{multithumb thumb_width=490 thumb_height=326}19 heures. Le groupe revient d'une séance dédicaces, il faut faire vite. Ce qui s'annonçait pourtant comme une entretien express n'empêche cependant nullement Ben et Thomas de nous expliquer en détail la genèse d'Hérésie, leur quatrième album, ainsi que leurs projets présents et futurs. Compte-rendu.
BEN : Hérésie est votre quatrième album, et clairement le plus violent de votre discographie. Qu’est-ce qui vous a poussés dans cette direction au moment de la composition ?
Thomas (chant) : Je pense qu’on avait encore des thèmes à aborder, et surtout des choses plus virulentes que sur les albums précédents. Au moment de la composition, l’album se profilait comme plus puissant… Je ne trouve pas que le terme violent corresponde vraiment au son d’AqME, mais puissant et virulent définissent bien ce disque. On l’a juste composé comme ça, tout est venu naturellement, et à ce moment là on n’avait pas trop envie de s’orienter vers des morceaux calmes.
Beaucoup de groupes livrent un album plus mid-tempo avant d’amorcer un retour vers des envies proches de leurs origines, ce qui est le cas d’AqME. L’expérience de La Fin des Temps a-t-elle eu une incidence sur ces envies ?
Ben (guitare) : Chaque disque est fait en réaction à celui d’avant. C’était pareil pour le changement de direction opéré sur La Fin des Temps…
Thomas : Après ce disque plus progressif et toutes ces nombreuses ambiances, on voulait retourner vers des titres plus courts et puissants.
Ben : Faire dans l’efficace !
Thomas : On souhait vraiment un disque qui aille à l’essentiel, sans se poser de questions. Là les chansons sont directes, c’est la fête du riff !
Ben : Mais on repartira peut-être vers des morceaux de douze minutes sur le cinquième…
Thomas : Ou un unique titre de soixante minutes, un peu dans l’esprit Meshuggah (rires) !
Vous aviez justement tentés de nouvelles choses sur ce précédent disque, et toutes n’ont pas remportées l’approbation du public. Conservez-vous des regrets vis à vis de cette période ?
Ben : Non, pas du tout. On a fait cet album, ce qui ne nous a pas empêchés de remplir notre Olympia sur la tournée. Certaines personnes viennent nous dire que c’est leur disque préféré…
Thomas : La Fin des Temps n’a peut-être pas plu à tout le monde, mais pour notre part nous en restons très contents. C’était une photo de cette période, de nos envies à ce moment là. On ne regrette absolument rien, qu’ils s’agisse de celui-ci ou des premiers opus.
Le groupe avait annoncé une année sans AqME, et vous voilà de retour dès février 2008…
Ben : Nos vacances se sont en effet limitées à trois mois !
Comment s’est déroulée la composition ?
Ben : (longue hésitation)… Bien (rires) !
Thomas : On n’avait aucune pression. Avec La Fin des Temps, il fallait faire vite car on avait réservé le studio avant d’avoir terminé la composition. Pour Hérésie, on s’est vraiment laissés le temps, on avait tout 2007. On répétait deux fois par semaine, c’était vraiment « à la frech » ! Du coup, on a poussés les compositions jusqu’au bout. Dès que quelque chose ne nous convenait pas totalement, on dégageait. Il y a même deux chansons qui ont été totalement remaniées, « En Saga Om Livet » et « Uniformes ».
Ben : Ah bon ?
Thomas : Oui, je n’arrivais pas à trouver le refrain sur cette dernière. Après il y a quand même eu des chansons qui sont arrivées toutes seules et qui vont droit au but, comme « Karma & Nicotine » ou « Casser / Détruire ». Celle là on a du la faire en trente minutes au cours une répète, bien dans l’urgence.
Vous avez de nouveau collaborés avec Daniel Bergstrand, qui avait produit Sombres Efforts ainsi que Polaroïds & Pornographie. Vous aviez pourtant annoncés regretter le son trop propre et clinique, quelles étaient vos attentes pour Hérésie ?
Ben : On a vraiment beaucoup discutés avant de le faire. On souhaitait qu’il travaille différemment, ce qui ne pouvait qu’être le cas puisque son assistant, que l’on n’aimait pas trop, n’était plus là. On a quand même tenu à parler pour changer certaines choses, le sortir un peu de son schéma de production habituel. Thomas et moi ne sommes pas des grands fans du studio, donc on tenait à travailler avec quelqu’un qui connaisse bien AqME.
D’autres producteurs ont-ils été envisagés ?
Ben : On a notamment parlés avec Magnus Lindberg, le batteur de Cult Of Luna.
Les paroles sont une nouvelle fois assez sombres et personnelles. Est-ce un processus libérateur pour toi ?
Thomas : C’est clairement une thérapie. Sans ça, j’aurais terminé en haut d’une tour à tirer sur les gens. Déjà qu’en expulsant certaines choses avec AqME, je suis encore limite… Au fond, je crois que je déteste profondément les humains !
Quel titre serait le plus personnel dans la discographie du groupe ?
Thomas : La question est assez difficile. Ca dépend des moments, il y a pas mal de sentimental dans les morceaux d’AqME, ainsi que beaucoup de colère. Aujourd’hui, je pourrais dire « Uniformes ». Je déteste entendre les gens dire qu’il faut être habillé d’une telle manière, ou écouter ça plutôt qu’autre chose. J'ai vraiment en horreur ce genre de comportement. Je pense que c’est ce qui fait d’AqME un groupe à part au final, on fait tout ce que l’on peut pour ne pas pomper sur les voisins… On ne va pas faire une copie de Isis, Cult Of Luna ou Neurosis pour paraître bien, on fait notre musique, point final. Pareil, je n’aime pas les groupes qui vont se mettre à composer des choses plus calmes dans l’unique objectif de passer en radios…
Ben : On est autant agacés par le grand public que par le snobisme, que l’on trouve plus particulièrement dans le hardcore, le postcore et tous ces machins core. On n’est ni calibrés pour les masses, ni élitistes.
Thomas : Que tu veuilles faire de la variété, de la pop ou du metal, fait le d’abord pour toi-même. Il y a des groupes dont on n’aime franchement pas la musique, mais que l’on trouve sincères et avec qui on s’entend très bien.
Vous aviez déclarés au moment du Live(s) envisager une sortie à l’étranger. Avez-vous avancés sur ce projet, l’utilisation du Français représente-t-il une barrière ?
Ben : Les choses avancent doucement. Dans un premier temps, ca va surtout être des sorties confidentielles. On travaille notamment sur l’Allemagne, le Québec est également en train de se finaliser. Mais tout reste à faire, il est surtout question de quelques dates en guise de test.
Enhancer vient d’annoncer la création de Nowhere Prod. Ben, es-tu engagé dans cette structure en développement via Die On Monday ?
Pas du tout, ni Die On Monday. On me l’a déjà demandé d’ailleurs. Mon but avec ce groupe est juste de faire de la guitare, de m’amuser à jouer des riffs typés Black Sabbath. Si on nous propose un bon deal, on saisira l’occasion c’est certain.
Après avoir longuement parlé de piratage, il est désormais question de musique dématérialisée. Est-ce que vous pourriez envisager de distribuer votre musique par ce biais ?
Ben : C’est certainement le futur, mais ça nous rebute quand même un peu.
Thomas : Comme dans toute nouvelle chose, c’est à la fois positif et négatif. C’est sur, il y a beaucoup de positif dans ce cas là, puisque tu découvres beaucoup de nouveaux groupes, avoir accès à de la musique impossible à trouver, discuter avec les artistes via myspace par exemple… A côté, tu n’achètes pas les disques. En même temps, il devient difficile de trouver certains albums. Mais certains sites de vente en ligne sont là pour ça. Tout est une question de soutien, si tu aimes, il faut parfois faire l’effort d’acheter.
Ben : Ou que le téléchargement légal devienne un réflexe, et j’espère que cela va arriver. La dématérialisation est effective dans le cinéma comme pour la musique, c’est le futur. On va avoir de plus petits appartements, donc moins de place pour y stocker des CDs ou des DVDs ! C’est la vie et il va falloir faire avec, plutôt que se voiler la face comme dans les maisons de disques. Nous, ca nous fait encore chier car on reste attachés à l’objet, mais nos gamins n’en auront probablement plus rien à faire.
Thomas : J’espère quand même qu’il restera des gens pour acquérir l’objet. Personnellement, j’y attache encore une grande importance, tu pioches, tu redécouvre des choses…
Ben : Mais nous, on est d’une autre génération ! Plus tard, ils auront des belles rangées de disques durs (rires) !
2008 est définitivement l’année des reformations. Quels groupes souhaiteriez-vous voir revenir sur le devant de la scène ?
Thomas : On va réveiller des morts !
Ben : Définitivement Soundgarden. Je n’ai jamais eu la chance des les voir en concert. Alice In Chains c’est sympa aussi, mais sans leur chanteur c’est quand même pas la même chose.
Thomas : Moi je suis content pour Rage Against The Machine, ainsi que pour NTM. Je trouve que le rap est vraiment devenu merdique, et il est temps qu’ils reviennent car on a touchés le fond… J’ai vu que Kool Shen et Joey Starr semblaient plutôt motivés sur le plateau de Canal +, leur discours était assez positif sur une éventuelle suite aux trois concerts de septembre. On entend beaucoup Joey Starr car il a une grosse voix, mais Kool Shen est aussi quelqu’un de très intelligent et travailleur. C’est un binôme qui fonctionne à merveille, et on espère qu’ils vont un peu remettre les pendules à l’heure.
Un grand merci à Flo.