cette rencontre avec Fred.