On savait les suédois capables du meilleur quand il s’agit de death, de black, de progressif ou doom-scandinavian-brutal-hippy-core, on les connaissait moins dans leur capacité à proposer des productions Fusion presque radio-friendly, et surtout furieusement groovy. C’est chose faite avec Freak Kitchen, combo formé en 1992 à Goteborg, et qui nous offre ce huitième album Land Of The Freaks, toujours fortement teinté d’humour, tant au niveau des textes que de l’artwork, une des caractéristiques du groupe. Car le guitariste et leader du groupe, Mathias «IA» Eklundh est un technicien hors pair qui ne se prend pas au sérieux, n’hésitant pas par exemple, à se servir sur scène d’un vibromasseur pour gratter sa guitare… qui a dit que les virtuoses devaient tous êtres des gens ennuyeux?
C’est donc avec une surprise non dissimulée que l’on entre dans ce Land Of The Freaks, avec une nostalgie d’un son oublié, celui des saturations du début des années 90 et des pérégrinations déjantées des énormes bassistes que furent Les Claypool (Primus) ou Flea (RHCP) avant que ce dernier range ses doigts et son cerveau au profit de l’avénement Pop-Rock à la «By The Way». Car c’est bien dans cette époque préfigurant le nouveau métal qu’il faut placer ce huitième album des suédois: prenez la même saturation que l’excellent et très roots Adrenaline de Deftones, ajoutez-y une voix heavy qui n’hésite pas à verser dans les mélodies déstructurées rigolardes, ainsi que des rythmiques groovy souvent jazzy comme aimaient le faire les Red Hot Chili Peppers dans leurs premiers albums et un je-ne-sais-quoi dans l’esprit qui nous rappelle les méfaits de Mike Muir et ses Suicidal Tendencies et vous obtenez cet album hors du temps mais ô combien attractif et agréable… on aborde l’album avec un excellent «God Save The Spleen» breaké et à la mélodie imparable, on passe par le très jazzy «Sick? (Death By Hypochondria)» ou par le très mélodique «OK», deux morceaux que n’auraient certainement par renié Incubus tant l’univers musical est proche de celui des américains, pour arriver sur des pépites fusion à la Primus, humour noir compris, telles que «Honey You’re a Nazi» ou «Murder Groupie»… si l’ensemble perd parfois en cohérence tellement les styles abordés sont différents, on est grandement diverti par ce pot-pourri d’influences et de techniques de jeu différentes le tout dans une maîtrise technique bien au dessus de la moyenne.
C’est donc un beau retour dans les années 1990 qui nous est proposé ici, tant un niveau du son que des influences, mais quel pied de retrouver cette ambiance qui ne se pose aucune limite stylistique! Pas question pour les suédois d’intégrer une quelconque machine électronique ici, quand ils veulent créer des atmosphères funky, c’est à coups de batterie breakée, de grooves de basse et de cocotes saturées qui sont un bonheur pour les adeptes de la rythmique et les autres… On est à la fois déçus de s’être passé d’un tel groupe pendant toutes ces années de vaches maigres sonores où les productions froides du néo nous ont un peu privé de la chaleur de ces rythmiques groovy et de cet esprit décalé, mais aussi ravis qu’un représentant du Rock scandinave nous offre un tel festin musical, rappelant à des groupes comme les Red Hot ou Incubus, qu’avant de nous gaver de leurs ritournelles pop-rock, ils proposaient ce genre d’opus réussis.
.: Tracklist :.
1. God Save the Spleen
2. Hip Hip Hoorah
3. Teargas Jazz
4. Sick? (Death by Hypochondria)
5. Ok
6. Honey, You’re a Nazi
7. The Only Way
8. Murder Groupie
9. The Smell of Time
10. One Last Dance
11. Do Not Disturb
12. Clean It Up