Cult Of Luna, en live, ce n’est pas une expérience anodine. Le groupe suédois excelle dans l’art de nous emmener loin, dans les hautes sphères, tout en dégageant une puissance incroyable. Le concert final de leur dernière tournée française, à l’Elysée Montmartre, n’a pas échappé à la règle, vous pourrez d’ailleurs le constater en découvrant notre live-report en cliquant ici. Nous, forcément, on s’est dit qu’un groupe qui repousse les limites de la création musicale aussi loin avait forcément des choses à dire, et ça n’a pas raté. Johannes Persson, guitariste, second chanteur et principal compositeur du combo, s’est plié au jeu de l’interview avec nous, pour votre plus grand plaisir. Et vous allez le voir, le bonhomme est aussi intéressant que la musique qu’il compose. Enregistreur lancé.
Vacarm : Salut Johannes, merci de nous avoir accordé du temps. Le groupe est actuellement en tournée européenne, comprenant beaucoup de dates françaises, ça se passe bien pour vous ?
Johannes : Oui, on est vraiment très contents, en fait on arrive à la fin de la tournée, puisque ce soir c'est le tout dernier concert. On a beaucoup voyagé pendant cette tournée, on a vraiment envie de faire en sorte que ce soit le meilleur show possible, et puis rentrer dormir !
Qu'est ce qui vous a décidés de jouer autant de dates en France ?
Je ne sais pas. On a commencé à bosser avec un nouveau tourneur en France, qui nous a proposé cette tournée, et la France a toujours été d'un très bon accueil, donc on a pensé… en fait, a chaque fois qu'on tourne en Europe, on joue toujours 2 ou 3 fois en France… Avec cet album, on a effectue une tournée européenne qui est passée partout sauf en France (sans compter leur petite escale remarquée au Hellfest, ndlr) donc on a voulu revenir pour régler cette lacune.
C'est donc la 1ère fois que vous passez en France pour défendre votre dernier effort, Eternal Kingdom, depuis le Hellfest, où d'ailleurs votre concert a été remarqué comme l'un des meilleurs du festival. Qu'est ce qui vous a décidés de jouer là bas, vu votre mauvaise expérience avec l'organisation de l'équipe du Furyfest (en 2005) ?
Je ne sais pas ! Je n'ai aucune idée de pourquoi on est revenus après ce… désastre total. Je ne sais pas mais je suis très content quand même, parce que le truc bizarre, c'est que le Furyfest, c'était le chaos, c'était la plus mauvaise organisation que j'ai jamais eu l'occasion de rencontrer. Je préfère même pas commencer à parler de toute la merde qui nous est arrivée là-bas. Mais le truc, c'était que le Hellfest avait l'une des meilleures organisations de festival qu'on ait pu avoir, c'était juste génial. Je suis vraiment content qu'on ait pu jouer ce concert. Un groupe jouait juste avant nous sous le chapiteau, je ne me rappelle plus du nom, et le chapiteau était à moitié plein. On a commencé à se dire qu'on la remplirait jamais, que ça serait pas un show facile, on a commencé à se préparer et quand c'était notre tour, le chapiteau était rempli, et le concert était excellent.
Parlons un peu du dernier album, Eternal Kingdom. Beaucoup de critiques ont pu dire que cet album était un retour aux sources, tu es d'accord, ou vos intentions étaient différentes ?
Je ne dirais pas que… En fait je n'aime pas l'idée d’avancer et de reculer, surtout quand on évoque l'art. Je vois bien le truc, mais nous, on essaie d'être en mouvement, tout le temps. Y'a un paquet de groupes qui font la même chose, tout le temps. Ce n'est pas notre intention, on essaie de garder un mouvement perpétuel, pour ne pas se coincer à un endroit. Somewhere Along The Highway est notre plus gros succès commercial, il a obtenu cet award chez nous pour le meilleur album rock de l'année, et après l'avoir défendu sur scène, on s'est dit… en fait, quand un groupe connaît une certaine reconnaissance artistique, il a tendance à se dire qu'il a intérêt à faire en sorte que l'album suivant ressemble à ce qu'ils viennent de faire. Nous, juste après avoir quitté la scène, on s'est dit « composons un album complètement différent ». Avec plus de pédales de disto que de delays ! (rires)
Vous sortez votre premier DVD, nommé Fire Was Born, dans quelques semaines, tu peux nous en dire un peu plus ? à quoi doit-on s'attendre ?
On a donc enregistré notre concert du 1er Juillet à Londres, à la Scala, ça dure environ une heure et demie. C'était un très bon show, c'était un peu étrange de jouer avec quelque chose comme 5 caméras sur scène et de savoir que ça tourne… après certains groupes peuvent se permettre de se faire filmer plusieurs fois, mais on avait droit qu'à un essai, on n'avait pas le droit de foirer. Donc c'était plutôt une expérience étrange. Donc on retrouve aussi une interview ou on répond à des questions posés par nos fans, et tous les clips qu'on a pu tourner, et peut être plus, tout dépend de l'endroit où tu chercheras dans le DVD !
La sortie a été repoussée, C'est un problème technique ?
Le problème, c'était qu’on 'était en train de faire une tournée en Australie, j'avais envoyé le master à Earache Records, ils ont approuvé le contenu du DVD, mais il y a eu des problèmes de pressage. Je ne pouvais rien faire pour régler ça, parce qu'on était en Australie, donc j'ai du attendre environ deux semaines avant que je puisse rentrer chez moi, et bosser sur le problème. C'est vraiment un mauvais coup du hasard.
Au final, le DVD sortira quand ?
Je crois que c'est le 27 Avril.
Sur le DVD, vous avez doublé la section rythmique, avec deux batteurs, et vous avez gardé ce lineup pour quelques dates. C'est aussi votre désir de ne jamais rester statique, de toujours expérimenter des nouveaux trucs ?
Le fait de jouer avec deux batteurs était vraiment une chose géniale à faire. Ca amène le palier de puissance en live à un tout autre niveau. Je pense qu'on va essayer de jouer avec deux batteurs aussi souvent que l'on pourra.
Avec le temps, comment visualisez vous le virage que vous avez pris au moment de Salvation, qui a apporté de profonds changements dans le son de Cult Of Luna ?
La façon dont je vois ça, c'est que notre 1er album était avant tout composé de vieux morceaux qu'on avait déjà à ce moment-là. Sur le deuxième album, The Beyond, je pense qu'on a fait la même chose, mais qu'on l'a perfectionné, on a gardé la même formule, et on a écrit des nouveaux morceaux, avec le même état d'esprit. Et on a poussé l'idée aussi loin qu'on a pu. Donc, sur Salvation, on a voulu partir dans une direction totalement différente, ce dont je te parlais tout à l'heure. Je pense que c'est vraiment un bon album. Sur Somewhere Along The Highway, on peut dire qu'il y a la même relation avec Salvation que The Beyond peut avoir avec le 1er. On a aussi perfectionné le son de Salvation. Mais je ne crois pas qu'on va rester dans ce système de diptyque. Je veux dire, je n'ai vraiment aucune idée de ce qui va se passer sur le prochain album. Mais on va faire quelque chose de différent.
Tu aimes encore les deux premiers albums avec le temps ?
La question n'est pas de savoir si je les aime ou pas, la question est de savoir si il étaient bons à l'époque où on les a composés. Et je pense qu'ils le sont, il n'y a rien que je puisse renier aujourd'hui. On ne peut pas juger la musique comme ça. Je pense qu'e c'étaient de très bons albums en leur temps. Je me souviens qu'après avoir enregistré The Beyond, on a voulu dire à notre label qu'on serait jamais capables de faire quelque chose de mieux. Et avec le recul on a dépassé cet album trois fois. Tu sais, c'est toujours le dernier album le mieux !
Vous avez été comparés sans cesse à Isis et Neurosis depuis le début de votre carrière. Cette comparaison vous agace, n'est-ce pas ?
Je m'en fous, pour être honnête. Je veux dire, le job des journalistes, c'est de juger la musique, le nôtre c'est de l'écrire, et je vois pas pourquoi je devrais sortir de mon rôle. Mais ce que je ressens, c'est que les journalistes, surtout européens, font souvent de telles comparaisons. Hmm, je pense que je saisis la raison de ce genre de question, « est-ce que vous avez été influencés par Isis ». Premièrement, 50% des personnes qui composent la musique du groupe n'ont tout simplement jamais écouté Isis de leur vie. Et je pense que c'est plutôt une sorte de « complexe du petit frère » par rapport à ce qui peut de faire aux Etats-Unis, si tu vois ce que je veux dire. Si tu les avais devant toi, Tu demanderais si Isis a été influencé par nous ? Non, et après ? Nous sommes la depuis 10 ans, et nous aimons la musique depuis bien plus de temps encore. Alors s'il vous plait, vraiment, essayez d'avoir plus confiance en nous. Il y a beaucoup d'excellents groupes européens, essayez de leur donner le respect qu'ils méritent, surtout la scène métal suédoise, qui est bourrée de bons groupes qui méritent vraiment mieux que d'être comparés à des groupes américains. Voilà, c'est souvent comme ça que je réponds à cette question !
Donc pour continuer sur le même sujet, tu as dit que les influences du groupe n'étaient pas très axées métal. Quelles sont vos influences, en terme de musique comme en terme d'art en général ?
Hmm… je pense que c'est une question que vous, les journalistes, êtes mieux à même de répondre que moi. Pour ma façon d'écrire par exemple, quand j'ai commencé à écrire, j'étais jeune, je devais avoir 15 ou 16 ans, à cet âge là tu as tes groupes, que tu écoutes tout le temps, tu commences à écrire comme eux, tu copies leurs riffs, tout ça. Après ça, tu apprends à te libérer, et les choses se font un peu en pilotage automatique. Je sais ce que j'aime lire, ce que j'aime regarder, mais je pense qu'au fond, rien de tout cela ne t'inspire de façon consciente. J'écris des chansons, et ce qui se passe doit se passer, mais, à un niveau subconscient, des choses rentrent, et me font grandir en tant que personne. Et oui, cela a un énorme impact sur la musique que j'écris, mais ce n'est pas quelque chose que je pense, c'est quelque chose qui se passe. Et je pense donc que vous êtes mieux placés que moi pour ressentir ces influences.
Beaucoup de gens semblent penser qu'il y a une sorte de son typiquement suédois, qui serait plus froid, plus atmosphérique, cette impression étant visiblement dûe à l'endroit. Je ne sais pas si je suis d'accord, mais je voulais avoir votre avis sur la question…
Je ne sais pas si il y a un son typiquement suédois, j'en ai aucune idée, on n'en a jamais vraiment fait partie. Tu vois, Klas, moi, Erik et Magnus, les gens qui ont commencé le groupe, on avait un background plutôt hardcore. Dans le nord de la Suède, on n’a jamais été influencé par quoi que ce soit de réellement suédois, donc je ne pense pas que cela soit vrai pour nous.
Eternal Kingdom est sorti il y a 10 mois de cela, et vous avez tendance à composer et enregistrer vos albums très rapidement. Vous avez déjà commencé à travailler des choses pour le prochain ? vous avez une idée de la direction musicale ?
Je ne sais pas vraiment. Mais on ne vas pas travailler aussi rapidement. Nous avons pris l’habitude de travailler nos albums et de les sortir dans des cycles de 18 mois, et ça ne sera pas comme ça cette fois. On va prendre notre temps. En fait, les fois d’avant, on réservait le studio, et on se disait qu’avant d’y rentrer, on ferait mieux d’avoir quelque chose de prêt à enregistrer. La ça sera composition d’abord, puis on décidera d’aller en studio une fois l’album complètement composé.
Comment se portent vos side-projects ? je pense à Khoma.
J’étais en train de composer tout à l’heure dans la loge, et oui, c’est un truc qu’on va se préparer à faire. Je pense qu’on va entrer en studio dans pas longtemps, deux mois, et qu’on va sortir un album, ouais.
Dernière question : quel est ton mets favori ?
Wow, c’est vraiment une question difficile ! Tu sais, je suis végétarien, mais à part ça je mange à peu près n’importe quoi. Je veux dire, mets-moi devant une assiette, donne-moi un couteau et une fourchette et c’est bon ! je ne suis pas difficile, je ne suis pas un genre de gourmet, ce genre de truc. Il est plus facile pour moi de parler de nourriture que je déteste. En France, vous avez tendance à mettre de la viande partout. « poulet », « jambon » (en français dans le texte, ndlr), c’est partout pareil ici, il est impossible de trouver un sandwich avec du fromage et rien d’autre !
Merci beaucoup, et bonne chance pour ton concert.
Merci à toi !