Prismo Perfect fait partie de cette longue tradition des groupes DIY (« Do It Yourself »). Le groupe est auto-produit dans toutes les phases de production, que ce soit pour la pochette, l'enregistrement, le mastering etc. À partir (peut-être) de cette philosophie, ils s'affirment comme provenant de « nulle part ». Ils se sont donnés naissance seuls. Pourtant, il y a des histoires derrière. Cette histoire commence à Brest pour ce qui est de la géographie. Du point de vue matériel, il y a ce premier EP : Out Of Nowhere.
Car tout est histoire. Donc Prismo Perfect peut être mis dans une perspective historique sans que cela pose le moindre problème. Paul Veyne le confirme dans son essai Comment On Ecrit l'Histoire ? : l'histoire est « un roman vrai [..] des événements vrais qui ont l'homme pour acteur ». Finalement, c'est cela qui fait sortir de nulle part : l'action. L'EP symbolise l'entrée dans le monde et permet à Prismo Perfect de s'affirmer dans un cadre historique. Maintenant qu'ils sont là, il reste à constituer cette histoire d'Out Of Nowhere. Pourquoi un groupe Brestois a-t-il décidé de faire de la musique et de concrétiser ce choix en sortant un disque à la fin de l'année 2009 ?
Le point marquant chez ces Brestois est qu'ils ne renient à aucun moment le temps dans lequel ils se situent. Tout d'abord, les influences ne sont pas même suggérées. Elles sont revendiquées avec force. On se situe ici dans un milieu qui mélange, schématiquement, un soupçon de Sonic Youth avec beaucoup de My Bloody Valentine. Il y a un retour aux années 90 et ce qui pouvait s'y faire de meilleur (en post-punk). Le son est dès le départ très puissant et touffu, tandis que la voix est plutôt laissée en retrait, avec un petit effet pour renforcer cette impression. La guitare est juste omniprésente. Prismo Perfect remet à jour l'expression brut de décoffrage avec brio.
Pourtant, « Dead Shadow » fait office à première vue de morceau original par rapport aux autres. Au milieu d'un brouillard-son, quelques petites sifflements émergent et comme une éclaircie se met en place pour la seconde moitié de ce morceau uniquement instrumental, forme qui leur sied à merveille. Tout s'y joue dans une progression lente pour changer les sentiments de l'auditeur. Car même cette éclaircie devient obsédante, envahissante.. un peu gênante. Elle prépare alors le déluge hallucinant de « Enable Stop ». Plus généralement, l'univers est souvent sombre et pesant. Les lueurs d'espoirs ne sont pas ici légions.
Ainsi, Prismo Perfect vous met le nez sur le bitume, c'est-à-dire que le groupe n'hésite pas à vous rappeler une réalité matérielle un peu dérisoire. On est dans une ère très froide, crue, industrielle et avec sa part de moments d'incompréhension, où l'on est rejeté, comme avec les voix télévisuelles qui se mélangent sur « TV Dream ». Musique actuelle (donc historique), parce qu'exprimant son époque par mimétisme, Prismo Perfect met un peu mal à l'aise. L'écoute de cet EP n'est certainement pas de tout repos. Il s'agit tout simplement d'une claque, dans les deux sens : Out Of Nowhere impressionne et réveille.
.: Tracklist :.
01. TV Dream
02. Summer In The Kitchen
03. Dead Shadow
04. Enable Stop
05. Wired Feelings