Après une tournée d’une cinquantaine de dates en 2009/2010, Cercueil repart sur la route cette année pour défendre son deuxième opus, Erostrate, brûlot Electro sombre à la voix douce mais acerbe, aux orientations Rock psyché et Trip-Hop. C’est à l’occasion d’une série de concerts où ils ouvraient pour le mystérieux mais culte Alan Vega que nous avons pu rencontrer Pénélope (chant, synthés), Nicolas (guitare, basse) et Olivier (batterie) afin d’en savoir un peu plus sur leur nouvel opus et leurs projets…
Vous débutez cette tournée en ouvrant sur plusieurs dates pour Alan Vega, un personnage très atypique de la scène Electro…
Pénelope: C’est un honneur car c’est un personnage assez culte par ce qu’il représente, qui a marqué l’histoire de la musique électronique…
Nico: Même si ça ne se ressent pas beaucoup dans notre musique, c’est un son qu’on apprécie beaucoup, on a écouté Suicide depuis très longtemps, cela fait partie de nos multiples influences…
Olivier: C’est pour cela aussi qu’il était temps de faire écouter Cercueil au public d’Alan Vega, c’est intéressant de faire ce pont là…
Vous êtes allé à Bristol, un endroit mythique de la scène Electro, pour enregistrer votre nouvel album, Erostrate. Pourquoi ce choix?
P.: Ce n’était pas du tout prémédité d’arriver à Bristol pour enregistrer cet album. Au départ on avait une idée très très précise de ce que l’on voulait mais ça n’a pas pu se faire pour des raisons de planning… On a dû se résigner à trouver un autre studio, et après de nombreuses recherches, on s’est orienté vers le Toybox de Bristol, même si le fait qu’il se trouve à Bristol n’a aucunement influencé notre décision… Même quand on est arrivé en studio, les morceaux étaient déjà là, donc ça n’a pas influencé les titres non plus.
N.: La seule chose c’est qu’Alister Chant qui nous a enregistré, travaille beaucoup avec Alan Parish qui enregistre PJ Harvey, ce qui nous a donné une approche de l’analogique différente, avec des micros qui font les effets et non des plug-ins par exemple…
Est-ce que votre manière de travailler a évolué pour l’enregistrement de cet album?
P.: Non, finalement ça s’est déroulé de la même façon. On a eu un peu plus de temps, peut-être. On rentre en immersion sur une longue période, à composer, à structurer, ce qui donne des maquettes que l’on propose à Olivier pour qu’il nous donne son interprétation à la batterie des titres… Il y à beaucoup d’échanges entre nous, c’est assez décousu…
O.: Oui ce n’est pas une manière de composer très orthodoxe, la ligne directrice est l’échange et l’expérimentation.
P.: C’est une démarche assez froide qui demande beaucoup d’anticipation, même si on essaie de garder malgré tout un côté spontané en travaillant ensemble…
Vous êtes dans un style qui navigue constamment entre Rock et Electro… Est-ce que ça a été facile de rencontrer votre public dans le sens où ce sont deux publics avec des attentes différentes?
P.: C’est plutôt justement une facilité à pouvoir être un peu caméléon et se faufiler en soirées où les ambiances sont différentes… Après évidemment on a des surprises dans des soirées Electro où les gens ne sont là que pour danser, et que notre musique demande une certaine attention, c’est parfois difficile de faire coïncider les envies…
O.: Moi je vois plutôt ça comme un atout de jouer dans deux cours différentes et de pouvoir toucher un public plus large.
N.: Je dirais que c’est plus simple quand on joue dans les conditions d’un concert Rock, car notre musique a malgré tout un background plus Rock qu’électronique, sauf quand on est dans une soirée électronique dirigé vers l’expérimental où le public sait à quoi s’attendre…
Les deux facettes de votre son qui interpellent le plus sont le côté hypnotique, mais aussi le côté très sombre, presque funeste… d’où vous vient cette noirceur?
N.: Ça vient de Dunkerque, notre ville d’origine, entouré d’usines… (rires)
O.: Il y a des choses que l’on ne contrôle pas, la noirceur n’est pas du tout calculée ou décidée, mais le côté sombre ressort.
P.: J’ai lu dans certaines chroniques des gens parler d’angoisse, mais je n’arrive pas du tout à voir ce côté angoissant… c’est plutôt une contemplation que quelque chose de plaintif… de la mélancolie, à la rigueur.
N.: Le côté glauque vient du nom, ça donne tout de suite une certaine couleur!
Pouvez-vous citer des influences majeures du groupe, même si elles sont j’imagine très différentes?
N.: On a une culture qui vient du Kraut Rock ou du Post Rock, du psyché, New Wave et Electro…
P.: Fugazi, les new-yorkais, le label Skin Graft, ce sont un peu les musiciens qui nous ont poussé à l’expérimentation…
O.: Cercueil est un mélange de beaucoup de choses, d’époques différentes…
Il y a un côté universel dans votre musique, Cercueil a-t-il une vocation à être exporté?
P.: On n’attend que ça! Pour l’instant on a fait quelques dates à l’étranger, on a eu la chance de jouer à Montréal, en Angleterre, en Belgique…
O.: Ce qui est délicat, c’est de jouer à l’étranger sans avoir un disque qui est sorti là-bas, donc on travaille là-dessus.
N.: Ce n’est pas l’envie qui manque mais plutôt un label qui assure notre distribution là-bas… Ce qui pourrait nous aider, c’est une résonance plus international au niveau du label…
P.: Le disque va être distribué à l’étranger, un peu aux Etats-Unis, dans divers pays européens, donc on verra!
Y-a-t-il des groupes avec qui vous aimeriez partager l’affiche à l’avenir?
P.: Dernièrement, on a découvert un groupe à Bristol, Bear In Heaven, qui pourrait très bien coller avec notre style.
O.: Il y à les Bang Bang Dead, avec qui ont a failli jouer et avec qui ont aimerait toujours jouer…
N.: Avec Liars, on aimerait bien aussi, on va jouer avec PVT qu’on aime bien…
Votre son dégageant un fort côté atmosphérique, il y aurait une belle place à faire pour un accompagnement visuel en concert, est-ce quelque chose sur lequel vous travaillez?
P.: C’est une très vieille envie, un vieux projet que l’on n’a jamais eu le temps de mettre en place, mais qui va peut-être se produire l’année prochaine! On n’a pas envie non plus que l’image prenne la place du reste sur scène, qu’elle contribue à l’ambiance et non pas que les gens soient happés par elle…
Que peut-on vous souhaiter pour les mois, les années à venir?
O.: Des concerts surtout, car c’est là où on défend notre musique, où l’on rencontre le public, c’est là on on se sent le mieux finalement!
Merci à Pénélope, Nicolas et Olivier pour leur temps et leur accueil.
Merci à Alex (Le Son du Maquis – www.maquismusic.com ) de nous avoir permis de réaliser cette interview dans de très bonnes conditions, ainsi qu’à l’équipe du Cargö de Caen.
Interview et photos: Julien Peschaux pour Vacarm.net