En l’espace d’un unique album, No Hay Banda en 2005, Audrey Horne était parvenu à s’imposer dans son pays d’origine. Un succès certes retentissant en Norvège, mais un passage plutôt rapide et inaperçu dans les magasins étrangers, malgré un disque pourtant calibré pour cartonner au même niveau que certaines production américaines. D’où une certaine réticence des distributeurs à s’engager aujourd’hui pour ce second essai. C’est donc quasiment six mois après la sortie d’origine et surtout à la suite de bons résultats dans les charts que le processus se débloque enfin pour l'étranger.
Audrey Horne reste un projet des plus surprenants. Non pas par sa musique, qui développe de fortes connivences avec un rock américain standardisé mais néanmoins de haute volée, mais plutôt de par l’origine de ses musiciens. Certains membres proviennent en effet de formations bien portées sur le gros son qui tache sévère, à savoir Enslaved et les maquillés de Gorgoroth, ce qui n’empêchera aucunement Audrey Horne de s’étendre totalement dans des étendues mélodiques à souhait. Ce qui ne pourra que difficilement être perçu comme strictement opportuniste et ce malgré une accessibilité bien évidemment décuplée, tant Le Fol s’avère inspiré. Car ces douze morceaux ont beau avancer une structure radiophonique des plus basiques, il n’en restent pas moins sévèrement bien branlés, exposant de ci et là quelques relents qui ne seront pas sans rappeler les Queens Of The Stone Age voire des formations incontournables des nineties comme Alice In Chains ou Faith No More (l’excellent « Threshold », qui n’hésite pas à intégrer aussi long que bon pont instrumental). Les musiciens parviennent à parfaitement équilibrer leurs instrumentations, alternant les passages dotés de riffs emplissant tout l’espace sur des passades mélancoliques à souhait (« In The End », « Last Call », « I Wish You Hell »), préférant se fendre d’une rythmique qui ne force à aucune occasion sur la pédale d’accélérateur plutôt que de faire preuve d’une technicité inutile. Et pourtant, la paire de guitariste en est diablement capable (le long et magnifique solo de « So Long, Euphoria »). Malgré ces caractéristiques ainsi que cette dimension mélodique très marquée, Le Fol n’a strictement aucun point le rattachant à un néo-metal jumpy de bas-étage, l’ensemble demeurant même tout du long relativement sombre et habité.
Les ballades évitent à ce titre le si facile piège de la guimauve pleurnicharde et insipide, malgré le risque que l’intégration des cordes, ici somptueuses, impliquait. Des compositions de la trempe de « Bright Lights » ou encore un « Monster » qui s’envole en guise de final dans un solo bluesy sont à ce titre absolument superbes. Car malgré une base purement rock’n’roll fortement influencé par de glorieux classiques, Audrey Horne n’en oublie pas pour autant ses petites touches personnelles, éléments qui s’ajoutant au talent de composition avancé par la formation et lui permettent de marquer sa différence. Et puis, en guise d’ultime pied de nez au Américains prétendus détenteurs du son rock’n’roll, il y a cette voix, unique et ultra-efficace. Un chant-clair soutenu et carré, synonyme d’un coffre assez rare et d’une véritable aisance dans le domaine. Sans jamais tanguer vers le registre hurlé, Toschie habille avec talent une série de refrain d’interventions puissante qui permettent aux morceaux de véritablement exploser (« So Long, Euphoria », « Afterglow »). Grandiose.
Le Fol est au final une excellente surprise. L’accès en haut des charts norvégiens s’avère donc aisément compréhensible, et même s’il demeure quasiment inconcevable que le quintet en fasse de même à l’étranger, ce très bon second opus pourrait bien leur accorder une reconnaissance grandissante. Affaire à suivre.
.: Tracklist :.
01. Last Chance For A serenade
02. Jaws
03. Last Call
04. Threshold
05. Monster
06. Afterglow
07. In The End
08. Pretty Girls Make Graves
09. Bright Lights
10. Hell Hath No Fury
11. Wish You Well
12. So Long Euphoria