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Interview d’AqME : sombres et forts, envers et contre tout

AqME avance, mue, progresse. Mature, complexe et fidèle à l’identité du groupe, le septième album des Parisiens se profile comme un véritable coup de maître. Retour sur la genèse du disque avec Vincent Peignart-Mancini, qui succède à Thomas Thirrion en s’affranchissant d’un chant versatile terriblement accrocheur.

Dévisager Dieu vient de sortir. Quels sont les premiers retours ?

Vincent : Pour l’instant, les réactions sont plutôt positives. Nous sommes très confiants, de bonnes nouvelles tombent tous les jours, le buzz autour de ce disque est plutôt à notre avantage. Nous avons déjà effectué plusieurs interviews et les journalistes ont vraiment apprécié l’album. C’est également le cas de certains de mes amis qui n’étaient pas forcément intéressés par la musique d’AqME. Certains médias parfois critiques envers le groupe ont d’ailleurs plutôt bien réagi lorsque les deux premiers extraits ont été dévoilés. Nous partons confiants.

Il s’agit de ton premier « véritable » album avec AqME. L’EP Les Sentiers de l’Aube s’était fait dans l’urgence et la douleur sur demande du label. Comment s’est déroulée la phase de composition pour Dévisager Dieu ?

L’EP avait été préparé dans un contexte particulier. J’arrivais tout juste dans le groupe, c’était un gros changement pour les musiciens comme pour le public. Il fallait marquer le coup, réagir rapidement et prouver qu’AqME était toujours là. Avec le recul, nous ne sommes que moyennement satisfaits des titres de cet EP. La tournée à été très formatrice, des liens se sont crées, les gens étaient toujours présents. Nous avons passé d’excellents moments en tant que groupe, sur la route, avant et après les concerts. Pour l’album, nous avions envie de faire ce que l’on aimait, de se donner le temps. Nous avons longuement travaillé sur les morceaux, nous voulions quelque chose de plus réfléchi, plus complexe. Les Sentiers de l’Aube était un instantané de la situation de l’époque, de toute cette frustration découlant du changement de line-up. Pour Dévisager Dieu, nous avons jeté beaucoup de chansons avant d’arriver à l’équilibre recherché.

Les morceaux intégrés sur Les Sentiers de l’Aube étaient très bruts. La capacité du groupe à jouer des contrastes semblait avoir été complètement occultée au bénéfice d’une violence exacerbée. Avec Dévisager Dieu, AqME semble renouer avec les mélodies ou encore le chant clair…

Tout à fait. Ces envies sont revenues très naturellement, je ne me suis jamais forcé à insérer plus de chant clair. Tout est question de feeling, nous n’avons pas calculé les choses. Je ne vais pas cacher que m’intégrer à AqME m’a demandé un gros travail, j’ai eu du mal à me lâcher complètement au début du processus d’écriture. Thomas avait laissé un véritable héritage, son chant était vraiment très bon et il avait atteint un excellent niveau d’écriture sur Epithète, Dominion, Epitaphe. C’était impressionnant pour moi de prendre la relève, mais le groupe a su me mettre en confiance. Au final, j’ai travaillé sur mon chant avec une totale liberté, je n’ai jamais eu à me poser de barrières.

On pourrait facilement émettre l’hypothèque que le fait de t’engager sur une longue tournée afin de défendre des compositions qui n’étaient pas les tiennes t’as « débloqué » au niveau du chant clair, tant la progression entre l’EP et cet album est saisissante…

Je ne sais pas. J’ai probablement progressé, mais je travaillais déjà beaucoup le registre mélodique pour Noswab. Je suis jeune, donc j’ai encore du pain sur la planche. Peut-être que mon chant est en effet plus mature sur ce disque d’AqME. Une tournée, c’est dans tous les cas formateur. Tu apprends à te connaitre, à travailler ensemble. Sur la route, il y a beaucoup de temps à tuer. Il faut développer une véritable complicité de groupe. C’est parfois difficile, mais le fait d’être avec d’autres personnes que tu apprécies rend le fait de parcourir la France en long et en large inoubliable. C’est quelque chose qui te pousse à t’investir, à progresser de manière constante.

Tu décris ce disque comme un véritable travail de groupe. En quoi les autres musiciens t’ont-ils aidé à trouver l’équilibre nécessaire au niveau de ton chant ?

C’était surtout des petites choses, d’éventuelles améliorations à apporter. J’aime arriver avec la première idée. J’estime qu’en temps que chanteur, j’ai un travail de défrichage à effectuer. En général, ce que j’amenais parlait aux autres. Etienne – batterie, ndlr – m’a d’ailleurs avoué plus d’une fois avoir été surpris par ce que je pouvais écrire. Mais certaines choses ne fonctionnaient pas, et c’est là que l’intervention des autres musiciens est nécessaire. Ils ont été très francs avec moi, ce qui m’a parfois permis de repartir sur des bases auxquelles je n’aurais pas forcément pensé. Étienne m’a beaucoup tiré vers le haut, notamment pour des parties ou j’avais tendance à ne miser que sur un chant très hardcore. Il m’a poussé à davantage moduler, à utiliser mon chant clair plus franchement. C’était un travail conséquent pour moi au moment des pré-productions. Je pense que ce disque est véritablement « humain », c’est grâce à lui.

Étienne a supervisé l’album de A à Z. Il s’investit énormément dans la composition et assure cette fois-ci la production. Le groupe peut-il désormais se passer d’avis extérieur ?

La question s’est posée. Nous avions évoqué la possibilité d’enregistrer avec Magnus Lindberg, voire de retourner chez Daniel Bergstrand. Mais Étienne était prêt. Pour nous, il est le garant du son AqME, tout le monde était d’accord. Notre label, At(h)ome, était un peu plus sur la réserve. Mais enregistrer avec Étienne était vraiment confortable. Je reste pour ma part vraiment admiratif envers son travail. Il est dans une bulle, il a super feeling avec les groupes qu’il enregistre. Finalement, la phase de studio a été très vite bouclée, nous avons même gagné deux jours sur le planning initialement prévu. Évidemment, il y a eu quelques conflits sans importance, c’est inévitable. Quand quatre personnes vivent 24 heures sur 24 ensemble, tu as rapidement fait de t’énerver contre celui qui n’a pas fait la vaisselle !

La ligne de chant sélectionnée pour le premier teaser était assez explicite : « je ne veux pas vivre dans ton ombre encore brulante ». Doit-on y voir un message à ta position au sein du groupe, ainsi qu’à ceux qui n’imaginaient pas AqME sans Thomas ?

On peut le voir comme un moyen de marquer la transition. Mais le titre – « Au-delà de l’ombre » – dans sa globalité va plus loin. Il est articulé autour de la frustration ressentie à un moment de ma vie ou je voyais d’autres groupes percer, ce qui n’était pas le cas des miens. J’ai eu besoin d’écrire ce texte pour faire ma psychanalyse.

Peut-on dérouler un concept derrière ce titre, Dévisager Dieu ?

Non, il n’y a pas de fil conducteur. Le titre a été trouvé après l’enregistrement du disque, toutes les chansons étaient déjà nommées. Étienne m’a demandé de proposer un nom d’album qui pourrait faire la synthèse de l’ensemble. Pour moi, tous les titres sombres mais ils affichent un indéniable côté positif. Je ne suis pas fataliste, plutôt hargneux. Je parle de frustration, de religion, de ma relation avec mon frère, mais sans jamais sombrer dans le négativisme. Dévisager quelqu’un reste une action forte. Dévisager Dieu symbolise le fait que nous sommes toujours là, que nous ne lâchons pas prise. Il ne faut pas voir dans ce titre une connotation purement religieuse.

Pour AqME, tu chantes en français, ce qui n’est pas le cas au sein de tes autres groupes. Quel exercice t’est le plus facile ?

J’avais écrit des textes en français lorsque j’ai commencé à chanter dans Noswab, mais je chantais en anglais depuis quelques années maintenant au sein de The Butcher’s Rodeo. Ça m’a fait du bien de revenir vers le français, même si ça m’a demandé un gros travail. Pour moi, l’émotion reste la même, je n’ai pas vraiment de préférence. Je chante dans trois groupes, mais aucun ne s’inscrit dans le même registre musical. Ils sont complémentaires.

Tu es récemment arrivé dans le groupe, tu as donc un œil autre sur ce qui fait le son AqME. Comment décrirais-tu Dévisager Dieu par rapport à ses prédécesseurs ?

J’ai suivi AqME sur l’ensemble de leur carrière, nous avions d’ailleurs ouvert pour eux avec Noswab. Pour moi, cet album est une synthèse des précédents. Il a le côté brutal et sans concessions de Epithète, Dominion, Epitaphe associé à l’approche très mélodique des deux premiers opus. Nous avons des chansons assez complexes avec de longues parties instrumentales, et des titres concis et efficaces articulés autour de la puissance des refrains.

Que peut-on vous souhaitez pour la suite ?

Que l’année 2015 soit aussi belle que la fin de l’année 2014. Sans parler d’argent, j’espère vraiment que ce disque va fonctionner. Si j’avais souhaité me remplir les poches, je n’aurais pas fait le choix d’évoluer dans un groupe de metal.  La tournée démarre prochaine, nous souhaitons seulement partager un maximum ces nouveaux titres avec le public.

Nouvel album, Dévisager Dieu, disponible chez At(h)ome.
www.aqme.com

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