O ! The Joy, un patronyme étrange pour une formation alien. Tout droits débarqués de Sacramento, californie, les quatre musiciens azimutés ne s’imposent aucune bannière et signent avec Zen Mode un premier disque radicalement éloigné de tout standard. Un anti-conformisme assumé qui ne pouvait qu’attirer l’attention du label le plus barré de l’industrie musicale Française : Distille Records. Sortie confidentielle pour un album qui demeurera forcément en partie incompris, malgré son indiscutable qualité d’écriture.
Zen Mode est une oeuvre musicale avant-gardiste, difficile à cerner de prime abord de par les nombreuses barrières bruitistes qu’ils s’érige. O ! The Joy construit sa musique comme une expérimentation foisonnante d’éléments, souvent démultipliés à l’extrême et circulant au sein des compositions en électrons libres (« There Is No Such Thing As Organizes Crime »). Si le tout conserve une base purement rock’n’roll, le quintet ne se range sous aucune étiquette, fusionnant aussi bien des éléments propres à la noise qu’un esprit rock alternatif proche des évasives envolées de The Mars Volta. Zen Mode est avant-tout un album expérimental, dix morceaux évitant les restrictions des schémas calibrés du couplet / refrain / couplet afin de laisser cours à une certaine forme de folie créatrice captée sur le vif (« 22435 », « Conceivable Test Tube Baby »). Une vision inédite d’une free-rock couché sur bandes par une guitare zigzaguant dans les sons clairs, s’attardant plus volontairement dans les dérives psychédéliques aiguës que sur des accords simplistes, perdant parfois l’auditeur dans ses ballades stratosphériques acides (« I Just Didn’t Tell You », « The Fault Is Not Mine »). Chaque morceau fait avant-tout appel au ressenti et les gimmicks récurrents se font rares, l’accompagnement rythmique se voulant de plus totalement polymorphe. Les changements et cassures rythmiques sont donc légions, annonciateurs de mutations d’ambiances souvent déstabilisantes.
Pourtant, Zen Mode conserve malgré tout une certaine continuité, notamment grâce à un son de guitare plutôt spécifique mais appliqué à chaque composition, et parvient presque à s’arpenter de façon limpide avec les écoutes. Le chant du frontman présente les mêmes difficultés d’accès, Kurt Travis habillant des instrumentations déjà sévèrement barrées d’un timbre flirtant majoritairement les aiguës. Quelques incartades se montrent plus lancinantes (« Conceivable Test Tube Baby »), mais Travis avance plus volontairement des délires vocaux proches d’un Cédric Bixler Zavala, sans pour autant garder à l’esprit une quelconque notion de couplet ou refrain. Le frontman intervient de façon épisodique, comme guidé par l’instinct ainsi que la même volonté d’improvisation (l’excellent « We Write The Next Chapter »). Le chant ne s’impose de ce fait jamais en mètre étalon, et se voit presque utilisé comme un instrument au délire fusionnant de O ! The Joy.
Zen Mode est un album différent, articulé autour d’une inébranlable volonté d’indépendance. Une pure expression artistique et personnelle sur laquelle la logique commerciale n’impose aucune forme d’influence. A découvrir.
.: Tracklist :.
01. Conceivable Test Tube Baby
02. There Is No Such Thing As "Organized Crime"
03. This Fault Is Not Mine
04. Under The Radar
05. 22 435
06. The Man And The Secrets
07. We Write The Next Chapter
08. I Just Didn’t Tell You
09. Guiding Role
10. Zen Mode